Enterre Mon Coeur à Wounded Knee: Une Histoire Américaine, 1860-1890
demanda que ses canons Hotchkiss soient installés au sommet d’une colline. Ainsi positionnées, ces pièces d’artillerie capables de projeter des charges explosives à plus de trois kilomètres pourraient cribler d’obus le campement indien.
Plus tard, dans la pénombre de cette nuit de décembre, ce qui restait du 7 e régiment arriva de l’est et installa discrètement son bivouac au nord de celui des troupes de Whitside. Le colonel James W. Forsyth, commandant de l’ancien régiment de Custer, prit alors la tête des opérations. Il avait, dit-il à Whitside, reçu l’ordre d’emmener Big Foot et sa bande jusqu’au train de l’Union Pacific Railroad afin qu’ils soient expédiés dans une prison militaire à Omaha.
Après avoir placé deux autres Hotchkiss au même endroit que les premiers, Forsyth et ses officiers se préparèrent à fêter la capture de Big Foot avec un tonneau de whisky.
Haletant sous sa tente, le chef miniconjou passa la nuit pratiquement sans dormir. Malgré la protection de leurs chemises sacrées et le réconfort des prophéties du nouveau Messie, les Miniconjous ne se sentaient pas rassurés avec tous ces soldats autour d’eux. Quelques-uns avaient, quatorze ans auparavant au bord de la Little Bighorn, contribué à la défaite de certains des chefs soldats – Moylan, Varnum, Wallace, Godfrey, Edgerly – et les cœurs de ces officiers devaient brûler du désir de se venger.
« Le lendemain matin, on a entendu retentir le clairon », devait raconter Wazu Maza, l’un des guerriers de Big Foot qui, des années plus tard, se ferait appeler Dewey Bear. « Alors, j’ai vu les soldats enfourcher leurs montures et venir nous encercler. Ils nous ont informés que tous les hommes devaient s’avancer vers le milieu du cercle pour discuter avec eux et qu’après, ils iraient à l’agence de Pine Ridge. Big Foot a été installé devant sa tente, avec les autres anciens autour de lui, au centre de notre groupe. » Forsyth fit distribuer des galettes pour le petit déjeuner, puis annonça aux Indiens qu’ils allaient être désarmés. « Ils nous ont demandé nos armes, raconte White Lance, alors nous leur avons tous donné nos fusils, qui ont été empilés au milieu. » Mais les officiers jugeaient insuffisant le nombre d’armes récupérées. Ils firent donc fouiller les tipis. « Ils [les soldats] entraient carrément dans les tentes et en ressortaient avec des ballots qu’ils ouvraient en les déchirant, explique Dog Chief. Ils ont pris nos haches, nos couteaux et les piquets que nous utilisions pour les tipis et les ont empilés à côté des fusils. »
Les officiers, toujours insatisfaits, ordonnèrent alors aux guerriers d’ôter leurs couvertures et de se laisser fouiller. Si les Indiens laissèrent transparaître la colère sur leur visage, seul leur homme-médecine, Yellow Bird, protesta ouvertement. Il esquissa quelques pas de la danse des Esprits et entonna un chant sacré assurant aux Indiens que les balles des soldats ne pourraient pas traverser leurs chemises sacrées. « Les balles ne viendront pas vers vous. La prairie est vaste et les balles ne vous toucheront pas. » Les soldats ne trouvèrent que deux fusils, dont l’un, une Winchester toute neuve, appartenait à un jeune Miniconjou du nom de Black Coyote. Ce dernier leva l’arme au-dessus de sa tête en criant qu’il avait payé beaucoup d’argent pour elle et qu’elle lui appartenait. Quelques années plus tard, Dewey Bear raconterait ainsi la scène, après avoir précisé que Black Coyote était sourd : « S’ils l’avaient laissé tranquille, il aurait déposé l’arme là où on lui demandait de le faire. Mais ils se sont emparés de lui et l’ont fait pivoter. Au début, il était encore calme. Il ne visait personne avec son arme. Il avait l’intention de la poser sur le tas. Ils ont voulu saisir sa carabine. Juste après qu’ils l’ont fait pivoter, nous avons entendu une détonation, assez forte. J’ignore si quelqu’un a été touché, mais après, il y a un grand bruit. »
Pour Rough Feather, « [c]e bruit, on aurait dit une toile qu’on déchirait ». D’après Afraid-of-the-Enemy, c’était comme « un éclair ».
Si l’on en croit Turning Hawk, Black Coyote « était un fou, un jeune homme qui avait une très mauvaise influence, un moins que rien ». Il avait tiré et « les soldats ont immédiatement riposté, et ils nous ont tiré dessus sans
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