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Fidel Castro une vie

Fidel Castro une vie

Titel: Fidel Castro une vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Clerc
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cinéastes, philosophes, essayistes qui ont pris le chemin de La Havane. D’autres, aussi notoires, qui ne sont pas venus, ont signé un texte d’encouragement : « De Cuba, est-il écrit, nous viennent des exemples, des paroles vraies, dans le silence qu’est devenue la culture des pays occidentaux dominants. » Les cibles du congrès sont, comme il est naturel, la « sale guerre américaine » au Viêtnam, le colonialisme portugais, l’
apartheid
sud-africain et le « blocus américain » contre l’île caraïbe. Dans son discours, au théâtre Chaplin, Fidel fait l’apologie de « l’intellectuel révolutionnaire », celui qui, « guidé par les idées avancées de notre époque, sera prêt à courir tous les risques, et pour qui la mort constituera la possibilité suprême de servir sa patrie et son peuple ». Un seul des Européens présents, l’éditeur italien Feltrinelli, prendra cette envolée au pied de la lettre, qui mourra en 1972 près de Milan au pied d’un pylône, le corps dévoré par un explosif. Pour d’autres, c’est sous forme parodique, en mai 1968, que se jouera la saga castriste.
    Commence l’année du « guérillero héroïque » : Guevara, bien sûr, dont s’ébauche une sorte de déification, avec récollectionobligatoire, dans les écoles, devant son portrait, tandis que les petits chantent «
Seremos como el Che
» (nous suivrons la voie ouverte par Che). 1968 est aussi l’année du dernier coup de patte porté à l’Union soviétique et ses inconditionnels dans l’île : le 26 janvier 1968 est exclue la « microfraction » du PCC dirigée par Anibal Escalante. L’ex-responsable des ORI – chassé en 1962 de Cuba, admis à Moscou comme journaliste à la
Pravda
, réintégré dans le parti en 1964 – avait recommencé à comploter. L’affaire est sérieuse : le Comité central est réuni, pour la troisième fois seulement en un peu plus de deux ans. Raúl y prononce un réquisitoire, véhément comme il sait, contre Anibal et d’autres anciens du PSP, mais aussi contre de « nouveaux communistes » gagnés par les idées moscovites. C’est la Commission des forces armées qui a mené l’enquête. Fidel prononce un discours de douze heures vingt minutes, son record absolu. Onze personnalités sont limogées, dont deux membres du Comité : Ramón Calcines et José Matár, anciens responsables respectivement des Jeunesses communistes et des CDR.
    Des dizaines de fonctionnaires seront également mutés, dont quelques militaires, des journalistes, des scientifiques. Et trente-sept « micro-fractionnistes » sont traduits devant un tribunal en février. Il leur est reproché, à nouveau par Raúl, d’avoir voulu : 1) imposer les points de vue de l’Union soviétique sur la coexistence pacifique ; 2) rejeter la thèse de la lutte armée pour l’Amérique latine et critiquer Guevara, qualifié « d’aventurier apatride » ; 3) modifier la politique commerciale de Cuba afin de maintenir le pays dans une situation de dépendance exclusive envers l’Union soviétique, en critiquant notamment des accords avec la France et la Grande-Bretagne.
    Les déviationnistes ont, en outre, dénigré Fidel, qualifié « d’antisoviétique, anticommuniste et petit-bourgeois ». Le tribunal retiendra, entre autres charges, la « remise d’informations calomnieuses » à des pays étrangers : l’accusation a fait état de contacts entre la micro-fraction et certaines ambassades de pays de l’Est. « Il faut que les Soviétiques fassent quelque chose », aurait été le leitmotiv des réunions factieuses. Fidel et Raúl font donner, comme à l’ordinaire, « leur » vieux communiste, Carlos Rafael Rodríguez : « Même en fusillant Anibal Escalante, on ne pourrait pas effacer la trahison qu’il a commise », expose celui-ciau Comité central, ajoutant opportunément : « Néanmoins, je ne propose pas qu’on le fusille. »
    Car Anibal et ses amis ont fait leur autocritique – encore que Raúl l’ait jugée insincère. Les accusés vont reconnaître le bien-fondé des mesures prises pour liquider le « foyer d’infection » qu’ils représentent. Ils disent leur repentir, promettent de s’amender. Escalante est condamné à quinze ans de prison, vingt-deux de ses complices à des peines de douze à six ans, les autres à quatre, trois ou deux ans. Ce sera le dernier grand procès, pour les vingt et une années suivantes, de l’intérieur du régime. Plus aucune opposition

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