FBI

rapidement sonorisé par John Kravec et ses techniciens.
    Peu après, John Gotti est arrêté pour l’assassinat de John O’Connor, vice-président du syndicat des charpentiers. Relâché sous caution, il retrouve le chef de ses tueurs, Sammy Gravano, dit « le Taureau », dans l’appartement de la vieille dame. Les deux hommes parlent du procès qui va s’ouvrir. Gotti est tranquille : il est sûr de s’en sortir, il a de nouveau acheté un juré. Il chuchote aussi qu’il a un informateur « bien placé » parmi les enquêteurs, et qu’il sait que le Ravenite est écouté. Il ne se doute pas que le FBI est aussi à l’écoute quand il dit cela, dans l’appartement. Le Bureau ne prévient pas le procureur de Manhattan, Robert Morgenthau, qu’il a une « taupe » dans ses services et qu’un membre du jury a été acheté. Comme le FBI s’y attendait, Gotti est acquitté pour la troisième fois. À sa sortie du tribunal, « Teflon Don » est accueilli en héros. Les chroniqueurs s’en donnent à cœur joie : « En l’acquittant, dit l’un d’eux, les jurés auraient tout aussi bien pu lui annoncer qu’il était désormais au-dessus des lois. Le voilà intouchable ! »
    Pas pour longtemps. Le FBI finit par démasquer la taupe : c’est un inspecteur de police. La source de John Gotti tarie, le Bureau part une nouvelle fois à l’attaque de « Teflon Don » et l’accuse d’avoir organisé l’assassinat du chef de sa famille, Paul Castellano. George Gabriel tient à arrêter lui-même Gotti. Dès qu’il a en main le mandat d’arrêt, il quitte le Bureau avec ses hommes. Gabriel et l’un de ses agents prennent place dans une voiture, les autres agents suivent à bord d’autres véhicules. Après avoir garé sa voiture, Gabriel et son équipier pénètrent dans le club sans regarder derrière eux. À l’intérieur, il y a quarante mafieux. Ce n’est pas la première fois qu’il vient ici, et tout le monde sait qui il est. Mais, cette fois, il n’est pas venu pour discuter avec John Gotti.
    « Messieurs, déclare-t-il en haussant la voix pour faire taire le brouhaha ambiant, vous savez tous qui nous sommes. Nous sommes du FBI, ce n’est donc pas la peine de vous énerver. Je viens pour voir John.
    – Ouais, il est à l’arrière, dit un homme aux allures de tueur.
    – Je veux que vous vous mettiez tous contre le mur, les mains en l’air. Les gentlemen qui sont derrière moi vont s’occuper de vous. »
    George Gabriel se retourne et constate avec stupéfaction que, contrairement à ce qui était prévu, il n’y a pas d’agents du FBI derrière lui. Au lieu des visages familiers et rassurants de ses hommes, il n’y a que les figures incrédules des hommes de John Gotti.
    L’agent du FBI ne se laisse pas démonter :
    « Je veux dire : les gentlemen qui vont venir vont s’occuper de vous. »
    Puis, au milieu de la stupeur générale, il se rend à l’arrière du club pour arrêter John Gotti…
    Après avoir remis Gotti entre les mains du procureur, George Gabriel va voir les agents qui étaient censés entrer derrière lui au Ravenite Club.
    « Messieurs, auriez-vous l’amabilité de m’expliquer ce qui s’est passé au juste ?
    – On a été bloqués par les feux rouges, on n’est pas arrivés à passer…
    – Nous sommes les flics ! Les flics, ça passe aux feux rouges ! » rétorque Gabriel en éclatant de rire.
     
    Quand arrive l’heure du procès, le parquet a pris toutes ses précautions. Le jury est anonyme, et ses membres sont isolés du monde extérieur. Le FBI recrute un témoin de taille en la personne de Sammy « le Taureau » Gravano. Avant son arrestation, John Gotti avait l’habitude d’expliquer que le gouvernement ne gagnerait jamais face à lui, car il manquait de « cohésion ». Difficile de lui donner tort, quand on sait que le Département de la Justice avait hésité de longs mois, ne sachant s’il devait confier l’affaire à Andrew Maloney, du parquet fédéral de Brooklyn, ou à Robert Morgenthau, du parquet de Manhattan. Pendant ce temps, les meurtres ont continué sous le regard impuissant du FBI. Grâce à leurs micros, Bruce Mouw et George Gabriel ont appris que John Gotti avait l’intention de faire assassiner l’un de ses hommes ; les deux agents ne pouvaient intervenir sans révéler l’existence du micro, et le malheureux aura été exécuté. Le Département a finalement opté pour Andrew Maloney.