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Fleurs de Paris

Fleurs de Paris

Titel: Fleurs de Paris Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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étage, juste au-dessus.

Chapitre 21 MODERN’ PASSE D’ARMES
    À peu prés vers l’heure où, dans le galetas de
La Veuve, Marie Charmant racontait son histoire à Lise, deux
personnages de ce récit, presque dans le même instant, se livraient
à la même occupation : ils écrivaient une lettre. Seulement,
la lettre de l’un était un assassinat ; la lettre de l’autre
était un acte de foi rayonnante. Ces deux personnages, c’étaient le
marquis Robert de Perles et Anatole Ségalens…
    Très froid, très sûr de la victoire, le
marquis n’en prenait pas moins toutes les précautions
nécessaires ; une vingtaine de lettres adressées à des amis de
cercle, à des maîtresses, une note pour son majordome, un
volumineux paquet pour son notaire attestaient que Robert de
Perles, à la veille d’un duel, admettait toutes les
éventualités.
    En veston d’intérieur, un sourire sceptique au
coin des lèvres, très élégant, il s’était occupé de ces ultimes
devoirs en fredonnant des airs qu’il avait entendus dans un
bouiboui de quartier où il était alors de très bon ton de se
montrer. Il acheva une liste de cadeaux distribués à ses
domestiques, écrivit au-dessous : « Pour mon valet de
chambre », épingla le feuillet à la liasse qui encombrait sa
table, inspecta ces divers papiers d’un dernier coup d’œil
satisfait, et murmura :
    – C’est tout ?… Bonsoir !
    Il se leva brusquement, se mit à se promener
de son pas régulier, souple et ferme. Ses traits s’étaient
contractés. Une pâleur soudaine avait envahi son visage. Une sorte
de tic nerveux faisait passer de rapides frissons sur son
front.
    – Non ! ce n’est pas tout !
gronda-t-il, sourdement. Cette lettre encore !… Il faut que je
l’écrive !… Il le faut !… Quoi ? qu’ai-je à
dire ?… Ce serait une lâcheté ! Il haussa violemment les
épaules, et, comme dans une explosion de rage :
    – Qui le saura ?… Une
lâcheté ?… Et quand même on le saurait… Moi mort,
qu’importe ?…
    Plus sourdement, avec un rictus féroce qui
étonnait sur ce visage impassible et qui était peut-être sa
véritable expression sous le masque d’homme du monde :
    –De lâchetés ! Il y en a quelques-unes
dans ma vie !… Mais un monsieur qui a eu dix duels heureux ne
peut être un lâche… Et puis…, et puis… oh ! savoir que, si je
mourais, cet homme la tiendrait dans ses bras comme je l’ai tenue,
que les baisers d’Adeline seraient pour ce misérable !… Il
s’assit, saisit la plume, et, d’un trait, sans s’y reprendre,
écrivit :
    « Monsieur,
    Il est juste que vous sachiez,
vous
et pas d’autres, pourquoi je me suis battu, pourquoi j’ai été
touché et pourquoi suis mort. J’aime la femme qui porte votre nom,
et je n’ai pu supporter que de mes bras elle passât à ceux de mon
rival et adversaire. »
    Il signa et traça la suscription :
    « 
À M. le baron. Gérard
d’Anguerrand
 »
    – Baptiste ! appela-t-il, sans
hausser la voix.
    Le valet de chambre apparut.
    – Baptiste, dit le marquis, je me bats en
duel demain matin. Vous voudrez bien me réveiller à sept heures. Si
je suis tué, vous ferez parvenir tout cela dans la journée.
Allez.
    Le valet de chambre fit un mouvement pour se
retirer.
    – Attendez ! reprit le marquis.
    Il eut une dernière hésitation, rapide comme
ces flambées d’horizon qui, les soirs d’orage, illuminent tout à
coup le ciel noir… et il saisit la lettre destinée à Gérard.
    – Celle-ci à part, dit-il. Vous la
garderez sur vous, et, si je suis tué, vous la remettrez sur le
terrain même au destinataire qui est mon témoin.
    *
* * * *
    Anatole Ségalens, lui aussi, écrivait.
    La plume courait sur le papier, tandis qu’une
fièvre lui battait les tempes et qu’un sourire très doux illuminait
son visage.
    Et voici ce qu’écrivait Anatole
Ségalens :
    « Mademoiselle,
    Pour des raisons qu’il serait trop long de
vous expliquer, il est possible que je m’en aille pour toujours, et
alors jamais plus nous ne nous reverrions. C’est en prévision de
cette éventualité possible que je vous écris. Vous trouverez dans
cette enveloppe le gardénia que vos mains ont épinglé à mon habit.
Cherchez sur cette fragile fleur déjà fanée le secret que d’un
regard si fier vous avez arrêté sur mes lèvres : je vous
aimais ; mademoiselle… Que faut-il vous dire de plus ?
Rien, sans doute, sinon ceci : je vous aimerai aussi

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