FBI
j’occupais l’urinoir à côté du sien. Il n’aimait pas du tout ça. Giancana avait le rein timide : il n’arrivait pas à pisser quand j’étais à côté de lui ! »
Les Agents spéciaux cherchent des poux dans la tête de Sam Giancana, et ils en trouvent. Lors d’un contrôle de routine, des policiers s’aperçoivent que le parrain a dans son portefeuille deux permis de conduire, dont un seul à son nom. C’est l’occasion qu’ils attendaient : Giancana est renvoyé devant les tribunaux.
Le 12 juillet 1961, cinq agents du FBI dirigés par William F. Roemer interceptent Sam Giancana et Phyllis McGuire à l’aéroport O’Hare de Chicago. Ancien champion de boxe à l’université Notre-Dame, Roemer bloque Giancana. Pendant ce temps, ses collègues interrogent Phyllis McGuire dans une pièce mise à leur disposition par la police de l’aéroport. Les agents du FBI essaient en vain d’amener la chanteuse à témoigner contre le patron de l’Entreprise.
Non loin de là, le ton monte entre William F. Roemer et Sam Giancana. La confrontation entre les deux hommes va se révéler très chaude. Furieux, Giancana attaque par une bordée d’insultes des plus fleuries. Pour bien faire comprendre à Roemer à qui il a affaire, il énumère ses participations dans les industries de la ville.
« Et à Las Vegas ? s’enquiert l’agent du FBI.
– Je possède 99 % de Las Vegas. Et, en Floride, je contrôle le Fontainebleau, l’Americana et le Diplomat. »
Trois des plus grands hôtels de l’État : William F. Roemer sait que le mafieux exagère, mais à peine.
Chauffé à blanc, Sam Giancana demande à contacter son bras droit pour qu’il lui amène une paire de fusils de chasse. Puis il ajoute :
« Tu sais combien de personnes j’ai tuées ? Je crois bien que je vais être très bientôt responsable d’une autre mort ! »
William F. Roemer s’énerve à son tour. Il apostrophe des voyageurs sur le point de s’embarquer :
« Regardez cette ordure, c’est Sam Giancana. C’est le successeur d’Al Capone. Nous, on doit vivre avec ce type ; vous, vous avez de la chance, vous partez ! »
Giancana explose alors :
« Tout ça, c’est la faute de Bobby ! Tu dépends de ton patron et ton patron dépend de son superboss… Tu vois qui je veux dire… Les Kennedy ! Je sais tout sur les Kennedy, et Phyllis encore plus. Un jour, on va tout balancer. Vous n’êtes pas près d’oublier l’incendie que je vais allumer ! »
Sam Giancana pense en effet détenir un nouveau moyen de pression sur le président John F. Kennedy : c’est LA femme de Las Vegas mentionnée dans le rapport du FBI du 13 juillet 1960, jour de la nomination de JFK comme candidat démocrate à la présidentielle. Elle s’appelle Judith Campbell Exner.
Aux abords de cette brunette sculpturale, on devrait mettre un panneau : Attention, danger ! C’est une starlette que Johnny Roselli, dit le « Beau Johnny », a accostée sur un plateau de cinéma où elle traînait. Johnny Roselli, le beau parleur aux cheveux blancs, avec ses lunettes noires, ses chaînes en or, son bronzage, sa dégaine de play-boy, connaît du beau monde à Hollywood. Normal : c’est l’ambassadeur de l’Entreprise. Et il lui présente ce qui se fait de plus « dézingué ». C’est une petite bande qui n’a que faire des conventions et du qu’en-dira-t-on. Dans le Los Angeles des années 1950, tout ce petit monde se mélange, fait des affaires, s’échange les filles comme on change de chemise. Judith Campbell Exner comme les autres. Elle passe de Roselli à Frank Sinatra, de Sinatra à son pote l’acteur Peter Lawford, lequel la passe à son beau-frère, le président John Fitzgerald Kennedy. Sam Giancana, le frère d’armes de Johnny Roselli, est lui aussi de la partie : le grand fauve ne peut rester devant une telle proie sans bouger. Au début, Judith se refuse, elle se réserve pour Mister President . Mais Sam Giancana sait se montrer persuasif, et la belle cède.
Les magnétos du Bureau tournent toujours. Le FBI est aux premières loges d’un vaudeville qui doit se jouer à huis clos. Que se passerait-il si le public était informé du ménage à trois de l’ancienne starlette avec l’homme le plus puissant du pays du Bien et l’homme le plus puissant du pays du Mal ? Or, au train où vont les choses, la nouvelle risque fort de s’étaler en une des principaux quotidiens de la
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