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Fiora et le roi de France

Fiora et le roi de France

Titel: Fiora et le roi de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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classait dans la corporation des bouchers.
    Fiora
haussa les épaules :
    – Alors,
porte-le ! Tu es assez fort pour ça. Tu ne vois pas qu’il est à moitié
mort ? Un cadavre ne te vaudra pas la plus petite pièce de monnaie.
    Elle
obtint gain de cause : Carlo fut jeté comme un paquet en travers du dos de
la mule dont Fiora prit elle-même la bride. Elle savait que la partie serait
difficile mais pour rien au monde, et même si elle devait y perdre l’amour de
Lorenzo, elle n’abandonnerait à ces brutes l’étrange garçon qui s’était déclaré
son ami quand la terre entière se liguait contre elle. A cet instant, Chiara
ressortit de chez l’apothicaire et embrassa la scène d’un coup d’œil, mais
Fiora ne lui laissa pas le temps de donner son avis.
    – Emmène
Khatoun chez toi, s’il te plaît ! demanda-t-elle doucement. J’irai vous
rejoindre tout à l’heure.
    – Tu
ne remontes pas à Fiesole ?
    – Non.
Il faut que je voie Lorenzo avant.
    Et
elle reprit son chemin à la tête d’une foule désormais plus curieuse que
vraiment excitée. Luca Tornabuoni marchait à côté d’elle, la mine boudeuse, et
le boucher tenait l’autre flanc de la mule. Personne ne souffla mot jusqu’à ce
qu’au détour d’une rue, la silhouette imposante et familière du palais Médicis
apparût avec son appareillage d’énormes pierres et ses fenêtres cintrées. Alors
qu’autrefois tout un chacun pouvait en franchir le seuil et pénétrer au moins
jusqu’à la grande cour carrée, des gardes armés veillaient à présent au
portail. La noble demeure devait à l’assassinat de Giuliano d’avoir perdu ce
caractère aimable et bon enfant qui la rendait si attachante. Elle y avait
gagné la sévérité hautaine que Fiora avait vue aux palais romains. Décidément,
Florence avait beaucoup changé !
    Bien
entendu, les soldats croisèrent leurs lances à l’arrivée de cette foule sombre
et vaguement menaçante. Ils ne les abaissèrent pas quand Luca Tornabuoni se fit
reconnaître, mais Fiora réclama Savaglio et le capitaine des gardes apparut.
Fidèle à son habitude, il était d’une humeur massacrante :
    – Que
se passe-t-il encore ? cria-t-il. J’ai déjà dit que je ne voulais plus d’attroupement
devant cette maison. Dispersez-vous !
    – Laisse-moi
au moins entrer avec cette mule et ces deux hommes, lança Fiora. Je veux voir
Monseigneur Lorenzo.
    Le
regard de Savaglio, vif et acéré, s’arrêta sur chacune des trois physionomies,
puis sur le corps inerte :
    – Ser
Luca n’a pas besoin de permission pour voir son cousin et toi non plus, donna
Fiora, mais les deux autres ne me semblent pas de ses familiers Et puis tous
ceux-là ?
    – Ils
attendront sagement, mais moi je veux le voir seule à seul, insista la jeune
femme. Est-il là ?
    – Dans
son cabinet. Je vais te conduire...
    – Je
veux y aller aussi ! s’écria Tornabuoni, et je ne vois pas pourquoi...
    – Allons !
Honneur aux dames ! fit le chef des gardes dont le sourire de loup traduisait
le peu d’estime qu’il éprouvait pour le jeune homme. Je suis certain que donna
Fiora n’en a pas pour longtemps. Tu peux bien l’attendre un instant...
    Tout
en parlant, il tournait autour de la mule, cherchant à voir le visage de l’homme
qu’elle transportait :
    – Il
est mort ?
    – Non.
Simplement évanoui, je pense, mais il faudrait peut-être lui donner quelques
soins ? C’est Carlo Pazzi, messer Savaglio. Il arrivait tout juste de Rome
quand il a été attaqué...
    – Des
soins, à un Pazzi ! Te rends-tu compte, Savaglio ?
    Fiora
s’approcha de Luca jusqu’à ce qu’il pût percevoir son souffle :
    – Tout
le monde, ici, sait que c’est un innocent, fit-elle entre ses dents.
Souviens-toi quand même, Luca, que l’une des sœurs de Lorenzo est mariée à un
Pazzi... et que celui-là n’a pas été inquiété. Lorenzo seul jugera celui-ci...
et je m’inclinerai devant sa décision.
    Sans
attendre de réponse, elle se dirigea d’un pas rapide vers le raide escalier qui
montait aux étages, tôt rejointe par un valet qui se chargea de l’annoncer,
Savaglio ayant préféré, en dernier ressort, garder l’œil sur cette troupe qui
ne lui inspirait visiblement aucune confiance.
    Derrière
le dos solennel du valet, Fiora parcourut des pièces dont la magnificence lui
était familière. Elle connaissait depuis longtemps ces grandes tapisseries
tissées d’or, ces meubles précieux

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