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Fortune De France

Fortune De France

Titel: Fortune De France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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un chemin. Sans vos
chiens, mais on ne m’en avait pas parlé, Mespech était pris.
    — Qu’est-il
advenu d’eux ?
    — Telle
était leur férocité que nous avons dû les occire.
    Il
y eut un silence assez lourd et Sauveterre dit :
    — Je
suppose que vous n’avez jamais rencontré M. de Fontenac ?
    — Seulement
son majordome. Un Italien, un nommé Bassano. J’ai rendez-vous avec lui au lever
du soleil à la Flaquière pour aviser.
    — Où,
à la Flaquière ?
    — Le
gros noyer à la croisée des chemins.
    — Irez-vous ?
    — Point,
si vous me baillez vingt-cinq livres.
    — Dix,
dit Sauveterre.
    — Fi
donc ! dit le Roume. Monsieur, nous n’allons pas marchander !
    — Que
perdez-vous à ne pas y aller ? Bassano n’aura pas d’argent sur lui,
puisque vous avez échoué.
    — Ce
n’est pas tant ce que je perds, dit le Roume. C’est ce que vous gagnerez en y
allant à ma place.
    Sauveterre
ne discuta pas plus avant, et les vingt-cinq livres furent acheminées, par les
mêmes voies, jusqu’au Roume.
    — Vous
me trouverez fidèle à mes engagements, dit le Roume. Et j’espère que vous serez
fidèle aux vôtres.
    — Assurément.
Où renverrai-je votre otage, dans quarante-huit heures ?
    — Il
sait où me retrouver. Je vous salue, monsieur le capitaine, dit le Roume. Je
regrette que la nécessité de survivre et de nourrir ma tribu me contraigne à
ces vilenies, car je suis bon chrétien, et j’aspire comme tout un chacun à
trouver grâce après ma mort auprès du Seigneur.
    — Monsieur,
dit Sauveterre non sans effort, personne ne peut préjuger du jugement de Dieu.
Mais si votre salut vous tient à cœur, je souhaite que vous soyez sauvé.
    Ici,
Jonas murmura quelque peu, mais Sauveterre d’un geste sec de la main le fit
taire, et le Roume dit en quittant le ton de persiflage qui avait été le sien
depuis le début :
    — Je
vous remercie, monsieur le capitaine. Je me souviendrai de votre vœu.
    Le
Roume et les siens partirent comme ils étaient venus, à la nage, leur arquebuse
au-dessus de leur tête. Puis on entendit dans le lointain les sabots des
chevaux et les grincements des charrettes qui avaient dû les amener à proximité
de Mespech.
    Quand,
sur l’ordre de Sauveterre, Jonas descendit dans l’île pour délier l’otage et le
décapuchonner, car un voile le recouvrait de la tête aux pieds, il eut une
surprise heureuse : il se trouva devant une fille dont la beauté brillait
sous la lune. Sa chevelure était brune, son œil noir brillant, sa lèvre
épanouie, sa charnure vigoureuse.
    Jonas,
l’ayant déliée, la regarda sans mot dire du haut de sa grande taille. Et la
garce, levant le museau d’un air hardi, lui dit :
    — Eh
bien, qu’attends-tu pour me forcer ? N’est-ce pas là ton droit de
guerre ?
    — Et
point ne m’en manque l’envie, dit Jonas qui, fort ému déjà, le fut davantage
par cette effronterie, d’autant qu’il était travaillé par sa longue chasteté
dans la grotte de la carrière. Il ajouta, carrant ses herculéennes
épaules : et à toi aussi, je pense.
    — Je
me défendrai bec et ongles, dit la garce, mais avec le ton de quelqu’une qui,
après un beau combat, se prépare à être vaincue.
    — Es-tu
donc pucelle ? dit Jonas. Vivant avec ces Roumes, est-ce possible ?
    — Oh,
ce n’est pas ce que tu crois ! Ils ont leurs lois et leurs rites. Et par
la Vierge, c’est vrai que je suis pucelle.
    — Ne
jure pas ici, Roume, dit Jonas en baissant la voix. Et moins encore par la
Vierge ! Quel âge as-tu ?
    — Quatorze
ans.
    — Il
serait temps, dit Jonas avec un soupir.
    Il
reprit :
    — Et
nous aussi, à Mespech, nous avons nos lois et nos rites. Il faut dire oui
devant le curé  – ou le ministre : ce qui, à mon sens, n’est que
farce et batellerie, la nature parlant si haut. Mais qu’y faire ? Je n’ai
point inventé nos coutumes. Ma mie, si je te forçais, le capitaine me donnerait
mon congé et je crèverais à nouveau la faim. Excuse-moi, jolie renarde, mais il
me faut d’abord nourrir mon grand corps : la panse passe avant la danse.
    — C’est
donc que le capitaine me garde pour lui ! dit la garce avec une ondulation
de la croupe et en rejetant en arrière d’un mouvement vif sa crinière de
cheveux noirs.
    — Ne
crois point cela ! dit Jonas en riant de bon cœur.
    Il
reprit à voix basse :
    — Pour
le capitaine, toute femme est piperie et perdition de l’âme. Le capitaine

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