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Eugénie et l'enfant retrouvé

Eugénie et l'enfant retrouvé

Titel: Eugénie et l'enfant retrouvé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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de la conversation en donna la preuve.
    — Eugénie, dit-elle... La voir comme cela tous les jours... Elle dépérit sans cesse.
    Fernand hocha la tête. Sa femme se promenait dans la maison comme une ombre blanche, sa robe flottant sur son corps amaigri. Pour avancer, elle posait une main sur les meubles, sur les murs.
    — La maladie a envahi sa poitrine, continua la vieille dame.
    — Cela paraît évident, avec sa respiration laborieuse.
    Mais elle ne m’a jamais fait part de son état de santé.
    — Mais la jeune Picard n’est-elle pas venue te mettre au courant de la situation, l’automne dernier ?
    — Ce printemps, ce fut le silence complet.

    Ils ne trouvèrent rien de plus à se dire. Tous les deux se réfugièrent dans le silence, heureux tout de même de pouvoir profiter d’une présence, même muette.

    Chapitre 25

    Le lendemain matin, un peu avant neuf heures, Jacques Létourneau agita le heurtoir de bronze contre le bois de la porte.
    — Vous savez être ponctuel, je vous en félicite, complimenta Fernand en lui ouvrant.
    D’un coup d’œil de haut en bas, il apprécia l’allure de son stagiaire. Il portait le même complet que lors de sa dernière visite. Ce serait sa tenue quotidienne pendant les prochaines semaines. Il ressemblait à un commis de banque, mais sa prestance laissait croire que la vie lui réservait un meilleur sort.
    — ... J’ai déjà une certaine expérience du travail.
    — Chez PICARD, je sais. Vous me l’avez dit déjà. Entrez.
    — Alors, je commençais avant l’heure, et je terminais après.
    — Ah ! Un employé zélé.
    La pointe de dérision heurta un peu le jeune homme. Il se raidit pour dire :
    — Le salaire plus généreux alimentait mes efforts.
    Le notaire lui retourna son regard hautain.
    — Nous verrons très vite la valeur de votre travail dans une étude de notaire. Peut-être découvrirez-vous que vous êtes taillé pour le déplacement de meubles.
    Jacques serra les dents, tenté d’envoyer à tous les diables ce gros professionnel. Il avait bien du mal à incarner l’humilité. Son employeur le conduisit dans la petite pièce servant parfois de salle d’attente. Il n’y restait plus qu’une table et une chaise. D’un côté de la machine à écrire, il aperçut plusieurs feuillets couverts d’une grande écriture ronde, de l’autre, une rame de papier blanc.
    — Alors voilà. Ces pages doivent ressembler à ceci grâce à votre intervention.
    Il lui tendait un document de format légal, un contrat de vente.
    — Pas une faute, pas une rature, une mise en pages identique: les jeunes filles de l’Académie commerciale y arrivent. Nous verrons avec vous.
    De nouveau, le jeune homme se cambra sous le camouflet, mais sans un mot, il prit sa place, inséra une feuille sous le rouleau de la machine.
    — Nous dînons à midi, conclut Fernand en lui tournant le dos. Vous trouverez sans mal la salle à manger.
    Le bruit de la machine à écrire ressemblait à une averse de grêle sur une tôle en fer-blanc, tout en offrant moins de régularité. Le stagiaire ne maîtrisait pas tout à fait son outil de travail. Fernand aurait pu fermer sa porte pour travailler dans le calme, mais il préférait surveiller de l’oreille son nouvel employé.
    Un peu avant midi, un bruit léger le força à lever la tête d’un document. Eugénie se tenait devant lui, appuyée d’une main au cadre de la porte.
    — Je peux te déranger un instant?
    — Bien sûr, je vais t’aider à venir t’asseoir.
    — Non, laisse, je vais y arriver.
    Au lieu de se diriger vers les fauteuils placés dans un coin de la pièce, elle vint occuper la chaise en face de son bureau.
    De nouveau, il constata la frêle silhouette flottant dans la robe, la pâleur du teint.

    — Voudrais-tu demander à garde Murphy de revenir ?
    demanda-t-elle dans un souffle. Je n’y arrive plus toute seule, et malgré sa bonne volonté, Gloria n’a pas de compétences particulières.
    — ... Je vais m’en occuper tout de suite.
    L’esquisse d’un sourire de satisfaction passa sur les lèvres de la femme. Après un silence inconfortable, le mari demanda :
    — La maladie est revenue ?
    — Comme tu as pu le voir au fil des semaines. En réalité, elle ne m’a jamais quittée. Tu te souviens de ma comparaison ? Ce cancer, c’est comme une bête qui me ronge à l’intérieur du corps. Visiblement, elle se régale de mes poumons.
    Eugénie arrivait à conserver sa contenance en évoquant

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