Fausta Vaincue
blessés, se mirent à hurler et les derniers, après un moment de stupeur épouvantée, reculèrent en désordre jusque dans la cour.
– Suivez-moi ! dit Pardaillan d’un ton bref.
Il s’élança, la rapière au poing et Fausta derrière lui. En quelques secondes, ils furent dans la cour.
– Aux chevaux ! cria Pardaillan à Fausta.
En même temps, il fonçait sur les dix ou douze gardes rassemblés dans la cour.
– Tue ! tue ! vociféra Larchant en essayant de se relever.
Fausta bondit jusqu’à l’écurie, en sortit deux chevaux et sauta sur l’un d’eux.
– A sac ! à mort ! hurlaient les gardes en tâchant d’entourer Pardaillan.
Celui-ci reculait jusqu’au cheval. Sa rapière voltigeait, cinglait, piquait… Tout à coup, il sauta en selle, et piquant des deux, bondit au milieu des gardes.
– La porte ! fermez la porte ! hurla le capitaine Larchant.
Mais déjà Pardaillan l’avait franchie, en assénant un dernier coup de pommeau à un garde qui saisissait la bride de son cheval. Il s’élança à fond de train, suivi de Fausta. A ce moment, une troupe de quarante hommes d’armes commandés par Crillon en personne et montés sur de solides chevaux apparaissait à un bout de la rue, tandis que Pardaillan et Fausta disparaissaient à l’autre bout.
Crillon, prévenu de la résistance désespérée qui était opposée aux gens du roi dans l’hôtel de Fausta, était accouru. Dans la cour, il vit le désordre des gardes effarés. Dans le vestibule de l’escalier, il vit les morts, les blessés ; sur les marches, il vit les débris de marbre et de bronze.
– Un damné, gronda Larchant. Un démon ! Un fou furieux ! Je crois bien, monsieur de Crillon, que c’est votre protégé !…
– Pardaillan !…
– C’est cela même ! Ah ! l’infernal truand !… Courez !…
– En voyant ce massacre, dit Crillon, son nom m’est venu au bout de la langue. Voilà un tableau qui ne pouvait être que signé Pardaillan.
– Courez ! Mais courez donc ! fit Larchant furieux, oubliant qu’il parlait à son chef.
– Bah ! fit Crillon, il est loin !…
– Monsieur, dit une voix près de lui.
Crillon se retourna et dit :
– Que vous plaît-il, Monsieur de Maineville ?…
– Monsieur de Crillon, fit Maineville, nous sommes vos prisonniers, n’est-ce pas ?
– Oui. Après ?…
– Vous nous conduisez à Loches ?
– Oui. Après ?…
– Eh bien, monsieur !, voici M. de Bussi-Leclerc et moi, Maineville, qui avons déjà un vieux compte à régler avec le Pardaillan. Maintenant que notre seigneur le duc de Guise est mort, ce compte devient terrible…
– Après ? fit Crillon.
– Laissez-moi courir après le Pardaillan. Nous vous engageons notre parole d’honneur de revenir nous rendre prisonniers et nous vous rapporterons la tête du truand…
– Crillon ! Crillon ! vociféra Larchant, laissez courir ces gentilshommes. Je me porte caution ! Et s’ils ramènent le misérable, je m’engage à obtenir leur liberté du roi.
– Allez, messieurs ! dit Crillon d’un ton goguenard, et tâchez de vaincre !
Maineville et Bussi-Leclerc s’élancèrent. Alors, Crillon se baissa vers Larchant.
– Il t’a donc mis à mal ? fit-il en riant.
– Une jambe cassée, dit Larchant furieux. Mais en rase campagne, il ne pourra tenir contre ces deux gentilshommes.
– Bon ! maintenant qu’ils sont partis, grâce à tes instances, veux-tu que je te dise ce que j’en pense ?
– Dites…
– Eh bien, mon vieux compère, ils ne reviendront pas.
– Allons donc ! Ils ont donné leur parole d’honneur.
– Oh ! je ne doute pas de leur parole ; mais s’ils ont le malheur de rejoindre Pardaillan, ils n’auront plus jamais occasion de la tenir… ou, du moins, s’ils reviennent, ils seront fort éclopés, et ne ramèneront qu’eux-mêmes.
– Ah çà ! c’est donc un terrible, ce Pardaillan ?
– Tu en sais quelque chose, mon camarade ! Et maintenant, veux-tu que je te dise mieux encore ?
– Parlez…
– Eh bien, si le hasard voulait qu’ils ramènent Pardaillan prisonnier, que comptes-tu en faire ?
– Pardieu ! le faire pendre haut et court aux créneaux du donjon !
– Diable ! Tu veux faire pendre un connétable ?
– Cà ! devenez-vous fou… ou bien ai-je le délire ?… Pardaillan connétable ?…
– Oui. Toi, tu veux le pendre. Et le roi le fait chercher pour le créer
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