Enterre Mon Coeur à Wounded Knee: Une Histoire Américaine, 1860-1890
pouvoir tirer sur ses défenseurs. Une pluie de flèches enflammées mit le feu aux toits des bâtiments. Alors, les Santees se ruèrent vers les écuries. L’un d’eux, Wakonkdaya-manne, fit plus tard le récit suivant : « Au cours de cette bataille, je suis remonté par le côté sud jusqu’aux écuries et j’ai voulu prendre un cheval. Au moment où je le faisais sortir, un obus a éclaté juste à côté de moi. Le cheval a fait un écart et s’est enfui en me renversant. Lorsque je me suis relevé, j’ai vu une mule qui s’enfuyait. J’étais tellement furieux que je lui ai tiré dessus. » Il y eut des combats au corps à corps pendant quelques minutes autour des écuries, mais les Santees durent de nouveau battre en retraite sous le feu d’artillerie des soldats.
Little Crow, blessé, perdait du sang. Il s’éloigna du champ de bataille pour reprendre des forces et fut remplacé par Mankato, qui mena l’attaque suivante. Des rafales d’obus à balles fauchèrent les guerriers qui chargeaient, et l’assaut se solda par un échec.
« S’il n’y avait pas eu le canon, je pense que nous nous serions emparés du fort, raconte Big Eagle. Les soldats se sont défendus si vaillamment que nous pensions qu’ils étaient plus nombreux qu’en réalité. » (Environ cent cinquante soldats et vingt-cinq civils armés défendirent Fort Ridgely le 22 août.) Ce fut au cours de cette bataille que Big Eagle perdit le plus de guerriers.
Plus tard dans l’après-midi, les chefs santees ordonnèrent la fin de l’assaut. Redonnons la parole à Lightning Blanket : « Le soleil était près de se coucher. En voyant les guerriers au sud et à l’ouest se faire repousser par les gros fusils, et Little Crow et ses hommes se diriger vers le nord-ouest, nous avons décidé de les rejoindre et de voir ce que nous pouvions faire (…). Nous pensions retourner dans son village pour y chercher des renforts (…). Mais Little Crow nous a dit qu’il n’y avait plus de guerriers. Alors, des discussions vives ont eu lieu. Certains voulaient repartir à l’assaut du fort le lendemain matin, puis aller à New Ulm, tandis que d’autres préféraient attaquer New Ulm dès le lever du soleil et revenir s’emparer du fort plus tard. Nous avions peur que les soldats n’aillent à New Ulm en premier. »
Les soldats en question, c’étaient les mille quatre cents hommes du sixième régiment du Minnesota venus de St. Paul. À leur tête, se trouvait un chef que les Santees connaissaient assez bien, le colonel Henry H. Sibley. Sibley avait récupéré, en remboursement de sommes indûment versées au Santees, cent quarante-cinq mille dollars sur les quatre cent soixante-quinze mille promis dans le premier traité, cela au bénéfice de sa compagnie de commerce de fourrures. Les Santees étaient convaincus que la compagnie les avait sous-payés. Or, l’agent Alexandre Ramsey avait donné satisfaction à Sibley, ainsi qu’à d’autres négociants, si bien que les Indiens ne percevaient pratiquement rien en échange de leurs terres. (Ramsey, devenu entre-temps gouverneur, avait nommé Sibley à la tête du régiment du Minnesota.)
Le 23 août, en milieu de matinée, les Santees attaquèrent New Ulm. Ils sortirent des bois, se déployèrent en arc dans la prairie inondée de soleil et fondirent sur le village. Mais les citoyens les attendaient. Après l’attaque avortée des jeunes braves le 19 août, ils avaient érigé des barricades, renforcé leur armement et demandé à plusieurs villages situés plus bas dans la vallée l’aide de leur milice. Arrivés à deux kilomètres des premières lignes de défense des Blancs, les guerriers indiens commencèrent à exécuter un mouvement d’éventail, tout en accélérant l’allure et en poussant des cris de guerre de manière à effrayer leurs ennemis. Little Crow, qui ne participait pas au combat pour cause de blessure, avait été remplacé à la tête des guerriers par Mankato, dont le plan était d’envelopper New Ulm.
Il y eut beaucoup d’échanges de coups de feu de part et d’autre. L’avancée des Indiens fut ralentie par les villageois retranchés dans des bâtiments aux fenêtres transformées en meurtrières. En début d’après-midi, les Santees incendièrent plusieurs constructions situées du côté exposé au vent, dans l’espoir de profiter de l’écran de fumée ainsi provoqué pour avancer. Soixante guerriers à pied ou à cheval qui
Weitere Kostenlose Bücher