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Fortune De France

Fortune De France

Titel: Fortune De France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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rogue.
    — Pas
si nous attendons de nouveau la nuit noire pour nous retirer ! Et puis,
reprit le capitaine des Roumes, il nous reste encore quelques gages. Nous
pourrions, en partant, brûler vos remises de l’île, ainsi que les charrettes et
araires qu’elles abritent. Et nous pourrions aussi en passant par Taniès mettre
le feu au bois de châtaigniers dont vous tirez de si beaux tonneaux...
    Ici,
la Maligou qui, dès que les arquebusades avaient cessé, était accourue avec la
Gavachette sur les bras, dit à voix basse que le Roume était le plus beau des
hommes, et que si ce Roume, qui était pourtant étranger au pays, connaissait si
bien Mespech, c’était par magie et sorcellerie.
    — Ma
mie, lui dit Sauveterre d’une voix basse et furieuse, je m’étonne que votre pot
soit bon. Car vous n’avez pas dans votre tête autant de cervelle qu’il en
faudrait pour cuire un œuf !
    Et
il la renvoya rudement à sa cuisine. Elle s’en fut sans mot dire, plus
échevelée que jamais, avec des croix et des signes et les fesses tremblotantes.
    — Eh
bien, monsieur, dit Sauveterre après un long silence. Que proposez-vous ?
    — Cinq
cents livres pour lever le siège du château et quitter la région sans navrer
vos forêts, vos bâtiments et vos tenanciers.
    — C’est
une somme considérable.
    — Allons,
allons, monsieur le capitaine, dit le Roume en souriant. C’est une somme qu’en
vos coffres vous avez en triple ou en quadruple ! L’année a été profitable
pour vous en prêts de grains, sans compter la vente des tonneaux et celle des
pierres appareillées de votre carrier !
    Sauveterre
sentit que la discussion serait inutile et que le Roume ne rabattrait pas d’un
sol.
    — À
supposer que je vous verse cette rançon, dit-il, qui me garantit que vous allez
foi garder ?
    — Ma
parole, dit le Roume avec fierté.
    — On
ne mange point de rôt à la fumée, dit Sauveterre. Je ne me nourris pas de
promesses.
    Le
Roume rit.
    — Je
vous laisserai donc en partant un otage, que vous me renverrez au bout de quarante-huit
heures écoulées.
    — Soit,
dit Sauveterre, à condition que vous me révéliez qui vous a si bien renseigné
sur Mespech.
    Le
Roume rit de nouveau.
    — Monsieur
le capitaine, vous n’aurez rien pour rien ! Ce renseignement lui-même vaut
cinquante livres de plus.
    — Je
les donnerai, dit Sauveterre après un moment de silence.
    — Dès
que j’aurai les cinq cent cinquante livres, reprit le Roume, je lierai l’otage
au poteau de dressage de vos chevaux et je vous dirai ce que vous voulez
savoir.
    Il
y eut un moment de silence, et le Roume dit d’une voix changée :
    — Il
me manque trois hommes. Les avez-vous ?
    — Oui,
dit Sauveterre, ils ont été occis en mettant le pied sur nos remparts. Je les
ferai porter en terre chrétiennement et sans les mutiler.
    — Mais
ce n’est pas moi qui mutile ! dit le Roume avec vivacité. Ce sont les
quelques Maures que j’ai dans ma troupe. Quand ils tuent un ennemi, ils
désirent lui ôter à la fois le bonheur de la vie et l’honneur d’être un homme.
    — On
ne peut avoir le second sans le premier, dit Sauveterre. La mutilation est donc
inutile. Et vos Maures n’en pissent pas plus roide.
    — Pardi,
vous avez raison, dit le Roume. Mais je ne les convaincrai pas.
    — Liez
votre otage, dit Sauveterre. Je vais quérir l’argent.
    Le
sac de jute contenant les cinq cent cinquante livres dut être lourd au cœur de
Sauveterre quand il fut pendu par une cordelette hors du fenestrou de la petite
tour qui commandait l’entrée de l’île, et balancé de façon à atterrir de
l’autre côté du bras d’eau qui nous séparait d’elle. Le Roume s’en saisit,
compta nos bonnes livres tournois à la clarté de la lune. Si jeune que je
fusse, je trouvai une furieuse injustice à voir Mespech ainsi rançonné.
    — Eh
bien, monsieur, ces renseignements ? dit Sauveterre.
    — Monsieur
le capitaine, dit le Roume, vous avez un bon voisin, et qui vous aime. Il m’a
fait remettre cinq cents livres, à charge pour moi d’attaquer Mespech, et
promesse de cinq cents livres en plus si je réussissais ! Je guerroyais
sans beaucoup de profit du côté de Domme, quand son majordome m’a atteint, et
m’a tout dit sur Mespech, sa garnison, ses ressources et ses chausse-trapes en
quinconce, une fois franchie sa clôture. Et pour n’y pas tomber, nous avons
tout simplement employé des planches, dont nous avons fait

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