FBI

superviseur de l’équipe spéciale de Neil Welch, John Burke était le seul à être autorisé à se rendre de temps à autre au quartier général du FBI de Detroit. Ses hommes vivaient, eux, dans une clandestinité totale : « J’ai eu la chance de pouvoir choisir moi-même mes hommes. Ils étaient dévoués au-delà du possible. Ils travaillaient sept jours sur sept. Ils savaient tout faire, aussi bien les filatures que les opérations d’infiltration. On mélangeait les deux techniques : c’était une première, pour le FBI. »
    John Burke et ses hommes ont pour cible principale le parrain de Detroit, Anthony Giacalone. Ils travaillent à sa perte avec deux autres agences fédérales, la Brigade des stups, la DEA (Drug Enforcement Agency), et l’IRS (Internal Revenue Service), le fisc. Après quatre ans d’enquête, en 1976, ils finiront par faire condamner le parrain pour fraude fiscale.
    Il ne leur a pas échappé qu’Anthony Giacalone est un proche de Jimmy Hoffa. Celui-ci, qui vit et travaille à Detroit, est président du Syndicat des camionneurs, les « Teamsters ». À cette époque, les accointances mafieuses de Jimmy Hoffa sont déjà connues, et on l’accuse d’avoir été mêlé à l’assassinat du président Kennedy. Les agents du FBI pensent que Giacalone a été chargé de suivre les « Teamsters » par la Cosa Nostra. Ils ne se doutent pas de l’ampleur du drame qui se joue devant eux.
    En 1964, Jimmy Hoffa a été condamné à quinze ans de prison pour avoir tenté de corrompre un juré. Gracié par le président Nixon en 1971, il rentre à Detroit, où il tente de reprendre le contrôle des « Teamsters ». Mais la Cosa Nostra ne veut pas de son retour. Un parrain new-yorkais, Anthony Provenzano, dit « Tony Pro », est chargé de le rappeler à l’ordre. Giacalone organise une rencontre entre Hoffa et Tony Pro dans un restaurant de Detroit, le 30 juillet 1975… C’est à l’issue de ce déjeuner que personne n’a plus jamais revu l’ancien président des « Teamsters ».
    La disparition de Jimmy Hoffa est un des grands mystères de l’histoire américaine du siècle dernier. Dans les mois qui suivent, John Burke et ses hommes ne ménagent pas leurs efforts pour découvrir ce qu’il est advenu du dirigeant syndical. Après avoir interrogé des milliers de personnes, le 27 janvier 1976, estimant que les agents du FBI sont arrivés au plus près de la vérité, Burke signe un rapport de 57 pages intitulé « Hoffex ». Il ne manque que l’emplacement du cadavre de Hoffa pour boucler définitivement le dossier. Les agents du FBI accusent Anthony Giacalone d’avoir poussé Jimmy Hoffa dans le piège tendu par la Mafia. Ce qu’ils ne disent pas, c’est que, dans le même temps, ils surveillaient le parrain et ne se sont rendu compte de rien…
    Les hommes de Neil Welch ont trouvé plus fort qu’eux. Neil Welch, lui, n’est plus là : il a été muté à Philadelphie.
    Génération Vietnam
     
    Juillet 1977 : Clarence Kelley est directeur par intérim du FBI. Le président Jimmy Carter nomme une commission de neuf membres chargés de désigner le nouveau « patron » du Bureau. Dirigée par Irving Shaprio, le P-DG de la firme Du Pont, la commission auditionne 240 candidats pour ne retenir finalement que cinq d’entre eux. Elle ne cache pas que sa préférence va à Neil Welch. C’est également le candidat favori de la Maison-Blanche. Mais, au quartier général du FBI, la vieille garde organise la résistance. Les directeurs adjoints rescapés de l’ère Hoover ne veulent pas de Welch, qu’ils qualifient de « franc-tireur ». Alors, le Président nomme un directeur de transition avant de porter son choix sur le juge William H. Webster. En guise de lot de consolation, Neil Welch se voit confier les rênes du bureau de New York.
    Le bureau de New York (NYFO, New York Field Office) est le navire amiral du FBI. Véritable État dans l’État, c’est un bureau difficile à bouger, perclus de lourdeurs bureaucratiques. À l’époque, le NYFO emploie 1 400 personnes, agents et personnel administratif compris, soit le dixième des effectifs du FBI. En sus des problèmes inhérents aux grandes métropoles, avec le boom de Wall Street, les agents du NYFO doivent faire face à l’explosion de la criminalité en col blanc. Ils surveillent les Nations Unies, qu’ils qualifient de nid d’espions, et doivent affronter les principales familles mafieuses