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Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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éclata de rire, un son que j’entendais si rarement dans sa bouche que je pris le temps de le savourer avant de regarder en direction de Lucrèce. Elle se tenait un peu à l’écart, sourcils en point d’interrogation et sourire jusqu’aux oreilles.
    — Qui est-ce, Francesca ? As-tu oublié tes manières ? Présente-nous.
    Je m’exécutai, et Rocco esquissa une révérence plus que crédible. Je voyais bien qu’il avait l’approbation de la jeune fille, et mes joues s’empourprèrent ; ce qui était ridicule, car assurément il n’était pas venu me voir simplement pour s’enquérir de mon bien-être. Ce n’était pas comme si l’on était amants, après tout, et enclins à ce genre de sottes fantaisies. Cela n’avait rien à voir.
    — Un verrier, s’exclama-t-elle. Comme c’est fascinant. Je me suis souvent demandé comment étaient créées les merveilles que j’avais entre les mains. Peut-être pourriez-vous me montrer ?
    C’était tout Lucrèce, séductrice et charmeuse comme il se devait, mais sans jamais se départir de son bon cœur.
    Cela fit rire Rocco, qui semblait amusé mais également content, je crois, de savoir que j’avais une amie comme elle. L’espace d’un instant, dans cette cour inondée de soleil, il n’y eut plus que nous – trois jeunes gens enjoués.
    Cela ne pouvait durer, visiblement ; mais bien que fugace, le moment fut agréable.
    Son sourire s’évanouit lorsqu’il revint à la raison. À voix basse, il me dit :
    — Nous devons parler.
    Je hochai la tête et regardai Lucrèce, qui acquiesça à son tour en silence et disparut à l’intérieur du palazzo, non sans avoir auparavant regardé par-dessus son épaule et souri.
    J’emmenai Rocco près de la fontaine.
    — Guillaume est venu me voir, commença-t-il. Il est très inquiet.
    — Notre présence à Sainte-Marie-de-la-Minerve a-t-elle été découverte ?
    La dernière chose que je ne souhaitais, c’était que le gentil frère dominicain ait des problèmes à cause de son acte altruiste envers nous.
    Rocco secoua la tête.
    — Non, pas du tout. Il a entendu parler de quelque chose. (Il jeta un œil autour de lui pour s’assurer que personne ne pouvait l’entendre.) Torquemada serait en route pour Rome.
    J’en oubliai de respirer. De toutes les nouvelles qu’il aurait pu m’apporter en cet instant, c’était la pire. Comme si l’effervescence n’était pas déjà à son comble dans la cité, allait-il falloir à présent supporter la présence du Grand Inquisiteur d’Espagne, l’un des principaux artisans de l’édit qui avait expulsé les juifs au départ ? Un fanatique sans pitié, en comparaison de qui Morozzi était le plus doux des agneaux ?
    — Mais pourquoi ? Pour quelle raison viendrait-il ici maintenant ?
    — Guillaume n’en est pas sûr, mais d’après ce qu’il se dit à l’église, il semblerait qu’il vienne pour s’assurer que le prochain pape sera disposé à prendre des mesures contre les juifs.
    — Alors, il vient pour faire échouer Borgia.
    Rocco eut l’air sceptique.
    — Peut-être, mais le bruit court que Ferdinand d’Espagne était sur le point de se raviser concernant la publication de l’édit, et donc d’annuler l’expulsion des juifs, en échange d’une immense somme d’argent qu’ils étaient prêts à lui verser. À en croire la rumeur, juste au moment où le roi s’était décidé, Torquemada a fait irruption dans la pièce et a jeté un crucifix à terre en demandant à Ferdinand s’il voulait vraiment devenir le nouveau Judas. Cela a suffi à le retenir, et c’est comme ça que l’édit a été promulgué.
    — Borgia n’est pas Ferdinand.
    Si Torquemada pensait réussir à dissuader le Cardinal de prendre l’argent des juifs en le menaçant de damnation éternelle, la réalité allait se rappeler brutalement au Grand Inquisiteur. Car tout prince de l’Église qu’il était, Borgia ne s’était jamais caché d’être un séculier. Certains iraient même jusqu’à dire qu’il montrait une tendance à l’impiété, et ils n’auraient pas nécessairement tort. Après tout, on parlait de l’homme qui avait semblé parfaitement à l’aise déguisé en Jupiter.
    — Le Cardinal a le plus grand mépris pour Torquemada et tout ce qu’il représente, rassurai-je Rocco. Je l’ai entendu le dire moi-même.
    Et à plus d’une reprise. Borgia pouvait être le plus discret et le plus habile des hommes politiques, mais sur

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