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Eugénie et l'enfant retrouvé

Eugénie et l'enfant retrouvé

Titel: Eugénie et l'enfant retrouvé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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état.
    Elle ne jugea pas pertinent de lui préciser que certains accouchements se révélaient fort sanglants.
    — Dans ce cas, vous me permettrez au moins de vous inviter à dîner.
    Cette fois, Thalie se troubla tout à fait. Elle eut envie de dire que ces choses ne se faisaient pas entre une praticienne et son patient. Son hésitation fat assez longue pour que son interlocuteur enchaîne, une note de déception dans la voix:
    — Vous n’allez pas dîner avec des travailleurs manuels.
    — N’allez pas croire que cela me fasse hésiter. Non, c’est autre chose.
    — Vous savez, je sais me tenir.
    — Depuis que vous êtes là, vous m’en avez donné la preuve.
    Elle hésita encore un moment avant de trancher :
    — J’accepte.
    Voilà, c’était dit. Elle ne pouvait se plaindre de sa solitude et se fermer en même temps à toutes les propositions.
    — Que dites-vous de dimanche midi prochain ? proposa-t-il.
    S’il fait beau, nous pourrions en profiter pour nous asseoir dehors. Dans mon état, je ne vous proposerai pas une longue marche.
    — Très bien. Où voulez-vous que nous nous rejoignions ?
    — Je peux passer vous prendre.
    — Dans ce cas, disons à onze heures trente, au Château Saint-Louis.
    Il lui adressa un sourire amusé et hocha la tête. Puis, il se leva avec difficulté en s’aidant du bord de la table et de sa canne.
    — Je ne vous empêcherai pas plus longtemps de travailler.
    — Vous semblez avoir mal. Voulez-vous que je jette un coup d’œil ?
    — En acceptant de dîner avec moi, vous me perdez comme client. Pas question de baisser mon pantalon devant vous, dorénavant.
    Elle lui fut reconnaissante de n’ajouter aucune blague de mauvais goût. Près de la porte, elle lui tendit la main.
    — Alors, portez-vous bien et à bientôt.
    — Madame, je ferai mon possible pour éviter toutes les chutes d’ici dimanche.
    Thalie apprécia la main ferme, un peu rugueuse comme il convenait pour un travailleur manuel. Elise laissa à l’homme le temps de sortir du cabinet avant de venir dans le bureau, curieuse.
    — Que te voulait-il ?
    — Me remercier, et me rembourser mes vêtements. Il m’a même apporté une ceinture pour remplacer celle utilisée pour faire un garrot.
    — Ce furent des remerciements un peu longs.
    — Il m’a aussi invitée à dîner...
    La brunette la regarda, intriguée. Impatiente, elle demanda :
    — Et puis ?
    — J’ai accepté.
    Son interlocutrice eut
    un ricanement, puis elle
    murmura :
    — Tu me raconteras. En attendant, je t’envoie la première de toute une série de femmes enceintes.
    En regagnant son bureau, l’omnipraticienne se demandait encore ce qui lui avait pris de répondre oui à une invitation pareille.

    Chapitre 9

    Un peu après six heures, de petits coups à la porte de l’appartement attirèrent l’attention de Thalie. En ouvrant, elle vit d’abord la grande boîte en carton dans les mains de Paul Dubuc, ensuite l’homme lui-même, et enfin Marie près de lui.
    — Cela semble lourd, remarqua-t-elle en allongeant les mains pour porter une partie du poids.
    — Pas tant que ça, mais la transporter depuis l’arrêt de tramway, c’est courir le risque de nous retrouver avec de la porcelaine cassée.
    — Paul ! intervint sa femme. Ça doit être une surprise.
    La jeune femme s’effaça pour les laisser passer, puis les conduisit tout de suite dans la cuisine. En embrassant sa mère, elle remarqua :
    — Voyons, tu m’avais dit de ne pas acheter de vaisselle pendant mon magasinage. Paul ne vient pas de trahir un secret du cabinet ministériel.
    Quand l’homme eut enfin posé son fardeau sur la table en poussant un soupir de soulagement, Marie insista :
    — Tu peux l’ouvrir tout de suite !
    Thalie découvrit un bel ensemble de vaisselle Wedgwood en porcelaine blanche. Après de nouvelles bises et des remerciements, elle rangea le tout sur les étagères avec l’aide de ses visiteurs.

    — Maintenant, nous allons visiter les lieux, proposa-t-elle.
    Cela ne va pas prendre trop de temps. Vous allez voir, c’est tout petit.
    Le couple formula tous les compliments d’usage sur l’élégance du logement, se réjouit à haute voix de la respectabilité de l’adresse et des voisins triés sur le volet. Le député put même citer les noms de quelques politiciens logeant dans l’édifice.
    — Vous allez accepter un verre de vin avant de descendre ?
    demanda l’hôtesse.
    Les parents occupèrent les fauteuils et Thalie mit

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