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Et Dieu donnera la victoire

Et Dieu donnera la victoire

Titel: Et Dieu donnera la victoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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accomplir : chasser de leurs bastilles ce qui restait d’Anglais. La chaîne de fortifications bloquant les voies vers l’occident était encore redoutable : il faudrait les enlever une à une. Cela risquait de prendre du temps et l’armée de Falstaff ne devait plus être très loin.
    Elle voulait que l’on retrouvât le cadavre de Glasdale. Des mariniers qui draguaient le fleuve à la perche et au harpon le lui amenèrent sur une charrette. Comme la nuit tombait, elle fit allumer des torches et conduisit elle-même le corps devant la bastille de Londres où se tenait John Talbot. Quelques jours plus tard, le corps était transporté à Paris, découpé comme carcasse de boeuf, bouilli, désossé, pour être ramené à Londres cousu dans une peau de cerf.
     
    Lorsque le régent apprit que l’un de ses meilleurs capitaines venait de disparaître, il se trouvait à Vincennes, dans la chambre où son frère, le roi Henri V, était décédé sept ans auparavant. Il avait du mal à croire à cette fable qu’on lui racontait : une pucelle prenant les armes et marchant sous la bannière du Christ pour le chasser de France, lui, un Plantagenêt, qui avait du sang français dans les veines !
    Il écoutait d’un air sombre les émissaires de Talbot relater cette invraisemblable histoire depuis le jour où cette bergère avait quitté Chinon avec une armée. Pour la première fois depuis qu’il se trouvait en France, il était confronté non plus à des soldats mais à une force mystérieuse qui semblait déjouer toutes les manoeuvres des hommes et défier leur puissance pour leur substituer un pouvoir susceptible d’engendrer des prodiges.
    Il avait été sur le point de réclamer à ses provinces, et notamment à la Picardie, de nouveaux secours, mais cette tentative n’eût donné que des résultats décevants : saignées à blanc depuis des décennies, ces contrées ne répondaient plus à ses appels et les sergents recruteurs revenaient avec des registres vierges. Les désertions s’accéléraient parmi ses troupes, la nostalgie rongeant ses yeomen comme la simple piétaille. Les malédictions de la sorcière Jeanne faisaient le reste.
     
    Messes solennelles, Te Deum , actions de grâces, processions... Tout Orléans semblait entonner le cantique de Siméon : Nunc dimittis servum tuum, Domine (à présent tu peux renvoyer ton serviteur, Seigneur). Renvoyer quel serviteur ? Jeanne ? Jamais ! Orléans avait deux saints évêques comme patrons ; elle avait désormais sa sainte, et bien vivante de surcroît : la Pucelle.
    On la couvrait de présents, qu’elle redistribuait aux pauvres, on lui offrait les clés d’une maison pour l’inviter à y finir ses jours, on se proposait d’édifier une chapelle à sa dévotion, de lui élever des statues dans la cathédrale et sur les places. Que voulait-elle ? Qu’elle parle ! On n’avait rien à lui refuser.
    Ce qu’elle voulait, Jeanne, c’est qu’on en finisse, qu’on batte le fer tant qu’il était chaud, comme disait le Bâtard. Tout n’était pas joué : Talbot pouvait mener une contre-attaque depuis sa puissante bastille des Orgerils et Falstaff jeter des milliers d’hommes contre les murailles. Pour l’heure, les bastilles restaient muettes, sans apparence de vie, mais à la manière de ces volcans qui peuvent se réveiller brusquement et cracher leur lave.
    Dans la nuit du samedi au dimanche, Jeanne dormit peu malgré sa fatigue et les élancements de sa blessure. Charlotte n’arrêtait pas de jacasser au point que sa compagne de lit dut aller chercher le repos dans un débarras.
    Au petit matin, des pas très militaires retentirent dans l’escalier menant aux chambres. Le capitaine Coarraze arrivait de la tour de l’Échiffre-Saint-Paul. Devant la porte de Jeanne, il s’exclama, avec un fort accent béarnais :
    – Les Anglais sont sortis de leurs bastilles, Jeanne ! On dirait qu’ils vont passer à l’offensive. Pressez-vous de nous rejoindre !
    C’est d’Alençon qui l’envoyait. Alors que le jour venait tout juste de naître, le duc Jean avait eu son attention attirée par des mouvements inhabituels entre les bastilles de Londres et de Rouen, ainsi que par des lumières insolites aux ouvertures.
    Jeanne se fit armer, les tempes bourdonnantes de fièvre. Elle fit appeler le frère Pasquerel, lui demanda de prévoir une messe à célébrer dans l’heure. Dans la cathédrale ? Non, sur le pré, devant les remparts de l’ouest.
    – Nous

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