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Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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converti pour elle. Mais après sa mort, il est resté croyant et t’a élevée dans la vraie foi. (Il plissa les yeux.) Du moins m’en a-t-il assuré.
    — Je suis chrétienne, confirmai-je promptement.
    Certes loin d’être une chrétienne pieuse ou exemplaire, mais pas non plus l’une des leurs . L’une des Autres, ces boucs émissaires que l’on rend responsables de tous nos défauts et de tous nos maux.
    Ma profession de foi n’eut pas l’air d’importer outre mesure au prince de notre Mère la sainte Église.
    — Si tu le dis, lança-t-il d’un air dédaigneux. Quoi qu’il en soit, tu es avant tout la fille de ton père.
    Et il comptait sur moi pour que je reprenne les travaux de mon père là où il les avait laissés. Mais à en croire Borgia (et en cet instant je ne le croyais pas une seconde, pas encore), mon père avait une motivation que je n’avais pas. En tant que juif, converti ou pas, il aurait été naturellement enclin à tenter d’empêcher l’extermination de son peuple. Quant à moi, l’idée de leurs souffrances et de leur mort ne me réjouissait pas, certes ; mais je n’étais pas non plus disposée à mettre en péril mon âme immortelle pour eux.
    — Je sais ce que vous voulez, dis-je dans un souffle. (En y songeant, il était bien plus probable que le Cardinal m’ait simplement menti au sujet de mon père dans le but d’obtenir ma coopération.) Je comprends parfaitement, mais à votre tour, vous devez comprendre : pour tuer un pape et en réchapper, il faudrait qu’il n’y ait absolument aucun soupçon quant aux causes de sa mort. Or, je n’ai aucune idée de la manière d’accomplir cela. Et même si c’était le cas, en acceptant je m’exposerais à la damnation éternelle.
    — Pour avoir tué Innocent ? fit Borgia d’un air amusé. Avoir purifié la terre de cet imbécile de dépravé ? Pour sûr, les anges pleureront quand il passera de vie à trépas.
    Il se leva et alla se poster devant les hautes fenêtres qui donnaient sur le fleuve. Des voiles transparents ondulaient dans la brise. Un autre orage couvait, plus gros peut-être que tous ceux qui avaient déjà balayé Rome en cette saison de tourmente.
    Lorsqu’il se tourna vers moi, il n’avait pas l’air en colère comme je l’avais craint mais simplement calme, comme s’il avait pris une décision en son for intérieur. Gentiment, presque, il me dit :
    — En mémoire de ton père et de sa fidélité envers moi, je te donne un peu de temps pour réfléchir. Fais-en bon usage, Francesca.
    Je fus assez sotte pour le croire – pire, je lui en sus tellement gré que je me précipitai dans ma chambre pour réfléchir à l’énormité de ce qu’il venait de me demander.

9
    L a semonce arriva quelques heures plus tard. Un coup sec frappé à ma porte, celle-ci qui s’ouvre dans un fracas, puis une lumière au-dessus de moi tandis que je me réveille, la tête embrumée et me demandant bien ce qui se passe.
    — Vous devez venir tout de suite, signorina, m’annonça une voix familière.
    — Vittoro… ?
    — Enfilez ça.
    Il me tendait ma robe.
    — Pourquoi ? m’exclamai-je, le fil de ma pensée paralysé de surprise et d’effroi. J’avais désavoué le Cardinal. À quel châtiment me destinait-t-il ?
    Silencieux, Vittoro se borna à me donner la robe et à répéter : « Tout de suite. »
    J’obtempérai. À la vérité, avais-je le choix ? Nous traversâmes à la hâte le couloir sombre, descendîmes des escaliers, puis d’autres, la main ferme de Vittoro dans le creux de mes reins pour me forcer à avancer – et moi me débattant pendant tout ce temps avec la terreur qui menaçait de m’engloutir. J’étais vaguement consciente de la présence d’autres gardes, une petite troupe qui nous accompagnait. Se disaient-ils que je pourrais tenter de fuir ? À cette idée, un rire affolé me monta à la gorge. Je l’étouffai d’une main ferme sur ma bouche et me concentrai sur une seule chose, les suivre – toujours plus bas, jusque dans les entrailles du palazzo.
    Je m’étais maintes fois rendue au sous-sol, où sont situés les celliers. Mais je savais, à la façon dont on sait certaines choses sans vouloir le reconnaître, qu’il existait d’autres niveaux encore en dessous. Des niveaux où on aurait retrouvé des traces de nos ancêtres romains, et où on envoyait les ennemis du Cardinal pour qu’ils réfléchissent à leurs péchés.
    Quand j’eus vraiment pris

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