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Fleurs de Paris

Fleurs de Paris

Titel: Fleurs de Paris Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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l’avait vue pour la dernière fois, là-bas, sur la route des
Ponts-de-Cé. Elle portait sa petite jupe de lainage noir et était
enveloppée du grand fichu de laine.
    Et, toute petite qu’elle était, elle
entraînait sa mère, malgré sa résistance furieuse. La Veuve
grondait, menaçait, se débattait… mais sa fille était la plus
forte.
    Et tout à coup, elle se retrouva toute seule
dans une cellule de prison. Les yeux de La Veuve s’emplirent
d’épouvante, elle se jeta d’un bond au milieu de la pièce et prêta
l’oreille :
    – Ils viennent !… Ils vont me
prendre !… Je ne veux pas !… Laissez-moi
vivre !…
    Elle se traîna à genoux dans un angle ;
elle claquait des dents, elle grelottait, des gémissements fusaient
de ses lèvres livides… et la porte de la cellule où elle se
trouvait s’ouvrit doucement… Plusieurs hommes entrèrent ; l’un
d’eux, vêtu de noir, s’approcha d’elle et la toucha à l’épaule, en
lui disant d’une voix infiniment triste :
    – Courage, La Veuve ! votre pourvoi
en grâce est rejeté…
    – Oh ! bégaya La Veuve dans un
effort désespéré, aurez-vous donc le courage de me tuer ?… Et
vous êtes des hommes ! Vous n’avez donc pas de cœur,
misérables ! Vous êtes là à dix ou vingt pour me tuer !
Oh ! les lâches !… Vous aurez beau dire et beau
faire !… Vous avez beau jurer que ce n’est pas vous qui me
tuez… que c’est la loi… vous êtes des assassins !… Assassins,
sans courage, car vous ne risquez rien ! Lâches !…
Laissez-moi ! Je vous dis que je ne veux pas ! À
moi !…
    Quatre hommes rudement l’empoignaient, la
mettaient debout, l’entraînaient… Elle écumait, elle se débattait
avec une violence effrayante… et tout à coup, elle se trouva dans
la chambre de toilette ; elle entendit crier les
ciseaux ; elle vit tomber ses cheveux autour d’elle, et les
aides du bourreau commencèrent à la ligoter…
    – Plus de cheveux ! râla-t-elle en
portant les deux mains à sa tête. Oh ! mais c’est donc
vrai ! ils vont me tuer ! Oh ! les lâches !…
Mon bon monsieur, grâce, ayez pitié d’une pauvre vieille !
Qu’est-ce que ça peut vous faire que je vive !… Oh ! vous
me faites mal ! ces cordes ! Oh ! l’abominable
lâche ! Le hideux assassin qui tue sans danger, pour un peu
d’argent !… Tiens ! lâche !
    Elle cracha au visage du bourreau. Mais le
bourreau s’essuya paisiblement et fit un signe.
    Alors d’effroyables hurlements éclatèrent. La
Veuve se mit à bondir, les yeux fulgurants, la bouche contractée
par un rictus de mort, les griffes en arrêt, échevelée, hagarde,
une mousse de sang au coin des lèvres.
    Et, sur un signe de l’exécuteur des hautes
œuvres, plusieurs hommes firent irruption dans la cellule.
    (
Irruption réelle dans la vision :
ces hommes, c’étaient les gardiens appelés par le médecin, au
moment où celui-ci vit que la malheureuse folle allait se briser la
tête contre les murs. Les gardiens entourèrent la folle, parvinrent
à lui passer la camisole de force et à l’entraîner vers la cellule
des furieux. Voici comment, ces faits de la réalité se traduisirent
dans la vision de La Veuve
.)
    Au geste du bourreau, les aides entrèrent en
courant et s’emparèrent d’elle. Une terreur comme on n’en éprouve
jamais dans la vie fondit sur La Veuve. Elle sentait cette terreur
dans son être entier. Il lui semblait que son sang dans ses veines
charriait l’épouvante. Sur ses lèvres blanches et rouges de mousse,
il n’y avait plus qu’un long hurlement de bête égorgée. En peu
d’instants, elle vit s’ouvrir la porte, et la guillotine lui
apparut.
    – La Veuve !… La Veuve !… La
Veuve !…
    Ce fut trois fois un cri bref et rauque ;
puis, une clameur stridente ; elle s’arc-bouta, chercha à
mordre, chercha à se défendre des ongles ; mais les aides la
maintenaient solidement, et tout à coup, elle fut couchée sur la
bascule.
    (
Les gardiens de l’hospice venaient de la
coucher sur un matelas
.)
    D’un effort plus violent que celui des forces
humaines, La Veuve, à ce moment, put redresser la tête.
    Et, au-dessus d’elle, elle vit luire le
couteau… Elle voulut hurler encore elle ne savait quoi, une clameur
d’insulte ou de miséricorde, mais sa langue s’embarrassa et elle
entrevit le bras du bourreau se lever vers le bouton du déclic… Et
l’énorme couperet se mit en route le long des bras rouges

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