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Favorites et dames de coeur

Favorites et dames de coeur

Titel: Favorites et dames de coeur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pascal Arnoux
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royaume ; César Monsieur était né alors que Gabrielle était l’épouse légitime de Nicolas d’Amerval…
    Henri déclara qu’il passerait les fêtes de Pâques à Fontainebleau, et suggéra à Gabrielle d’accomplir ses devoirs religieux à Paris pour y rehausser sa popularité. Ils se quittèrent le 6 avril 1599, loin de se douter qu’ils ne se reverraient jamais. Elle profita de son séjour parisien pour représenter à l’intraitable Rosny la nécessité de se montrer plus accommodant à son égard, et fit dans ce but un numéro de charme à sa femme. Jugée ostentatoire, sa piété publique n’édifia pas les foules : la favorite arborait une robe trop riche pour une pécheresse repentie. Soupant chez son ami Zamet 71 , elle mangea un citron dont le goût lui parut bizarre et qui lui occasionna des brûlures d’estomac (7 avril). La nuit suivante fut pénible. Gabrielle, qui ressentit alors les premières douleurs de l’enfantement, fit prévenir le roi et s’alita pour toujours (8 avril).
    Atteinte d’éclampsie, elle accoucha d’un fils mort-né, que les médecins retirèrent morceau par morceau. Puis elle souffrit douze heures d’une agonie atroce, perdant la parole, puis l’ouïe et enfin la vue (9 avril). Le roi avait quitté Fontainebleau pour Paris. Il rencontra des proches à mi-chemin, qui le dissuadèrent de revoir la mourante défigurée et inconsciente. Il se ravisa : « Ceci est de Dieu, qui aime cet État et ne le veut perdre. Je n’abuserai pas de ses miséricordes. » Confirmant les sinistres prédictions des semaines précédentes, Gabrielle décéda le samedi saint 10 avril 1599. Détail sordide, l’une des femmes qui veillait la malheureuse lui tenait les mains, sous prétexte de la réconforter, en réalité pour voler ses bagues ! Mais si discrète qu’elle fut, sa manœuvre ne passa pas inaperçue ; dénoncée et confondue le lendemain, la voleuse dut restituer le produit de son larcin.
    Après des obsèques royales, le corps de Gabrielle d’Estrées fut déposé à l’abbaye de Maubuisson 72 .
    Plus proche de la « croqueuse de diamants » que de la favorite traditionnelle, Gabrielle d’Estrées lia le roi par les plaisirs. Bien que dénuée du sens du service, elle fut parfois de bon conseil et n’eut pas de sang sur les mains.

ANNEXE
    Les femmes et le « bon roi » Henri
    Le Béarnais n’eut pas toujours la dignité de comportement exigé par son rang, ni même une conduite honorable : il laissa misérablement périr Esther Ysambert, une Rochelaise dont il avait eu un fils naturel – « Gédéon Monsieur  », mort en 1588 –, alors qu’elle vint à Saint-Denis le supplier de la secourir ; son corps fut jeté à la fosse commune (fin 1592). Il humilia Corisande, dont l’amour fut toujours désintéressé. Il n’aima véritablement que les dindes vénales qui le méprisaient et se servaient de lui. Dans l’une de ses lettres à Gabrielle, il assurait qu’il était sous le charme… Ne nous y trompons pas : quand le Vert-Galant qualifie Gabrielle de « charmante  », il faut lire cet adjectif dans son acception classique et littérale, plus forte que son sens général : « charmante » signifie « ensorcelante », c’est-à-dire une personne usant d’un sortilège.
    Les amants de Gabrielle d’Estrées
    Bellegarde fut le premier et le plus assidu. Henri IV l’avait envoyé à Cœuvres pour reprocher à Antoine d’Estrées la perte de La Fère, mais il tomba amoureux de Gabrielle (novembre 1589). Ravi de trouver un dérivatif aux reproches justifiés dont il était l’objet, Antoine d’Estrées ne mit pas d’entraves à la cour effrénée que M. le Grand faisait à sa fille ; il songea non sans raison qu’un homme amoureux serait moins sévère et saurait atténuer la colère du roi. Devenue maîtresse d’Henri IV, Gabrielle poursuivit sa liaison avec Bellegarde, au grand dépit du souverain, qui finit par interdire à M. le Grand, menaces à l’appui, de paraître à la cour tant qu’il ne serait pas marié avec une autre femme.
    Cousin éloigné d’Henri IV, Henri d’Orléans, comte de Longueville, bénéficia aussi des faveurs de Gabrielle, début 1591 ; le roi, qui se donnait beaucoup de mal pour la mettre dans son lit, intima à ce cousin trop chanceux de mettre un terme à cette liaison.
    On prête d’autres aventures à Gabrielle d’Estrées, du reste sans lendemain. Mais l’intérêt de la question

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