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Favorites et dames de coeur

Favorites et dames de coeur

Titel: Favorites et dames de coeur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pascal Arnoux
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mouvementée : ses « amours » n’étaient que des passades où la sensualité l’emportait sur le sentiment. Sa passion nouvelle faisait de lui un homme neuf : le barbon était amoureux comme un collégien. Bien avant les noces, il avait envoyé de tendres missives à Charlotte. Surprise, flattée même, elle lui avait répondu sur le même ton et leur correspondance continua bien au-delà de son mariage. Lui, d’habitude si négligé, se vêtit avec plus de soin et mit tout en œuvre pour lui plaire. Et elle ? Amoureuse, peut-être pas ; séduite, assurément. Il est d’ailleurs possible qu’elle ait ressenti quelque trouble émoi pour cet homme prématurément vieilli, mais encore vert, riche d’expériences variées ès plaisirs de la chair et qui, de surcroît, était le roi de France ; en outre, son triste mari ne semblait pas pressé de la rendre femme et elle en avait probablement conçu du dépit. Allez deviner ce qui se passe dans la tête des jeunes filles !
    Le « rapt innocent »
    Il advint alors deux choses imprévues. Condé refusa le rôle de mari complaisant que son oncle lui destinait, ce qui est tout à son honneur. Puis, lassé de l’insistance suspecte du roi auprès de Charlotte, il devint subitement jaloux de celle-ci. Il sollicita la permission de quitter la cour, pour se retirer en province avec elle (12 juin). Le roi rejeta cette prétention. Indigné, M. le Prince 82 s’oublia jusqu’à le traiter de «  tyran »  ; Henri IV manda alors à Sully de retarder le versement de sa pension pour amener son neveu à résipiscence. Condé se réfugia d’abord au château bourguignon de Vallery (juillet). Le roi passa l’été à Montceaux-en-Brie et vint chasser non loin de là. Les Condé gagnèrent Soissons à l’automne. Infatigable, le roi les suivit et se montra plusieurs fois à Charlotte sous un déguisement. Averti de ce manège, Condé décida de soustraire sa femme à l’assiduité du roi, définitivement. Sans la prévenir de ses intentions, il l’entraîna à Bruxelles, capitale des Pays-Bas espagnols (décembre 1609). Cette fuite désespéra Henri IV.
    Mais, dans son affolement, Condé avait commis deux fautes graves : prince du sang, il ne pouvait pas quitter la France sans autorisation du roi, chef de famille ; ensuite, le choix de son lieu d’exil volontaire parut inopportun : les Pays-Bas espagnols étaient les alliés traditionnels de l’empereur Rodolphe II. Or, celui-ci souhaitait s’emparer de la succession des duchés rhénans de Berg, Clèves et Juliers, pour des raisons stratégiques et confessionnelles : il menacerait les Provinces-Unies et les princes allemands, alliés protestants de la France. Henri IV voulait intervenir en Rhénanie pour contrer le projet de Rodolphe II. Dans ce contexte international, la fuite de Condé à Bruxelles ressemblait beaucoup à une trahison.
    Vers une « guerre des amoureux » ?
    L’Espagne sut très vite tirer parti de cette péripétie inattendue : prête à reconnaître Condé héritier du trône au détriment du dauphin Louis, elle l’invita à Milan pour des entretiens secrets. M. le Prince s’y rendit. La trahison si redoutée était consommée.
    Demeurée à Bruxelles, à l’hôtel de Nassau, Charlotte trompait son ennui : preuve de son attachement à Henri IV, elle lui écrivit, l’appelant son « cher chevalier ». Le roi pressa le gouvernement des Pays-Bas espagnols de rendre Charlotte à sa famille, et manda le connétable de Montmorency de procéder à l’annulation du mariage (février 1610). Il prévit même le rapt de la princesse, mais une indiscrétion éventa le projet. Hâtant ses préparatifs militaires, le roi ne tint pas compte des mises en garde répétées du nonce Ubaldini, légat du pape à Paris, contre le risque réel d’extension du conflit ; il ne pensait qu’à Charlotte, il la voulait et il l’aurait ! Craignant les ravages d’une invasion, le gouverneur des Pays-Bas espagnols agréa les exigences d’Henri IV : libre passage de ses troupes entre Luxembourg et Juliers, retour en France de Charlotte, d’ailleurs réclamée par sa famille (8 mai). Et, tandis que le roi fixait son départ aux armées au 19 mai 1610, le gouverneur s’apprêtait à écrire à M. le Prince, qui se trouvait toujours à Milan : il lui était désormais impossible de retenir son épouse à Bruxelles contre son gré, et contre celui de sa famille.
    Le conflit européen

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