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Fourier

Fourier

Titel: Fourier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jonathan Beecher
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des doléances d’une pauvre
civilisée, vous trouverez quelques germes qui en auraient fait une heureuse
harmonienne 58 .
    Bien des aspects de la vie intérieure de Fourier resteront sans
doute à jamais cachés. Mais il est intéressant de voir que l’âge n’a jamais
fait obstacle à ses sentiments ni à son pouvoir d’en inspirer. Fourier a
d’ailleurs noté quelque part que l’une des rares femmes à lui avoir fait
sérieusement envisager le mariage avait quatre-vingts ans quand il en avait
vingt-cinq 59 ! Ce que montrent,
entre autres, les lettres de Désirée Veret, c’est qu’à soixante-deux ans, alors
qu’il passe pour un fou amer et grincheux, Fourier est capable de gagner la
confiance et l’affection d’une femme de quarante ans sa cadette.

VI
    Vers la fin de l’année 1835, la santé de Fourier se détériore de
plus en plus rapidement. Il souffre de troubles digestifs fréquents et se
plaint souvent de crampes, nausées et fièvres. Sa maladie, à laquelle vient
s’ajouter une indifférence croissante, le coupe presque entièrement de ses
disciples : il n’est pas en mesure d’apporter son aide à Victor Considerant
pour le premier numéro d’une nouvelle revue, La Phalange, qui paraît le 10
juillet 1836 60 ; et, bien qu’il
approuve sans l’ombre d’un doute l’auto promotion de Victor Considerant à la
tête du mouvement, il ne prend pas parti (du moins en public) quand Just Muiron
et un groupe de dissidents provinciaux se mettent à protester contre
l’autoritarisme de Considerant et l’intérêt, selon eux démesuré, qu’il porte à
la revue, au détriment des nouvelles tentatives de fouriérisme appliqué*.
    * Emile Poulat a écrit deux bons articles sur les origines
du conflit qui opposa, au sein du mouvement fouriériste, quelques groupes
dissidents de province aux disciples parisiens « orthodoxes ». Voir Emile
Poulat, « Sur deux textes manuscrits de Fourier », in Henri Desroche et al., Etudes
sur la tradition française de l’association ouvrière (Paris, 1956), 5-19, et «
Ecritures et tradition fouriéristes », Revue internationale de philosophie,
XVI, 2 (1960), 221-233. L’histoire du conflit dépasse largement le propos de
cette biographie. Mais il convient de savoir que les choses s’envenimèrent
durant l’été 1836, au moment où La Phalange commençait de paraître, quand Just
Muiron tenta d’organiser ce qui revenait à une société de correspondance, dont
le but était de resserrer les liens entre les divers groupements et cercles
fouriéristes de province. Fin août, Considerant critiqua cette proposition d’«
Union Phalanstérienne » dans un « Mémoire confidentiel » de 123 pages, tandis
que Fourier lui-même écrivait le brouillon d’une lettre à Muiron où il lui
reprochait l’« extrême stérilité » de sa proposition. Voir le brouillon de la
lettre du 26 août 1836 de Fourier à Muiron, AN 10AS 16 (42).
    Fin 1836, l’état de Fourier a empiré et il doit renoncer à aller
chaque jour admirer la garde montante aux Tuileries. Pourtant, il refuse de se
laisser transporter dans un logement plus décent que son appartement humide et
froid de la rue Saint-Pierre-de-Montmartre, et décline obstinément toutes les
offres de soins de ses disciples. Pellarin dira :
    Jamais le malade, lors même qu’il était à toute
extrémité, ne voulut consentir à ce que personne demeurât auprès de lui pour le
veiller. Il s’y opposait de toute la force de sa volonté, qu’il conserva, ainsi
que son intelligence, en pleine intégrité jusqu’au dernier moment. « Je n’ai
pas besoin d’être veillé, répondait-il, j’aime à être seul ; je ne veux pas
donner de la peine pour moi 61 .
»
    Fourier attribue ses troubles digestifs aux boulangers et
négociants en vin de Paris. D’après lui, les négociants en vin sont des «
empoisonneurs publics », tandis que les boulangers dénaturent leur pâte et ne
la font cuire qu’à moitié. Fourier déteste tout particulièrement le pain mal
cuit et le mauvais vin que servent la plupart des restaurants parisiens. Quand
il dîne à l’extérieur, il emporte généralement sa propre bouteille et son pain.
Heinrich Heine se souviendra plus tard de cette habitude singulière : « Combien
de fois ne l’ai-je pas vu flâner sous les arcades du Palais-Royal, avec,
dépassant des poches gonflées de sa vieille redingote grise, d’un côté le
goulot d’une bouteille et de l’autre une grosse miche de

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