Enterre Mon Coeur à Wounded Knee: Une Histoire Américaine, 1860-1890
Ensuite, Mr Forbes a déclaré aux Sioux de Lower Agency qu’ils n’étaient pas des hommes. Puis Roberts a tenté avec ses amis de nous voler nos annuités (11) . Les jeunes braves s’en sont pris aux Blancs, mais c’est moi qui suis responsable. Cela, je veux que tu le dises au gouverneur Ramsey. J’ai beaucoup de prisonniers, des femmes et des enfants (…). Je veux que tu me donnes une réponse par l’intermédiaire de ce messager.
Le général Sibley répondit de la façon suivante :
Little Crow – Tu as tué beaucoup des nôtres sans aucune raison valable. Remets-moi les prisonniers sous le drapeau blanc, et alors je parlerai avec toi d’homme à homme.
Little Crow n’avait nullement l’intention de libérer les prisonniers tant que Sibley ne faisait pas savoir, d’une manière ou d’une autre, s’il avait l’intention d’exécuter les ordres du gouverneur, c’est-à-dire exterminer les Santees ou les forcer à l’exil. Le chef comptait utiliser les prisonniers comme monnaie d’échange. Les conseils tenus entre les différentes bandes n’avaient cependant pas permis, loin de là, de s’accorder sur la décision à prendre avant que l’armée de Sibley n’atteigne la Yellow Medicine River. Paul Mazakootemane, un Sisseton d’Upper Agency, reprocha à Little Crow d’avoir déclenché la guerre. « Donne-moi tous tes captifs blancs, lui dit-il. Je les remettrai à leurs amis (…). Cessons de nous battre. Celui qui combat les Blancs ne peut ni devenir riche, ni rester deux jours au même endroit. Il est condamné à fuir sans cesse et à vivre le ventre creux. »
Wabasha, qui avait participé aux batailles de Fort Ridgely et New Ulm, pensait également qu’il valait mieux faire un pas vers la paix en libérant les prisonniers. Mais ce fut son gendre, Rda-in-yan-ka, qui exprima la position de Little Crow et de la plupart des guerriers : « Je suis pour la poursuite de la guerre, et m’oppose à la libération des captifs. Je doute que les Blancs respectent l’accord conclu si nous les relâchons. Depuis que nous avons affaire à eux, leurs agents et leurs négociants ne cessent de nous voler et de nous escroquer. Certains des nôtres ont été abattus, d’autres pendus, d’autres enfin abandonnés sur des plaques de glace flottant sur l’eau et morts noyés, et nombreux sont ceux qui ont succombé à la faim dans leurs prisons. Notre nation n’avait pas l’intention de tuer les Blancs jusqu’à ce que ces quatre jeunes gens rentrent d’Acton et nous racontent ce qu’ils avaient fait. C’est à ce moment-là que tous nos jeunes braves se sont enflammés et que le massacre a commencé. Les aînés l’auraient empêché s’ils l’avaient pu, mais depuis les traités ils ont perdu leur influence. Nous aurons beau regretter ce qui s’est passé, les choses sont allées trop loin pour être réparées. Il nous faut mourir. Et puisqu’il en est ainsi, tuons le maximum de Blancs, et que les prisonniers meurent avec nous. » Le 12 septembre, Little Crow, offrant à Sibley une dernière chance de mettre un terme à la guerre sans autre effusion de sang, lui assura dans un message que les prisonniers étaient correctement traités, ajoutant : « [j]e veux qu’en ami tu me dises comment je peux obtenir la paix pour mon peuple. »
Or, le même jour, à l’insu de Little Crow, Wabasha envoyait à Sibley un message secret dans lequel il rendait le vieux chef responsable de la guerre et affirmait être un ami « du bon peuple blanc », omettant de mentionner le fait qu’il avait combattu ce même peuple blanc quelques semaines auparavant à Fort Ridgely et New Ulm. « On m’a empêché de prendre toute initiative en me menaçant de mort si je faisais quoi que ce soit pour aider les Blancs, mais si tu veux bien m’indiquer un endroit où te rencontrer, je rassemblerai tous les prisonniers que je peux libérer avec l’aide des quelques amis que j’ai, et nous nous rendrons avec nos familles là où tu nous dis de te retrouver. »
Sibley répondit immédiatement aux deux messages. Il reprocha à Little Crow de ne pas vouloir libérer les prisonniers, ajoutant que ce n’était pas ainsi que l’on faisait la paix, sans pour autant indiquer, comme le vieux chef de guerre l’en priait, un moyen de faire cesser les combats. Par contre, il adressa au traître Wabasha une longue lettre contenant des instructions précises sur la façon d’utiliser le drapeau blanc lors
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