FBI
question de prendre de tels risques pour 500 dollars par semaine ! » répond Salem. En fait, pour boucler son dossier, le Bureau n’avait nul besoin de faire courir un tel danger à son informateur. Il suffisait de renforcer la surveillance du groupe et de placer des micros chez eux pour arriver aux mêmes résultats.
Par la suite, un agent reconnaîtra que le Bureau aurait tout à fait pu se passer du témoignage d’Emad Salem : « On aurait dû travailler un peu plus. Remonter les pistes qu’il nous fournissait, et renforcer la surveillance. Suivre les suspects et les écouter. C’est le boulot du FBI. » Mais, pour une question de principe, le Bureau a décidé de se passer des services de Salem en juillet 1992. Dès lors, il n’a plus eu d’informateur au sein du groupe du cheik Abdel Rahman.
Avant son départ, Emad Salem a prévenu le FBI que les terroristes avaient l’intention de faire sauter l’une des tours du World Trade Center. Le Bureau a eu l’air de prendre la menace au sérieux, mais pas au point d’arrêter le groupe. Il a prévu de remplacer les explosifs par une substance inoffensive. Mais le renvoi de Salem a bouleversé ses projets et le plan n’a jamais été appliqué.
Quelques mois après son renvoi du FBI, au début de 1993, Emad Salem reçoit un message d’un des artificiers du groupe, Mahmud Abouhalima, qui lui demande de le rappeler d’urgence. Encore furieux de son renvoi, l’Égyptien ne rappelle pas le terroriste et ne prévient pas davantage le Bureau. Ce même jour, Mahmud Abouhalima téléphone à plusieurs usines de produits chimiques et passe commande des différents composants nécessaires à la confection de la bombe. Salem est un expert en explosifs et il est vraisemblable qu’Abouhalima voulait lui demander son aide pour fabriquer l’engin destiné à détruire le World Trade Center. Le Bureau vient de perdre une occasion en or de stopper net les terroristes.
Le FBI « réactive » Emad Salem au lendemain de l’attentat. L’Égyptien est payé un million de dollars pour infiltrer la cellule du cheik Omar Abdel Rahman. En l’espace de quelques semaines, il est de nouveau en piste. Le 23 avril 1993, un des responsables du groupe, Siddig Ali, lui demande de participer à une série d’attentats contre quatre objectifs à New York : les tunnels Lincoln et Holland qui relient Manhattan au continent, le siège des Nations Unies, le bureau new-yorkais du FBI. Quelques mois plus tard, le Bureau arrête les terroristes alors qu’ils sont en train de fabriquer des engins explosifs. Dans la foulée, le gouvernement américain expulse deux diplomates soudanais impliqués dans ces tentatives.
Mais la menace est toujours là. Le FBI n’a arrêté qu’une poignée d’exécutants. Les « cerveaux » courent toujours, à commencer par celui de l’attentat perpétré contre la tour Nord du World Trade Center. Le FBI l’a identifié trop tard : il s’appelle Ramzi Yousef, il a quitté les États-Unis pour le Pakistan peu après l’explosion de la voiture piégée dans les sous-sols du World Trade Center.
La longue traque
Deux ans plus tard, le dimanche 5 février 1995, Richard Clarke, coordinateur national de la lutte contre le terrorisme, qui dépend directement du président Clinton, appelle le FBI. Il téléphone depuis une ligne sécurisée et a composé le numéro de la ligne directe du responsable de la lutte antiterroriste au sein du Bureau. À l’autre bout du fil, il entend une voix qui ne lui est pas familière.
« Qui est à l’appareil ? demande Richard Clarke.
– Et vous, qui êtes-vous ? aboie le nouveau responsable au contre-terrorisme du FBI. Je m’appelle John O’Neil ! »
Le nouveau chef de la division antiterroriste est un agent très spécial. Il débarque tout juste de Chicago, où il occupait le poste d’ASAC. Il y a créé une Fugitive Task Force qui fait merveille. C’est son premier jour à ce poste ; il a conduit toute la nuit depuis Chicago et n’a même pas pris le temps de se changer. En écoutant Richard Clarke, il se dit qu’il a eu raison.
« Et moi je travaille pour la Maison-Blanche. Je crois que nous avons une urgence ! »
Richard Clarke vient de recevoir un rapport en provenance du Pakistan lui annonçant que Ramzi Yousef aurait été localisé dans ce pays. L’information est de taille : Yousef figure en bonne place sur la liste des dix criminels les plus recherchés par le FBI,
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