Fiora et le Téméraire
partirent sans se retourner, suivis par les soldats. Salvestro
fermait la marche. Quand ils eurent disparu, Campobasso se mit en devoir de
récupérer les pièces d’or qui avaient roulé à terre, les remit dans la bourse
qu’il fit sauter dans sa main avec satisfaction tout en se dirigeant vers la
chambre.
Fiora
dormait toujours dans la masse brillante de ses cheveux en désordre qui
sertissaient son corps charmant.
Le
comte la contempla un instant puis, ôtant ses vêtements, il se glissa auprès d’elle
et, appuyé sur un coude, il se mit doucement à la caresser. Elle gémit, sans
ouvrir les yeux, s’étira pour mieux s’offrir à la main qui glissait sur elle,
dispensatrice d’un plaisir dont elle sentait déjà la chaleur monter au creux de
ses reins. Quand elle commença à se tordre avec une plainte heureuse, il entra
en elle pour la rejoindre dans le spasme suprême…
CHAPITRE
IX L’ARRESTATION
Durant
trois jours et trois nuits, Campobasso et Fiora demeurèrent enfermés dans le
double isolement de leur chambre et des rideaux du lit. Seul Salvestro
franchissait, deux fois le jour, la porte de celle-ci pour apporter des repas
mais sans jamais rien voir de ce qui se passait derrière ceux-là. Galeotto
avait été chargé d’assurer le commandement et de veiller à l’ordre dans
Thionville. Il s’en acquittait avec hargne, serrant les poings quand il lui
arrivait de tourner les yeux vers certaine fenêtre close où il imaginait bien
qu’on ne faisait point pénitence.
Ces
heures ardentes, Fiora les vécut entièrement dans les bras de son amant. Il la
gardait contre lui pour dormir, pour la faire manger et boire et quand, au bout
de vingt-quatre heures, elle réclama un bain, la porta lui-même dans le bassin
que le vieil écuyer avait rempli d’eau fraîche, la lava, la sécha sans cesser
de lui prodiguer caresses et baisers. Quand il ne lui faisait pas l’amour, il
la regardait avec émerveillement, touchait ses paupières, ses lèvres, son cou,
ses seins, ses pieds et ses mains, et lui murmurait des mots d’amour qu’elle ne
comprenait pas toujours.
Jamais
la jeune femme n’avait imaginé qu’elle allait allumer pareille passion. Cet
homme n’était jamais comblé, jamais rassasié et la possession, au lieu d’apaiser
ses sens, semblait les exaspérer et décupler son désir au point, parfois, d’effrayer
Fiora. Il dormait peu et ne la laissait lui échapper dans le sommeil que durant
de courts laps de temps : une heure ou deux après quoi elle le retrouvait
plus affamé d’elle que jamais :
– Tu
es à moi pour toujours, lui dit-il un soir en la serrant à l’étouffer. Je ferai
de toi ma femme...
Prise
de court par cette déclaration inattendue, elle choisit le parti de rire.
– Tu
veux m’épouser ? ... et je ne sais même pas ton prénom...
– Cola...
ici, on dit Nicolas comme le jeune duc que j’ai perdu et que j’aimais servir.
Mais je ne veux de toi d’autres mots que d’amour.
– Je
ne crois pas avoir dit que je t’aimais ? Seulement que tu me plaisais...
– Qu’importe
si ta bouche ne le dit pas ! Ton corps, lui, le crie sans cesse, ton corps
qui m’appelle, ton corps que je fais chanter, vibrer, crier même. Cela vaut
toutes les fadaises des poètes. Et d’ailleurs tu m’aimes déjà sans même t’en
rendre compte...
– Peut-être,
mais tant que je ne m’en rendrai pas compte, je ne t’épouserai pas...
Nouant
ses poings dans ses cheveux il lui tira cruellement la tête en arrière :
– Tu
en aimes un autre ? Dis-moi ! Est-ce que tu aimes un autre homme ?
Allons, réponds !
Emporté
par une fureur subite, il planta ses dents à la naissance de son cou. Les yeux
soudain pleins de larmes, Fiora poussa un cri de douleur...
– Pourquoi
serais-je ici... si c’était le cas ?
Il la
lâcha, vit que des larmes coulaient et que sa peau portait une marque rouge...
– Pardon !
pardon mon amour ! ... Je deviens fou... Tu brûles mon sang et tu me
donnes des joies que je n’ai jamais connues avec aucune femme. Et toi,
dis-moi... un autre homme t’a-t-il jamais donné autant de plaisir ? Dis-moi !
Je veux savoir...
– Non,
murmura Fiora en pensant qu’elle ne mentait qu’à peine car sa nuit de noces
avait été brève auprès de ce déchaînement de passion, de cette orgie d’amour qu’elle
vivait et qui l’épuisait mais qui, curieusement, lui rendait toute sa présence
d’esprit.
Elle
avait
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