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Et Dieu donnera la victoire

Et Dieu donnera la victoire

Titel: Et Dieu donnera la victoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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bourguignon ; la population se faisait l’écho de ces divergences. Le désordre avait pris une telle ampleur qu’on craignait une guerre interne. Ouvrir les portes de la cité ou la défendre ? À la première sommation, le Conseil de ville envoya une délégation au dauphin.
    – Nous ne souhaitons pas, lui dirent-ils, vous tenir tête. Si Troyes, Châlons et Reims décident de vous rendre hommage, nous ne ferons rien contre vous. Nous sommes même disposés à vous fournir des vivres et à payer votre départ deux mille écus.
    – Deux mille écus ! dit La Trémoille. Voilà qui demande réflexion, monseigneur. Je me charge de la négociation.
    Il s’en chargea si bien que les écus disparurent dans sa bourse.
    L’armée reprit sa route dans la chaleur et la poussière.
    Brinon, Saint-Florentin, Saint-Phal ouvrirent leurs portes dès que flottèrent sur l’horizon les insignes de l’avant-garde et la bannière de la Pucelle qui avait rejoint l’avant-garde en compagnie de Gilles et de d’Alençon.
    On avait quitté Gien depuis une semaine quand on arriva, sous un bel orage d’été, en vue des murailles de Troyes.
    La Hire connaissait bien cette ville où il avait traîné ses grègues en compagnie de ribauds et de filles de joie. Il dit à Jeanne et à d’Alençon :
    – Ces bourgeois, pour la plupart drapiers et marchands de vin, dorment sur des matelas d’écus. Si nous réussissons à forcer leurs portes, nous sommes riches jusqu’à la fin de nos jours. L’ennui, c’est que ces gens ne sont pas partagés comme les Auxerrois : ils sont tous anglais et bourguignons, ce qui est blanc bonnet et bonnet blanc. Nous allons avoir du fil à retordre.
    – Pas sûr ! dit d’Alençon. Nos récentes victoires ont dû leur faire passer des nuits blanches. Ils ont apporté une balance sur la place publique et ils pèsent le pour et le contre. L’exemple d’Auxerre a dû leur mettre la puce à l’oreille.
    Auxerre avait été un demi-succès ou un demi-échec. On risquait de se trouver dans la même incertitude devant Troyes, ville plus fortement remparée que la précédente et dotée d’une garnison plus nombreuse. Les habitants semblaient préoccupés de gagner du temps.
    – Je sens, dit Jeanne, que nous allons encore nous faire berner. Je vais écrire aux échevins, leur demander de se soumettre.
    Ses exhortations n’y firent rien. Elle adressa une lettre à ces « loyaux Français », leur laissant entendre que leur personne et leurs biens étaient en jeu et demandant une réponse rapide... qui ne vint pas. Le lendemain, elle se présenta hardiment sous la tente où le dauphin tenait conseil. Il se dressa hors de son fauteuil en s’écriant :
    – Vous n’avez que faire dans cette assemblée. Retirez-vous !
    Elle répliqua sans se démonter, les bras croisés sur sa cuirasse :
    – Je ne partirai pas, monseigneur, avant d’avoir dit ce que j’ai sur le coeur ! Noble dauphin, cessez de tenir conseil sur conseil. Ordonnez à votre armée d’attaquer. De par le ciel, je vous le dis : si vous prenez le parti d’agir sans plus tarder, cette ville sera vôtre avant trois jours !
    Elle se crispa de colère en entendant La Trémoille murmurer :
    – Encore un de vos miracles, je suppose ! Cessez donc de vous mêler d’affaires auxquelles vous n’entendez rien !
    – Ces affaires dont vous parlez, monsieur le chambellan, intéressent Dieu. C’est Lui qui parle par ma voix.
     
    Jeanne s’était retirée dans le village de Saint-Phal, à quelques lieues au sud de la cité, avec la troupe commandée par Gilles.
    Elle se morfondait dans l’attente d’une décision du Conseil delphinal quand on lui annonça la visite d’un cordelier venu de Troyes : le frère Richard. Ce curieux personnage allait de par le monde proclamant que l’Apocalypse était proche et que l’Antéchrist monté sur un cheval de feu allait descendre des nuées pour annoncer le grand cataclysme.
    Elle regarda d’un oeil amusé s’avancer vers elle ce bonhomme chafouin, agité, méfiant, qui promenait son nez fureteur dans tous les coins de la pièce habitée par la Pucelle, comme pour y déceler des relents de soufre.
    Jeanne, excédée de ce manège, lui lança :
    – Allez-vous me dire enfin ce que vous voulez ou ce que vous cherchez ? J’ai à faire des choses importantes et, si vous en avez fini avec votre inspection, je vous prie de vous retirer.
    – Ce qui m’amène près de toi, ma fille, répondit le moine, est

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