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Fleurs de Paris

Fleurs de Paris

Titel: Fleurs de Paris Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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manoir, il redevint
maître de sa pensée. Et il jugea qu’il allait être arrêté, jugé,
exécuté… et qu’Adeline lui échappait !…
    – Mourir ! répéta-t-il avec ce même
éclat de rire sauvage. Mais je ne mourrai pas seul !…
    Adeline était dans ses bras.
    Il l’étreignit convulsivement, et, la
soulevant, marcha tout droit au balcon. Adeline comprit !…
    Et elle, ne fit aucun effort pour
échapper !…
    Seulement, elle noua ses bras autour du cou de
Gérard, et, au moment où ils sautaient dans le vide, ses lèvres,
pour la première fois, se posèrent sur ses lèvres dans un baiser
furieux, dans une morsure de passion qui ensanglanta leurs
bouches.
    *
* * * *
    – Oh ! laissez-moi passer !… Je
vous dis que c’est mon mari qui est là !…
    – Allons, filez ! ou je vous
arrête !…
    La voix de Lise était pleine de supplications
et de sanglots. La voix de l’agent était rogue et impérieuse.
Repoussée de ce coin par où elle essayait d’atteindre le manoir,
elle alla plus loin, mais toutes les mesures étaient bien
prises ; le château était bien cerné. D’agent en agent, la
malheureuse fit repoussée jusqu’aux rochers qui bordent la mer.
    Là, elle put longer le pied du manoir.
    Ce côté n’était pas surveillé, car une évasion
était impossible par là.
    – À moins de piquer une tête dans
l’Océan, d’une hauteur de quarante mètres ! avait dit le chef
de la Sûreté.
    Il n’avait pas pensé à une chose : c’est
qu’un homme sur le point d’être pris, sur le point d’être accablé
par le déshonneur ou de succomber au châtiment des hommes, peut
toujours s’évader dans la mort.
    Lise, de roc en roc, se mit à marcher le long
de la mer, sur l’étroite bordure qui sépare l’Océan des assises du
manoir.
    Comment elle était là ? Comment elle
avait fait le voyage ? Ce qui lui était arrivé depuis que,
dans la cellule de La Veuve, elle avait appris quel danger courait
Gérard ? Comment enfin elle avait pu venir de Brest à
Prospoder ? Elle ne le savait pas !
    Elle était là, voilà tout !…
    Et elle ne comprenait qu’une chose :
c’est que Gérard était dans le manoir, c’est que les agents de la
Sûreté entouraient de toutes parts le vieux château !…
    Elle hochait machinalement la tête, et
souriait d’un sourire navrant en se rappelant que son bien-aimé lui
avait proposé de l’emmener à Prospoder dès qu’il serait réconcilié
avec son père. Mais, de temps en temps, elle levait ses yeux
déments vers les quelques fenêtres, là-haut, tout là-haut, qui
donnaient sur la mer, et alors, son cri déchirait l’espace et
faisait frissonner de pitié les gens qui, de loin, étaient
accourus, au bruit qu’il se passait quelque chose d’étrange au
château.
    Tout à coup, elle dut s’arrêter : la
marée montait et déferlait sur les rochers.
    Mais son hésitation dura peu ; elle entra
dans la mer en murmurant :
    – Il faut que j’aille… J’arriverai !
oh ! j’arriverai !…
    Une dernière fois, elle cria.
    Et à ce moment, à quelques pas d’elle, quelque
chose tomba avec un bruit sourd. Lise s’arrêta, les yeux exorbités,
la bouche ouverte, grelottante, sans autre sentiment que celui
d’une volonté farouche, la volonté de démence dernière qui la
poussait maintenant à rejoindre les deux corps qu’elle
reconnaissait.
    Gérard et Adeline étaient tombés sur un
rocher, et la mort avait dû être instantanée.
    Presque aussitôt une vague déferla, les
saisit, et les emporta frénétiquement enlacés dans leur baiser de
mort.
    Pendant près d’une minute, les deux corps
furent visibles à la surface de l’Océan, mais ils s’écartaient de
plus en plus de la ceinture de rochers.
    Lise entra dans l’eau. Elle se mit à
descendre. Elle bégayait :
    – J’arriverai ! oh !
j’arriverai !… Je le rejoindrai !… Gérard ! je suis
là !… Attends-moi… Gérard !… je t’aime… je…
    Un violent reflux des vagues, soudain,
l’enveloppa et I’emporta vers les deux corps, vers Gérard, vers
celui qu’elle avait adoré d’un amour si pur, si chaste, si absolu…
Un instant encore, elle put tendre ses bras vers lui… Puis,
brusquement, elle disparut dans le mystère de l’Océan et de la
mort, à la seconde où les cadavres de Gérard et d’Adeline enlacés
coulaient à pic…
    *
* * * *
    Trois mois après ces événements, Jean Nib et
Rose-de-Corail s’embarquèrent pour

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