Fausta Vaincue
faisait grand froid. Mais Maurevert essuyait la sueur qui coulait de son front. Quelquefois, il haussait les épaules et murmurait :
– Je suis fou… Si c’était de lui que parlait la lettre du prieur, je l’aurais déjà vu… j’ai battu Blois de fond en comble…
En même temps, Maurevert distingua une ombre qui lui barrait le passage de l’étroite rue. Maurevert avait bondi ; mais en reconnaissant que cette voix, toute menaçante qu’elle fût, n’était pas celle qu’il attendait, il se rassura aussitôt et répondit :
– Pourquoi ne passerais-je pas ? Est-ce que Léa l’aurait défendu ?
– Non, monsieur, si vous me dites chez qui vous allez.
– Je vais chez Myrthis, dit Maurevert.
– C’est bien. Passez, fit la sentinelle inconnue.
Une fois encore, Maurevert fut arrêté dans la rue et donna un deuxième mot de passe. Enfin, à la porte de l’hôtel où avait lieu la réunion que nous avons citée, il échangea une troisième parole de reconnaissance.
Lorsque Maurevert fut à l’intérieur de l’hôtel, nul ne s’occupa de lui : du moment qu’il était parvenu jusque-là, il devait connaître parfaitement la maison. D’ailleurs, à peine le vestibule du rez-de-chaussée franchi, Maurevert ne trouva personne pour le guider. Mais il paraît qu’il n’avait nullement besoin d’être guidé, car il monta hardiment le large escalier monumental qui s’ouvrait presque sur le vestibule.
Cet hôtel paraissait désert. Il y régnait un profond silence. Et si le vestibule était à peine éclairé par un falot accroché au mur, le reste de l’hôtel ne l’était pas du tout.
Maurevert monta jusqu’au premier étage. Partout même silence et mêmes ténèbres.
Au deuxième étage qu’il gagna, aucun changement : la solitude absolue, et même un air de moisi, comme si l’hôtel eût été inhabité depuis de longues années.
Maurevert monta plus haut. C’est-à-dire qu’il gagna les combles. Là, du fond d’un couloir, sortait une sorte de rumeur confuse comme celle de plusieurs personnes qui parlent. Ce fut vers ce fond de couloir que se dirigea Maurevert.
Mais au lieu de pousser la porte derrière laquelle s’élevait cette confuse rumeur, il tourna brusquement à droite, dans un embranchement de couloir. Ce couloir contournait une salle immense qui était le grenier de cet hôtel. C’est dans ce grenier qu’avait lieu la réunion.
Maurevert, avons-nous dit, contourna, par un étroit couloir, et aboutit dans une petite pièce, étroite, sombre, qui ne devait guère être habitée que par les souris ou les araignées. Il n’y avait pas de porte à ce réduit. C’est-à-dire qu’on y entrait directement au bout du couloir en question.
Maurevert alla jusqu’au fond de la pièce. Là, dans le mur, à peu près à hauteur d’homme, il dérangea une brique. Et alors un rayon de lumière tamisée passa par ce trou. Ce trou était masqué dans l’autre salle par un treillis qui se confondait avec les tapisseries.
De là, Maurevert pouvait voir et entendre tout ce qui se disait et se passait dans le grand grenier. Il se mit donc à écouter et à regarder, puisqu’il n’était venu que pour cela.
Nous avons dit que la réunion était peu nombreuse, mais qu’en revanche, elle était fort brillante par la qualité des gens qui s’y trouvaient. C’étaient d’abord la duchesse de Nemours, accourue à Blois depuis peu. Les trois frères : le duc de Guise, le duc de Mayenne et le cardinal. Puis le duc de Bourbon. Plus la duchesse de Montpensier.
C’était, en somme, un conseil de famille. Il paraît que Maurevert arrivait trop tard et que la conférence était finie, car au moment même où il dérangeait la brique, la duchesse de Nemours, le cardinal de Bourbon, le duc de Mayenne et le cardinal de Guise se retiraient. Il ne resta que le duc de Guise et Marie de Montpensier. Celle-ci, alors, se dirigea vers une porte qu’elle ouvrit, et dit :
– Vous pouvez entrer, messieurs…
Un certain nombre de gentilshommes, parmi lesquels se trouvaient Maineville, Bussi-Leclerc, Bois-Dauphin, Espinac et d’autres pénétrèrent aussitôt dans le grenier.
– Nous sommes au complet ? dit le duc.
– Il manque Maurevert, fit Maineville.
– Maurevert, s’écria la duchesse de Montpensier, je ne l’ai pas convoqué et ne lui ai pas fait parvenir les mots de passe. Il a depuis longtemps de singulières attitudes. Un homme à surveiller,
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