Favorites et dames de coeur
Grande Mademoiselle fit une donation en faveur du jeune duc du Maine, tandis que le roi accepta de légitimer Mlle de Blois et le petit comte de Toulouse (novembre 1681).
Des relations imprudentes
Soucieuse de demeurer dans les bonnes grâces du roi, Mme de Montespan avait consulté des devins et acheté des philtres aphrodisiaques (1668). Il n’y avait là rien que de très banal : les voyantes extralucides sont de tous les temps et chaque époque a son Viagra. Mais les fournisseurs étaient gens peu honorables : arrêtés quelque temps plus tard pour un autre motif, ils révélèrent les identités de tous leurs clients aux juges, espérant égarer les soupçons. Françoise figurait parmi d’autres dames nobles. Le dossier fut classé (1668).
Sans rapport avec un banal commerce de poudres destinées à stimuler les virilités, l’affaire des Poisons éclata en 1680. Elle mettait en cause tout un sordide petit monde d’empoisonneurs, de sorciers et faiseuses d’anges. La justice retrouva les suspects de 1668 parmi ceux-ci. Promis au bûcher ou au cachot perpétuel, ils ne perdaient rien à porter de faux témoignages : ils accusèrent Mme de Montespan d’avoir participé à des messes noires, où des officiants égorgeaient des nouveau-nés sur son corps nu, d’avoir empoisonné Mlle de Fontanges, puis nourri des projets homicides contre Mlle de La Vallière et même contre le roi ! Ces calomnies visèrent d’autres familiers de la cour, qui avaient des alibis et purent donc se disculper. Les interrogatoires séparés ne fournirent aucune preuve de la culpabilité de Françoise : mélangeant les noms et les dates, les empoisonneurs se contredirent. Leur tissu de mensonges ne résiste pas à un examen sérieux : quel motif aurait eu Mme de Montespan de supprimer le roi, qu’elle aimait ? Mlle de La Vallière se trouvait déjà au Carmel à la date avancée par les accusateurs de la marquise, et celle-ci n’eut pas besoin de poison pour l’écarter de son champ d’action. Mlle de Fontanges mourut naturellement. Quant aux messes noires, une croyante sincère et pieuse telle que Mme de Montespan ne se serait jamais livrée à ces ignominies. Le roi l’aurait-il nommée surintendante de la reine, lui eût-il conservé si longtemps un appartement au château, dans le cas contraire ? Des historiens à sensation, qui confondent volontiers Mme de Montespan avec le docteur Jekyll et Mr Hyde, ont évoqué la crainte du « scandale » qu’il aurait éprouvé devant la « vérité ». L’argument est pauvre ; Louis XIV n’eut jamais peur d’emprisonner ou d’exiler les gêneurs : Lauzun, confident de ses amours, et Fouquet, détenteur de secrets d’État, personnages bien plus redoutables que ces empoisonneurs, gens de sac et de corde échappés de la Cour des Miracles, le vérifièrent à leurs dépens. Mme de Montespan était déjà sur son déclin quand l’affaire éclata.
Vers la disgrâce
Françoise perdit sa charge de surintendante à la mort de la reine (30 juillet 1683). Ce décès l’affecta plus que le roi, car, en dépit de son cocuage, Marie-Thérèse l’aimait et la traitait avec bonté. Bossuet, le père de La Chaize et l’archevêque de Paris souhaitaient que le roi s’achetât une conduite ; Françoise savait qu’il ne pouvait pas vivre sans femme : « Il faut songer à le remarier au plus tôt, sans cela, tel que je le connais, il fera un mauvais mariage plutôt que de n’en faire point », écrivit-elle, non sans arrière-pensées. Avec une naïveté étonnante chez une femme aussi supérieure, elle escomptait les décès de Mme de Maintenon et de M. de Montespan afin de se remarier secrètement avec Louis XIV ! Obéissant d’autre part au vœu de la reine défunte, elle retourna à la piété de sa jeunesse : « Mme de Montespan s’est jetée dans la plus grande dévotion […]. Il est bien temps qu’elle nous édifie », persifla Mme de Maintenon.
Mme de Montespan conserva son rang de favorite. Le roi lui témoignait toujours sa considération et la visitait deux fois par jour, quoique leurs rapports n’eussent plus rien de sensuel. Mais elle ne monta plus dans son carrosse comme autrefois, cette place étant désormais dévolue à Mme de Maintenon. « Premier pas de sa disgrâce et de son éloignement 142 » , elle dut échanger sa suite du premier étage au château de Versailles contre un logis moins spacieux (décembre
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