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Et Dieu donnera la victoire

Et Dieu donnera la victoire

Titel: Et Dieu donnera la victoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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plus important que tout ce que tu pourrais inventer pour me faire fuir. C’est le Seigneur qui m’a inspiré cette visite. Je dois savoir si tu appartiens à Dieu ou au diable.
    Elle lui éclata de rire au nez et le laissa faire ses simagrées. Il avait sorti de sa ceinture un flacon d’eau bénite dont il aspergea l’espace autour de la Pucelle, brandissant de l’autre main son gros crucifix de bois brut et faisant des signes de croix. Elle l’entendit marmonner une sorte de litanie :
    – Énoch... Élie... Jérémie...
    Soudain, stupéfaite, elle le vit se planter devant elle en s’écriant :
    – Que Dan devienne semblable à la couleuvre du chemin et au serpent du sentier !
    – Qu’est-ce que ce charabia ! s’exclama-t-elle. Et pourquoi vous tenez-vous si près de moi ? Rassurez-vous, je ne vais pas m’envoler !
    Il la dévisagea d’un air suspicieux en reculant de quelques pas.
    – Tu vas m’avouer où tu caches ta mandragore !
    – J’ignore ce qu’est la mandragore et vous prie de me dire ce que vous attendez de moi !
    Il parut ébranlé, bredouilla :
    – J’ai souvent entendu parler de tes miracles. De quel droit prétends-tu agir de par le ciel ? Qui te guide ? Si tu sors de la tribu de Dan, si tu es venue sur cette terre pour y apporter la désolation et l’abomination, tu me trouveras en travers de ton chemin.
    En la menaçant de son crucifix, il s’attendait à voir cette possédée se rouler sur le sol en vomissant des grossièretés et des crapauds. Elle éclata de rire. Dépité, il se laissa tomber sur un escabeau en soupirant :
    – Après tout, il se peut que je me sois trompé sur ton compte. Peut-être es-tu bien la Fille Dieu que tu prétends être...
    – Je ne suis ni une sorcière, ni une possédée, ni l’Antéchrist. Cessez toutes ces grimaces !
    En longeant les allées du jardin attenant au castelet où elle avait trouvé refuge, il lui raconta qu’il courait le monde depuis des années. Il s’était rendu en Syrie et en Palestine, avait vécu à son retour à Paris d’où il était revenu pour se fixer à Troyes. Il gardait de Paris le souvenir d’une Babylone où tous les vices de l’humanité s’étaient donné rendez-vous. Il avait semé le bon grain de la parole divine dans tous les quartiers de la capitale et n’avait recueilli qu’une piètre récolte. Cet excès de zèle avait attiré l’attention et suscité la méfiance du Parlement et de l’Église dont beaucoup de membres tenaient de la corruption, des maisons de jeux et de plaisir, l’essentiel de leurs ressources.
    Le frère Richard avait invité les Parisiens à apporter et à jeter en tas les objets relevant de la vanité : toilettes, meubles, bibelots, et de joindre à cet autodafé les mandragores dont les sorcières faisaient commerce. C’était provoquer la colère et la vindicte des bourgeois très attachés aux superfluités, de même que des clercs dont certains tenaient boutique de plaisir jusque dans les lieux saints. Toutes ces richesses entassées, il ordonna qu’on y mît le feu.
    – Ah, Jeanne, dit-il, quelle sensation d’ivresse lorsque j’ai respiré la fumée montant de ces monceaux de vanité ! Avec quelle joie j’ai senti sur ma peau la chaleur de ces foyers ! Eût-on fait griller mille sorcières que je n’aurais pas éprouvé une telle délectation...
    Il avait abandonné le théâtre de ses exploits au moment où la Babylone française, à la suite de sa campagne de prêches, commençait à vaciller sur ses bases. Le bruit ayant couru qu’il était du parti de Charles, les autorités avaient décidé d’interdire la dernière assemblée qu’il avait prévue sur la colline de Montmartre. Ce jour-là, plus de dix mille fidèles avaient été dispersés par le guet.
    Le frère Richard ne parut pas : il avait repris son bâton de pèlerin et, bien décidé à poursuivre sa mission, s’était engagé sur la route de Champagne.
    – J’ignore, dit-il, qui a pu me dénoncer et me faire chasser de Paris. En vérité, l’on craignait que mes prédications n’attirent sur ces créatures corrompues les foudres divines.
    – Qu’attendez-vous de moi ? répéta Jeanne.
    – Je voulais savoir si tu n’étais pas vouée au diable et si tu ne devais pas ton pouvoir à la mandragore ou à quelque talisman comme celui que tu portes au cou. Cette écorce...
    Elle lui montra l’image de saint Michel et lui raconta son origine. Il posa une main sur son épaule comme pour

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