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Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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ses distances tout en manœuvrant pour tirer le plus d’avantages possibles de la situation.
    — Ce ne sera pas chose facile, reprit César. Les juifs ont tenu parole : la somme dont vous aviez convenu ensemble est bien là. S’agissant des finances, le problème est réglé.
    Par la suite on a raconté que les juifs avaient versé pas moins de quatre cent mille ducats d’argent à Borgia, une somme fabuleuse pour donner, en échange, une forme de sérénité à un peuple vilipendé de toutes parts. Je ne peux confirmer la véracité de ces propos, mais le fait que Borgia ait jugé bon d’envoyer César surveiller de près l’encaissement était en tout cas révélateur.
    Le bruit a également couru que c’est la méfiance de Borgia à l’égard des Médicis qui l’avait poussé à confier cet argent aux bons soins des banquiers siennois Spannocchi, plutôt que de l’avoir à portée de main à Rome. Les Médicis régnaient en effet depuis longtemps sur le secteur bancaire, non seulement dans leur cité mais également dans la Ville éternelle. Je ne pourrais pas non plus me porter garant de cette affirmation ; mais si c’est bien la vérité, permettez-moi de remarquer que c’était une sage précaution de sa part, au vu des ennuis que les Médicis allaient lui causer plus tard. Même en ce temps-là, alors que Laurent le Magnifique était enterré depuis quelques mois à peine, la puissante famille florentine était l’opposante la plus fervente des ambitieux Borgia.
    — Nous avons Sforza avec nous, annonça Il Cardinale. Il nous a coûté cher, mais il est dans notre camp maintenant.
    César leva sa coupe vers son père en signe de salut.
    — Combien ?
    Lorsque Borgia le lui dit, j’en eus le souffle coupé. Le moins que l’on puisse dire, c’était que le cardinal milanais n’avait pas bradé ses propres aspirations à la papauté, d’autant que pour lui, ce n’était que partie remise. Indépendamment de cinquante mille ducats d’argent et d’une foule de bénéfices et de charges ecclésiastiques (dont la vice-chancellerie) qui lui rapporteraient aisément dix fois plus, Sforza allait devenir le nouveau propriétaire de ce qui faisait la fierté de Borgia : son palazzo. À aucun moment il n’évoqua les fiançailles entre Lucrèce et Giovanni, le cousin de Sforza seigneur de Pesaro et Gradara, mais cela ne signifiait pas pour autant que l’union n’était pas déjà scellée. Borgia était en effet peu enclin à mentionner ce point de détail à son fils, qui désapprouvait tous les prétendants éventuels de sa sœur Lucrèce, comme il allait amplement le démontrer plus tard.
    César émit un sifflement.
    — Si cela se sait, les vautours vont commencer à te tourner autour pour demander le même genre de rétribution.
    — Ils ne l’obtiendront pas, tout au moins la plupart d’entre eux, répondit Borgia avec assurance. Dès que le vote tournera en ma faveur, ils devront se contenter des miettes qui resteront.
    Si le vote tournait en sa faveur, avais-je envie de dire, mais naturellement je m’abstins. En fait, à l’instar de Benjamin il n’y avait pas si longtemps que cela, je tentais de me faire aussi discrète que possible. Combien de personnes, en dehors de La Famiglia, avaient déjà eu l’occasion de voir à l’œuvre le plus grand comploteur de tous et son meilleur élève ? J’en apprendrais plus sur l’art raffiné de la tactique en une heure passée avec Borgia padre e figlio que dans n’importe quel livre, quand bien même je passerais des heures à l’étudier.
    La discrétion que l’on exige d’une professionnelle telle que moi m’empêche de révéler en détail ce que j’entendis cette nuit-là. Je me bornerai donc à vous dire qu’Il Cardinale comprenait mieux que quiconque la parfaite vénalité qui préside à tous les actes des princes de notre Mère la sainte Église. Il connaissait chacun d’entre eux, probablement mieux qu’ils ne se connaissaient eux-mêmes. Quel était le désir le plus ardent de chacun ? Quelles étaient ses peurs ? Que convoitait-il dans le secret de son âme ? Des décennies de travail zélé l’avaient préparé à ce moment précis, lorsqu’il ferait sien le trône de Saint-Pierre.
    Si Dieu aime l’ambition impitoyable et la froide intelligence chez l’homme, alors Il devait véritablement adorer Rodrigo Borgia.
    Au bout d’une heure, pendant laquelle père et fils échangèrent des informations et

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