Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Fiora et le Magnifique

Fiora et le Magnifique

Titel: Fiora et le Magnifique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
Vom Netzwerk:
lieu d’être une vache nous
pourrions faire une crèche...
    – Mauvaise
que tu es ! Ta bouche est pleine de fiel, c’est pour ça que tu as le teint
si jaune !
    – Moins
jaune que le tien ! C’est vrai que ton défunt te pissait dessus tous les
matins !
    Celle
qui venait de recevoir cette dernière injure n’était autre que Hieronyma Pazzi.
Folle de rage, elle chercha quelque chose à envoyer à la tête de son
adversaire, trouva un bocal de guimauve que l’autre évita de justesse mais qui
alla se fracasser sur le dallage. Ce que voyant, l’apothicaire se lança
courageusement dans la bataille et chercha à apaiser les deux femmes qui, à
présent, en venaient aux mains.
    – Venez
m’aider, vous autres ! cria-t-il à ses deux garçons de magasin qui,
accoudés à un comptoir, dégustaient la scène en connaisseurs. Ils s’exécutèrent
mollement, peu désireux, au fond, de voir cesser le combat entre la dame Pazzi
et la noble Cornelia Donati, surtout un combat qui commençait si bien. Les deux
femmes se haïssaient depuis toujours pour une question de rivalité amoureuse
dans laquelle Cornelia avait eu le dessus en soufflant à Hieronyma l’homme qu’elle
souhaitait épouser. Depuis, Hieronyma avait pris une certaine revanche car
Augusto Donati trompait sa femme avec tout ce qui, vêtu d’un jupon, passait à
portée de ses mains mais l’animosité n’avait pas faibli pour autant et, chaque
fois que les deux femmes se rencontraient, une querelle éclatait sur le moindre
prétexte. Ce jour-là, le brandon de la guerre était un innocent petit pot de
pommade d’incarnat pour les lèvres, chef-d’œuvre de l’officine de Landucci, et
que chacune des deux adversaires prétendait s’approprier, le malheur voulant qu’il
n’y en eût plus qu’un seul.
    On
parvint enfin à séparer les deux combattantes qui, l’une comme l’autre, avaient
laissé quelques plumes dans l’engagement et, tandis qu’elles reprenaient
haleine, l’apothicaire trancha le débat en déclarant sévèrement :
    – Je
ne vendrai cet incarnat à aucune de vous deux ! Madonna Catarina Sforza, l’illustrissime
nièce de Sa Sainteté le pape Sixte IV vient justement de m’en faire demander
car la réputation de cet onguent est allée jusqu’à elle. C’est donc à Rome que
je vais l’envoyer !
    Et, d’un
geste plein de majesté, il ramassa le pot oublié sur le comptoir et le renferma
dans l’une de ses armoires à pentures de fer. Puis il déclara :
    – Ce
qui n’empêche, madonna Hieronyma, que vous ne me deviez le prix de ce bocal que
vous avez brisé et de la guimauve qu’il contenait qui ne saurait plus servir.
Je vais faire établir le compte par mon scribe...
    – Je
n’aurais pas brisé cet objet si cette harpie ne m’avait mise hors de moi, s’écria
la dame Pazzi. Elle doit payer autant que moi !
    En
dépit d’un œil au beurre noir, Hieronyma avait repris toute son assurance. C’était
une belle femme de trente-cinq ans qui gardait beaucoup de fraîcheur. Son corps
bien en chair demeurait appétissant et l’on chuchotait qu’elle trouvait à son
veuvage des compensations avec des hommes discrets ou des hommes qui avaient
encore plus d’intérêts à garder ses amours secrètes c’est-à-dire des serviteurs
de la maison. Le vieux Jacopo Pazzi, le patriarche qui régnait sur la tribu,
passait en effet pour avoir la main singulièrement lourde envers ceux de sa
maisonnée qui se conduisaient mal. On parlait – sous le manteau bien sûr – d’un
serviteur indélicat, si cruellement mordu par les molosses de chasse, qu’il en
était mort, d’une servante trop bavarde enterrée dans un bois, la bouche pleine
de terre après avoir été auparavant étranglée, d’une jeune cousine engrossée
malencontreusement et morte d’une étrange maladie de langueur, due au fait qu’on
l’avait soigneusement vidée de son sang. Et si ce que l’on disait de Hieronyma
était vrai, celle-ci risquait gros mais elle était rusée et savait prendre son
beau-père sur qui elle avait acquis un grand ascendant parce qu’ils étaient
habités tous deux par la même passion : l’argent.
    Avec
colère, Hieronyma jeta une pièce sur le comptoir et se disposait à partir quand
Fiora l’arrêta :
    – Tu
ne peux sortir ainsi, cousine ! Demande au moins à messer Landucci un
onguent pour dissimuler cet œil. Il en a de miraculeux... fit-elle innocemment.
    Hieronyma
ne le prit pas ainsi. Toisant la

Weitere Kostenlose Bücher