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Fortune De France

Fortune De France

Titel: Fortune De France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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dit :
    — Allons,
compagnons, tout est à nous !
    Et
entraînant derrière lui les fantassins espagnols, il mit à vaudéroute
l’infanterie protestante. Condé fut blessé à la main et capturé. Les huguenots
fuyaient. À quatre heures tout paraissait fini.
    C’est
à ce moment que surgirent, sur la droite de l’armée victorieuse, mille reîtres
et trois cents gens d’armes que Coligny avait réussi à rallier. Ils enfoncèrent
la cavalerie catholique, mais ne réussirent pas à entamer le bataillon, hérissé
de piques, des vieilles bandes françaises. Coligny se retira mais, nul ne
l’ignorait, il n’était jamais si grand que dans les défaites et les retraites.
    Guise
n’osa pas le poursuivre trop avant. D’ailleurs, il était vainqueur, plus qu’il
n’avait espéré, et de ses ennemis, et de ses rivaux : le connétable était
prisonnier et le maréchal de Saint-André était mort. Le triumvirat se réduisait
désormais à lui seul. Le bel archange rouge de l’Église catholique était
devenu, du même coup, l’unique pilier du trône.
    Il
écrivit à Catherine de Médicis de belles lettres où il lui détailla, avec mille
formules de respect pour elle-même et le Roi, sa belle victoire de Dreux. Mais
cela ne lui suffit pas. Un mois plus tard, il vint à Blois trouver la Reine
mère alors qu’elle se préparait à dîner, et lui demanda si, après le repas, il
lui plairait de lui donner audience.
    — Jésus !
Mon cousin ! dit la Reine, étonnée et feignant encore plus de l’être. Que
me demandez-vous là ? Une audience ! Et pour quoi faire ?
    — Je
voudrais, dit Guise, vous représenter devant la Cour tout ce que j’ai fait
depuis mon partement de Paris avec votre armée.
    — Mais,
mon cousin, je le sais. Vous m’avez tout dit par vos lettres.
    — Madame,
dit Guise avec un tranquille aplomb, je voudrais vous le dire de ma bouche, et
vous présenter aussi tous les bons Capitaines et serviteurs du Roi et de
vous-même, qui se sont si vaillamment battus pour vous à Dreux.
    La
Reine accepta ce qu’elle ne pouvait refuser avec son accoutumée et souriante
bonne grâce. Et le repas fini, Guise apparaissant de nouveau devant elle en son
satin cramoisi, et entouré de ses Capitaines comme un roi de ses ministres, fit
à la Reine et à Charles IX une profonde révérence, et commença son récit
épique avec une éloquence naïve et des arrière-pensées qui ne l’étaient pas
tant.
    La
Reine mère l’écoutait, lui souriant de ses gros yeux dilatés, et grinçant des
dents derrière ses bonnes joues rondes. Elle avait compris que Guise avait
trouvé le moyen de gagner deux fois la bataille de Dreux : la première
fois sur le terrain. La deuxième fois en la racontant devant la Cour.
    La
harangue de Guise finie, la Reine fut prodigue pour les Capitaines et leurs
chefs, en sourires, en grâces, en affectueux remerciements, et en expression
d’éternelle gratitude. Mais elle poussa un profond soupir quand elle vit
s’éloigner Guise et ses glorieux soudards. Elle n’aimait ni la guerre ni les
généraux ambitieux. Il ne lui échappait pas que Guise avait trop grandi, et
qu’en somme, le pilier du trône soutenait moins le trône qu’il ne l’ébranlait.
    Quant
au récit des exploits de Dreux, il ne lui passait pas le nœud de la gorge. Aux
batailles, la Florentine préférait la diplomatie, et celle-ci, pour elle, ne
comportait que trois moyens : la négociation, le mariage princier, et
l’assassinat politique.
    Notre
ami, parent et allié, François de Caumont  – je dis bien François, qui
était l’aîné, et non pas Geoffroy, l’abbé de Clairac  – assistait, parmi
les courtisans, à cette harangue, comme je l’appris plus tard par ses
serviteurs. Il était venu à la Cour pour se plaindre de Montluc, qui lui avait
pris son château des Milandes, avait rançonné l’abbaye de son frère et dévasté
les terres de son beau-frère, le Baron de Biron.
    Le
moment de cette plainte était, certes, fort mal choisi, Guise étant si haut.
Mais François n’en voulut démordre. Et la Reine n’osant le recevoir, Guise
étant encore sous son toit, l’aîné des Caumont eut l’étrange idée de s’adresser
plutôt à Dieu qu’à ses saints, et demanda une audience au duc. C’était
proprement s’aller fourrer dans la gueule du loup.
    Guise
accorda l’audience, entouré de sa Cour, et, le visage froid et royal, écouta en
silence les plaintes de François de

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