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Fiora et le Téméraire

Fiora et le Téméraire

Titel: Fiora et le Téméraire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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l’hospitalité
chrétienne... Faut dire quand même qu’y a eu d’grands malheurs par ici...
    Visiblement,
l’homme ne demandait qu’à bavarder, mais Fiora en savait autant que lui et
sinon plus sur les épreuves qui s’étaient abattues sur les hôtes de ce château.
Elle remercia le paysan au moyen d’une pièce d’argent et, le restant de la
troupe l’ayant rejointe, elle guida résolument son cheval vers les tours
solitaires. Démétrios la rattrapa, prétendant poursuivre sa mise en garde, mais
Marguerite le suivait de près et il était impossible de discuter devant elle.
    Le
brouillard matinal se levait sur le Doubs, laissant voir les tourbillons qui
agitaient l’eau verte. Puis le chemin dévia aux abords du château pour s’engager
dans un petit bois au-delà duquel on peut apercevoir quelques simples maisons
recouvertes de chaume, le petit clocher d’une église... Un sentier envahi d’herbes
folles qui ne portait guère de traces de passage s’ouvrait à gauche et
permettait de rejoindre la petite forteresse. Fiora y dirigea son cheval et
trouva rapidement le pont dormant que le pont-levis devait atteindre pour peu
qu’on l’abattît. Mais dans l’instant présent, celui-ci se dressait, telle une
infranchissable muraille, de l’autre côté d’un large fossé broussailleux que l’eau
de la rivière emplissait presque à ras bord. En face, refermé comme un poing
serré, muet et silencieux comme un tombeau, Brévailles érigeait ses pierres
moroses et fières qui semblaient défier le clair soleil de ce jour d’été...
    Sans
mettre pied à terre, Esteban emboucha la trompe de corne et d’argent qui
pendait à sa ceinture et lança un son prolongé qui fit s’envoler une famille de
martins-pêcheurs. On attendit mais rien ne vint.
    – Est-ce
vraiment là le château de ma grand-mère ? questionna Marguerite qui se
tenait au côté de Fiora.
    – Oui,
pour ce que j’en sais, répondit celle-ci, qu’en pensez-vous ?
    – Rien,
sinon que cela semble bien triste. Notre maison d’Autun ne l’était pas autant.
Pourquoi donc ma mère ne s’y plaisait-elle pas ?
    – Peut-être
parce que l’époux qui l’y faisait entrer n’avait pas su gagner son cœur. Une
chaumière vaut mieux qu’un palais si c’est l’amour qu’elle héberge.
    – Elle
aurait pu m’aimer, moi ? Mais elle ne m’aimait pas, sinon elle ne m’aurait
pas abandonnée... C’était la deuxième fois, depuis qu’elle avait été
recueillie, que Marguerite faisait allusion à Marie. La première, c’était en
parlant avec Léonarde qui semblait lui inspirer une confiance toute
particulière, mais la vieille demoiselle n’avait pas insisté car elle avait cru
s’apercevoir que Marguerite détestait Marie presque autant que son époux. La
cruauté de Regnault du Hamel n’avait épargné à l’enfant aucun détail affreux ou
sordide et, pour elle, sa mère n’était qu’une femme perverse et dépravée qui n’avait
délaissé son foyer que pour assouvir de bas instincts dont elle avait été fort
justement punie. Fiora avait tenté un jour de modifier ce jugement sans
concessions mais Marguerite avait fermé les yeux en affirmant que cela ne l’intéressait
pas... Là était peut-être la raison primordiale pour laquelle Fiora ne
réussissait pas à s’attacher réellement à sa demi-sœur.
    Elle
arrêta le bras d’Esteban qui s’apprêtait à renouveler son appel.
    – Souhaitez-vous
que je vous conduise plutôt dans quelque couvent ? demanda-t-elle.
    Mais
Marguerite secoua sa tête dont les magnifiques cheveux blonds, à présent
propres et sagement tressés, brillaient dans le soleil :
    – Non...
Puisque ma famille habite ici, je n’ai aucune raison de souhaiter vivre
ailleurs. C’est une maison noble et peut-être que l’on m’y aimera...
    C’était
prononcé d’une petite voix tranquille, unie, presque sans intonation et
cependant le cœur de Fiora se serra. Du geste, elle fit signe à Esteban de
réitérer et, pour la seconde fois, la corne lança son mugissement dans l’air
calme du matin.
    Son
insistance fut récompensée. Une tête surmontée d’un casque apparut au créneau
cependant qu’une voix rude criait :
    – Qui
va là et que voulez-vous ?
    – Que
l’on baisse ce pont car nous avons à faire ici, lança Esteban avec une morgue
digne d’un grand d’Espagne qui ne parut d’ailleurs pas produire tout l’effet
escompté.
    – Passez
votre chemin. On

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