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Fausta Vaincue

Titel: Fausta Vaincue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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grand jardin qui, pour le moment, offrait aux regards ses massifs couverts de givre, fleurs de glace, dentelles blanches, parure de l’hiver, qui permet à la nature de dire à l’homme : « Regarde donc comme je suis coquette et jolie en toute saison… » C’était une maison de briques rouges à encadrement de pierre blanche, avec des balcons de fer forgé, aux courbes gracieuses, telles qu’on en voit aux constructions du temps de la Renaissance.
    Pardaillan mit pied à terre dans la cour ; sur un signe que fit un suisse majestueux, deux laquais s’élancèrent pour s’emparer de son cheval et le conduire aux écuries. Alors, seulement, le suisse de cet hospitalier logis s’enquit du nom du visiteur.
    Le chevalier, sans répondre, regardait autour de lui, lorsque d’une porte surgit un être immense, porteur d’une superbe livrée toute galonnée, bouffi de graisse, avec des bras gros comme des cuisses, et des cuisses grosses comme des fûts de colonne. Cet être, en apercevant Pardaillan, ôta son chapeau, s’approcha en donnant tous les signes d’une respectueuse jubilation, et d’une voix de basse-taille s’écria :
    – Dieu me pardonne !… Mais c’est monsieur le chevalier lui-même !…
    Pardaillan considéra le phénomène sans le reconnaître. L’homme souriait d’un large sourire qui donnait à son visage l’aspect d’une citrouille entrouverte d’un coup de sabre.
    – Est-il possible que monsieur le chevalier ne me reconnaisse pas ? continua le phénomène. Surtout, nous avons fait la guerre ensemble. En avons-nous donné de ces coups d’estoc et de taille ! A la chapelle Saint-Roch, à l’abbaye de Montmartre, à l’auberge de la
Devinière
,
en avons-nous taillé en pièces et mis en déroute ! Tous les soirs, à l’office, je passe deux heures à raconter mes hauts faits et les vôtres, monsieur. Et je n’ai pas fini, n’est-ce pas, monsieur le suisse ?
    Le suisse grommela quelques mots et tourna le dos. Le suisse était jaloux : il n’avait que cinq pieds et six pouces de taille, tandis que le phénomène mesurait plus de six pieds.
    – J’y suis ! fit Pardaillan. Je vous reconnais à la voix, monsieur de Croasse. Excusez-moi de ne pas vous avoir remis aussitôt. C’est que vous étiez maigre, il y a quelques mois, tandis que maintenant…
    – Oui, fit Croasse avec désinvolture, la maison est bonne, Dieu merci. Plus de sabres à avaler, ni de cailloux, ni d’étoupes enflammées, mais de bons gigots de cerf, de bonnes tranches de sanglier, de bons…
    Pardaillan écoutait avec une inaltérable complaisance. Et il eût écouté longtemps sans doute si un deuxième géant, mais un géant maigre, cette fois, ne fût brusquement apparu : c’était Picouic.
    – Monsieur le chevalier, dit-il en s’inclinant, daignez pardonner le bavardage de cet imbécile que la vie de cocagne a rendu positivement idiot et qui laisse dans la cour le meilleur ami de Monseigneur. Monseigneur finira par nous chasser, cuistre, si tu continues…
    Et Picouic, se précipitant, montra le chemin à Pardaillan, et laissa Croasse en butte aux sarcasmes du suisse. Pardaillan, donc, suivant son conducteur, traversa un vaste salon d’honneur sur le grand panneau duquel se détachait un portrait en pied du roi Charles IX, monta un bel escalier de chêne ciré, et entra enfin dans une petite pièce où il y avait comme un parfum d’intimité charmante.
    – Monsieur le chevalier de Pardaillan ! annonça le serviteur du ton avec lequel les huissiers de la cour eussent crié : « Messieurs, le roi !… »
    Un jeune homme qui écrivait à une petite table, le dos tourné à la porte, bondit de sa chaise, se leva précipitamment, se tourna, tout pâle vers le chevalier, demeura un instant immobile, puis courut se jeter dans les bras de Pardaillan, qui, doucement ému par cette joie visible, par ce bonheur et cette amitié, rendit étreinte pour étreinte…
    – Vous enfin ! s’écria alors Charles d’Angoulême. Cher ami… mon bon, mon grand frère, vous venez donc enfin contempler le bonheur qui est votre œuvre !…
    – C’est-à-dire, fit le chevalier en souriant, je passais par Orléans, venant d’un désert et allant à un autre désert… j’ai voulu m’arrêter dans une oasis…
    Déjà le jeune duc s’était élancé en appelant, et quelques instants plus tard, Violetta entrait, toute rose d’émotion, s’approchant de Pardaillan, et lui tendait son

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