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Fiora et le Téméraire

Fiora et le Téméraire

Titel: Fiora et le Téméraire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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trois
semaines et nous avons eu le bonheur, étant de ses proches voisins, de
recueillir demoiselle Marguerite qu’il retenait en sa maison comme en une
étroite prison. Elle n’a plus que vous au monde et nous avons pensé qu’il était
de notre devoir de vous l’amener...
    – Et
vous avez bien fait. Comment vous en remercier ? ... Marguerite... ne
veux-tu pas venir jusqu’à moi ?
    Mais,
déjà, la jeune femme s’était précipitée à genoux devant elle. Son étrange
indifférence venait de s’évanouir d’un seul coup et elle versait d’abondantes
larmes sur les mains tremblantes qui s’étaient tendues vers elle et qui la
relevaient. Un moment, les deux femmes restèrent étroitement embrassées. Debout
à quelques pas, Fiora les contemplait avec un peu d’amertume. L’envie soudaine
lui venait de se jeter, elle aussi, dans ces bras affectueux, d’embrasser ce
visage pâle. Car cette femme était sa grand-mère plus encore peut-être que
celle de Marguerite et elle pensait à présent qu’il devait être bien doux d’être
la petite-fille de Madeleine de Brévailles...
    Mais
celle-ci dominait son émotion. Sans quitter la main de Marguerite, elle offrit
à ses hôtes inattendus un sourire charmant.
    – Vous
me rendez la vie et je ne vous accueille même pas comme je le devrais ! Prenez
place, je vous en prie et racontez-moi tout ce que vous savez de cette enfant.
Je vais faire servir des rafraîchissements en attendant l’heure du repas. On
préparera aussi vos chambres...
    Mais
Fiora émit de vives objurgations :
    – N’en
faites rien, dame, je vous en prie. Nous voyageons, mes compagnons et moi-même,
et ne souhaitons pas nous attarder car la route est encore longue qui s’étend
devant nous.
    – Si
longue soit-elle, elle supportera bien une halte ? Vous avez tant de
choses à m’apprendre...
    – Sans
doute... mais l’on nous a dit que le maître de ce château était malade et nous
ne voudrions pas...
    Au
prix de sa vie, Fiora eût été incapable de dire pourquoi, parvenue dans ce
château avec la décision bien arrêtée d’y abattre Pierre de Brévailles, elle
souhaitait à présent s’en éloigner le plus vite possible. Elle pensait y entrer
en libératrice mais la femme qu’elle avait devant elle ne semblait pas avoir
besoin d’un quelconque secours. Elle en eut même la certitude quand dame
Madeleine déclara paisiblement :
    – Mon
époux est malade, en effet, mais je vous assure que votre présence ne saurait
le déranger. Ne vous tourmentez donc pas pour lui et causons...
    Tandis
que Démétrios faisait pour leur hôtesse le récit – un peu arrangé – du
sauvetage de Marguerite, Fiora qui avait choisi à dessein de s’asseoir le dos à
la luminosité de la fenêtre ne l’écoutait que d’une oreille. Elle scrutait
cette salle aux meubles sévères mais admirablement entretenus. Elle regardait
la table que deux servantes étaient en train de dresser, la nappe d’une
éclatante blancheur qu’elles étendaient et les différents objets qu’elles y
disposaient, tous rutilants. Elle considérait aussi son hôtesse, assise sur une
bancelle garnie de coussins, Marguerite dont elle tenait toujours la main
assise auprès d’elle et ne la quittant pas des yeux. Toutes deux goûtaient
évidemment un moment d’ineffable bonheur. Elles se souriaient, riaient même de
temps en temps comme deux fillettes bien que le récit du Grec ne fût guère
récréatif et leur rire sonnait bizarrement dans une atmosphère que Fiora
trouvait de plus en plus lourde... Elle se sentit sur le point presque d’étouffer
et laissa glisser légèrement son voile. Une des servantes, la plus âgée lâcha
brusquement les couteaux qu’elle tenait et qui résonnèrent sur les dalles
cependant que ses yeux s’agrandissaient de stupéfaction. Dame Madeleine lui
jeta un coup d’œil agacé, puis tourna les yeux vers Fiora et lui dit à mi-voix,
d’un ton futile :
    – Nos
servantes campagnardes sont d’une grande maladresse. Etes-vous mieux servie à
Florence ?
    – Dame
Léonarde vous répondrait mieux que moi à ce sujet mais je n’ai jamais eu à me
plaindre de nos serviteurs...
    – Quelle
chance vous avez !
    Puis,
revenant à Démétrios dont l’œil, entre les paupières resserrées, s’était fait
soudain aigu, enchaîna :
    – Ainsi,
vous disiez que...
    La vue
du visage de Fiora qui venait de frapper de stupeur une simple servante ne lui
causait apparemment aucune

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