Enterre Mon Coeur à Wounded Knee: Une Histoire Américaine, 1860-1890
Bear. Voyant que leurs éclaireurs rentraient bredouilles, les deux commandants décidèrent de réduire de moitié les rations de leurs hommes et de repartir vers le sud avant que le manque de nourriture n’entraîne des catastrophes.
Pendant que les soldats campaient quelques jours près de la Powder, à un endroit où la rivière s’incurvait en direction du nord pour se jeter dans la Yellowstone River, des bandes de Sioux Hunkpapas et Miniconjous suivaient leur piste. Le 1 er septembre, ils étaient déjà près de quatre cents guerriers. Parmi eux, se trouvait ce même chef hunkpapa qui, deux ans auparavant à Crow Creek, lieu d’exil des Santees, avait juré de se battre pour protéger les terres à bisons contre la convoitise des hommes blancs – Sitting Bull.
Lorsque les Sioux découvrirent que les soldats avaient installé leur campement dans un bois longeant la Powder, plusieurs des jeunes guerriers proposèrent d’aller à leur rencontre avec un drapeau blanc pour voir s’ils pouvaient les persuader de leur donner du tabac et du sucre en signe de paix. Sitting Bull, qui se méfiait des Blancs, refusa que les Indiens mendient de la sorte. Il laissa malgré tout les autres décider. Des émissaires furent ainsi envoyés vers le campement.
Les soldats attendirent qu’ils soient à portée de leurs fusils, puis leur tirèrent dessus, en tuant et en blessant plusieurs avant qu’ils puissent s’échapper. Les Indiens survivants rejoignirent le groupe principal en emportant quelques-uns des chevaux des soldats.
Sitting Bull ne fut pas surpris de la façon dont les Blancs avaient traité leurs pacifiques visiteurs indiens. À la vue de ces deux mille soldats et de leurs montures émaciées, il jugea que quatre cents Sioux chevauchant des mustangs au pied léger n’auraient pas trop de mal à en venir à bout. Black Moon, Swift Bear, Red Leaf, Stands-Looking-Back et la plupart des autres guerriers tombèrent d’accord avec lui. Stands-Looking-Back, qui possédait un sabre pris à l’un des hommes du général Sully dans le Dakota, mourait d’ailleurs d’envie de l’essayer contre les soldats.
Sur des pictogrammes dessinés plus tard pour son autobiographie, Sitting Bull se représente vêtu ce jour-là de jambières décorées de perles, avec une toque de fourrure munie de couvre-oreilles. Il est armé d’un fusil à un coup à chargement par le canon, d’un arc et d’un carquois, et porte son bouclier décoré du motif de l’Oiseau-Tonnerre.
Formant une file, les Indiens et leurs mustangs s’approchèrent du camp, encerclèrent les soldats qui gardaient les chevaux et les capturèrent les uns après les autres. À ce moment-là, une compagnie de cavaliers donna la charge depuis la berge de la Powder. Les Sioux battirent en retraite en prenant soin de rester hors de portée. Ils choisirent le moment où les montures faméliques des Tuniques Bleues commençaient à chanceler pour faire volte-face et poursuivre les soldats. Sabre au clair, Stands-Looking-Back, qui chevauchait en tête, fonça jusqu’à ce qu’il eût renversé un soldat de sa monture. Puis, faisant tourner brusquement son mustang, il s’éloigna au galop pour se mettre à l’abri tout en hurlant de joie, ravi de son exploit.
Quelques minutes plus tard, les soldats reformèrent les rangs et, au son du clairon, repartirent à l’assaut des Sioux. Une fois de plus, les Indiens parvinrent grâce à la rapidité de leurs mustangs à rester hors de portée et à s’éparpiller. Finalement, les soldats, frustrés, s’arrêtèrent. Cette fois-ci, les Sioux frappèrent de tous côtés, traversant les rangs de leurs ennemis et faisant tomber ceux-ci à terre. Sitting Bull captura un étalon noir, scène qu’il représentera plus tard sous forme de pictogramme.
Alarmés par cette attaque des Indiens, Cole et Walker entraînèrent leurs colonnes dans une marche forcée vers le sud, en direction de la Powder. Les Sioux suivirent les soldats quelques jours, semant la panique dans les rangs en apparaissant brusquement sur une crête ou en lançant des petits raids contre l’arrière-garde. Sitting Bull et les autres chefs s’amusèrent de la peur manifestée par les Blancs, et de les voir se retourner tout le temps et filer à toute hâte pour leur échapper.
Lorsque la tempête de neige se déclencha, les Indiens se tinrent deux jours à l’abri. Puis, un matin, ils entendirent des coups de feu irréguliers provenant de la
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