FBI
Homeland Security.
XIV
Guerres (2001-2009)
Quand la lourdeur administrative favorise le désastre – À Phoenix, le Bureau perd une occasion d’empêcher les attaques du 11 Septembre – Deuxième occasion perdue à Minneapolis, où la bureaucratie empêche la découverte d’informations cruciales – Le Bureau de l’après-11 Septembre face à ses vieux démons – L’Agent spécial Ali Soufan aurait dû être l’avenir du FBI, mais, à l’heure de la torture, le futur s’annonce incertain.
Richard Clarke, le tsar inquiet
En juin 2001, épuisé par un feu roulant de polémiques et de critiques incessantes, le directeur du FBI, Louis Freeh, présente sa démission après huit ans d’un règne agité. Tom Picard, directeur adjoint, le remplace avant de céder, le 4 septembre 2001, les rênes du Bureau à Robert Mueller, sept jours avant les attentats du 11 septembre.
Sept jours… trop tard pour essuyer le moindre reproche, mais suffisamment tôt pour devoir assumer l’héritage empoisonné de son prédécesseur ! Si, au lendemain du 11 septembre, Robert Mueller peut en toute bonne foi affirmer que le FBI n’était pas prévenu de la plus importante attaque visant le territoire américain depuis Pearl Harbor, sa position est difficilement tenable, dès l’automne 2001, quand, à l’intérieur du Bureau, des voix s’élèvent pour le contredire.
Au début de l’été, nombre de responsables des services de renseignement et du contre-terrorisme américain s’attendent en effet à une attaque imminente et spectaculaire d’Al Qaida. Dans l’édition du 25 juin 2001 du Senior Executive Intelligence Brief (SEIB), rapport envoyé journellement à des centaines de responsables politiques et parlementaires, le Directorate of Intelligence de la CIA met en garde : « Ben Laden et ses associés préparent des attaques » imminentes contre les intérêts américains et israéliens. Ce même jour, Richard Clarke, chargé de coordonner le contre-terrorisme pour la Maison-Blanche, informe Condoleezza Rice, conseiller pour la Sécurité nationale du président Bush, que six rapports différents indiquent que des militants d’Al Qaida se préparent à une opération d’envergure. Un de ces rapports cite des dirigeants d’Al Qaida qui parlent de « surprises importantes » pour les semaines à venir. Mais, au sein de l’administration de George Bush, des poids lourds comme le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld et le secrétaire adjoint à la Défense Paul Wolfowitz doutent de la réalité de la menace. Le 30 juin, le directeur de la CIA, George Tenet, répond à ces sceptiques en envoyant à la Maison-Blanche un rapport intitulé « Les menaces de Ben Laden sont bien réelles ».
En ce début de juillet 2001, le directeur du FBI par intérim, Thomas Picard, n’arrive pas à intéresser le Procureur général John Ashcroft à la menace terroriste. Le 12, tous deux se rencontrent pour une réunion de travail. Picard, inquiet des mises en garde répétées de la CIA, suggère à Ashcroft de recevoir le directeur de la CIA, George Tenet, et d’écouter ce qu’il a à dire. Le Procureur général lâche : « Je ne veux plus entendre parler d’Al Qaida ! » Furieux, Picard se lève, imité par son vis-à-vis. Les deux hommes se font face en silence pendant de longues secondes avant que le directeur du FBI ne quitte le bureau sans mot dire.
Pourtant, les signes avant-coureurs de l’attaque se multiplient. Le 5 juillet, Richard Clarke, le « tsar de l’antiterrorisme » à la Maison-Blanche, tire la sonnette d’alarme devant des dizaines de représentants de toutes les agences fédérales. Il leur demande d’alerter leurs hommes et de lui signaler la moindre anomalie : « Je veux être au courant de tout, leur dit-il, même quand un moineau tombe d’un arbre ! » Concernés au premier chef, les représentants de l’aviation civile (FAA) quittent la réunion, peu convaincus. En revanche, un haut responsable du FBI promet à Clarke de redoubler d’efforts. Mais, jusqu’alors, les mises en garde de Clarke et de la CIA sont restées trop vagues. Où, quand, comment Al Qaida va-t-il frapper ? Clarke l’ignore. Pourtant, si ses mises en garde avaient été prises au sérieux, cinq jours après la réunion avec les représentants des agences fédérales, le FBI aurait regardé de plus près un rapport en provenance du bureau de Phoenix (Arizona),
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