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Fleurs de Paris

Fleurs de Paris

Titel: Fleurs de Paris Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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affreusement lasse…
    Lorsque La Veuve se trouva dehors, elle
traversa rapidement la place Vendôme, et, au coin de la rue de la
Paix, retrouva Finot qui l’attendait.
    – Trouvez-vous donc ce soir aux abords de
l’Opéra, ou même à l’intérieur, si vous pouvez, dit La Veuve de sa
voix morne et indifférente.
    – Parfait ! Un mot, La Veuve.
Savez-vous qui est ce comte de Pierfort ?
    – C’est le comte de Pierfort, voilà tout,
dit La Veuve dardant sur l’agent son regard d’une étrange
clarté.
    – C’est Charlot ! dit tranquillement
Finot.
    – Vous êtes fou… fit La Veuve en haussant
les épaules.
    – J’en mettrais ma main au feu, dit Finot
en dévisageant La Veuve.
    – En attendant, souvenez-vous que le
comte de Pierfort vous est sacré : tant qu’on vous paye, vous
n’avez pas le droit d’y toucher. Après… on verra ça.
    – C’est bon. En attendant, aussi, je ne
le perds pas de vue.
    Demeurée seule, Adeline avait commencé à se
déshabiller. Elle semblait très calme. Mais la pâleur de son front,
l’éclat fiévreux de ses yeux démentaient ce calme apparent. Tout à
coup elle s’arrêta dans l’opération compliquée, et s’approcha de
l’appareil téléphonique. Dix minutes, Adeline, en proie à quelque
sombre rêverie, demeura assise devant l’appareil.
    Enfin, d’un geste brusque, elle appela. Et au
coup de réponse, elle demanda l’office de location.
    Quelques instants plus tard, elle était en
correspondance avec l’office de location.
    – Il me faut une loge ce soir, à
l’Opéra.
    – Si vous voulez donner votre adresse, on
va vous l’apporter…
    – Comtesse de Damart, Impérial-Hôtel.
    – Dans cinq minutes, le coupon sera chez
vous…
    Adeline laissa retomber lourdement le
récepteur, et, front dans la main, demeura là, accoudée, immobile,
ne sachant ni ce qu’elle voulait, ni ce qu’elle devait décider. Un
instant, elle fut tentée de contremander la loge. Mais elle songea
que rien ne la forçait à aller occuper cette loge.
    Au bout de dix minutes, un employé de l’office
de location fut introduit, et, contre deux mille francs, remit le
coupon. Adeline regarda le numéro. Elle connaissait parfaitement la
salle, et vit qu’elle serait placée de manière à voir très peu le
spectacle, mais aussi de manière à embrasser la salle d’un coup
d’œil.
    Elle en éprouva comme une vague
satisfaction.
    Mais presque aussitôt, cette satisfaction même
disparut, et Adeline se jeta sur son lit, sanglotante, mordant les
oreillers pour étouffer ses cris.
    La crise fut effrayante. D’abord ce ne fut
qu’une douleur violente, sincère, qui lui broyait le cœur et finit
par tordre le corps entier, comme une souffrance matérielle. Il lui
sembla réellement que ce cœur qui sautait dans sa poitrine se
déchirait, et peut-être, en effet, l’excès de souffrance morale
était-il sur le point de déterminer quelque accident cardiaque.
Puis, brusquement, la douleur se transporta du cœur à la gorge, et
il lui parut alors qu’elle allait étouffer, qu’une boule
volumineuse placée dans la gorge arrêtait l’air au passage. Puis,
la douleur, par une saute également brusque, monta à la tête, et il
lui sembla qu’on lui posait sur le crâne une calotte de plomb d’un
poids extraordinaire ; puis, cela devint un cercle qui serrait
les tempes à les faire éclater, puis, enfin, il lui sembla que
chacun de ses cheveux devenait une aiguille chargée
d’électricité.
    Dans cette période de la crise. Adeline ne
songea qu’à elle-même, et ne cessa de râler :
    – Comme je suis malheureuse ! Est-il
possible qu’une femme souffre autant que je souffre !…
    Et tout à coup, la vision de Gérard et de Lise
passa dans son imagination enflammée. Alors la rage remplaça la
douleur, ou plutôt la première forme de douleur. Elle se redressa,
tendit ses mains crispées vers lui… lui surtout ! et la
sensation qu’elle l’étranglait lui rendit enfin un peu de
calme…
    Elle put pleurer paisiblement, ou du moins il
lui parut qu’elle était alors paisible.
    Assise au bord de son lit, le talon sur la
bordure du bois, le coude sur le genou, le menton dans la main, les
cheveux en désordre, belle de sa douleur aux attitudes impudiques,
laissant couler une à une des larmes qui s’évaporaient sur ses
joues, oui ! belle et farouche comme la Niobé antique, elle
regardait douloureusement de ses yeux fixes des êtres absents,
évoquant

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