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Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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temps-là, des gardes patrouillaient à l’extérieur comme à l’intérieur du palazzo, et leur vigilance était de tous les instants. Derrière les murs d’enceinte, en ville, des espions étaient à l’œuvre dans les marchés, les bordels, les maisons de négoce, jusqu’au Vatican, débusquant tout ce qui pouvait être utile à Borgia. Tout cela dans l’unique but de protéger et de faire avancer La Famiglia.
    Mais n’oublions pas qu’il y avait d’autres familles, les grandes et les grandes en puissance, et qu’elles étaient loin de rester inactives. Les alliances se faisaient et se défaisaient comme la brume qui monte du Tibre la nuit pour disparaître au soleil du matin. L’ami de la veille pouvait fort bien être l’ennemi du lendemain. Comme tant de villes de la chrétienté, Rome était en ébullition, tiraillée par deux forces contraires. Certes, elle obéissait à l’injonction séculaire, définie par nos aînés, qui exigeait de se soumettre à Dieu et à la tradition. Mais elle commençait également à percevoir cet élan nouveau, encore à moitié conscient, qui consistait à relever la tête et à s’ouvrir à la lumière du changement, ce que certains appelaient une renaissance du monde quand d’autres le qualifiaient de paganisme. Tout défi à leur autorité étant une chose terrifiante pour nos dirigeants terrestres, ils ripostaient en tentant d’étouffer le mouvement dans l’œuf. Jusqu’ici, tout au moins, ils n’y étaient pas parvenus : le combat continuait.
    Or, j’avais un rôle à jouer dans ces événements. À l’heure de la sexte pour les prêtres, je me retirai dans mes quartiers pour affronter la terrifiante question que je savais ne plus pouvoir éviter : si mon père avait décidé de tuer le pape Innocent  viii , comme j’en étais persuadée à présent, comment avait-il eu l’intention de procéder ? Sofia avait dit qu’il cherchait le moyen de provoquer une mort qui semble parfaitement naturelle. Or, à ma connaissance, rien ne permettait d’accomplir cela.
    Ce n’est pas que certains poisons ne soient pas plus subtils que d’autres. Les symptômes de l’arsenic, dont le succès ne se dément pas, sont aisément confondus avec ceux de la malaria ; mais notre monde est ainsi fait que l’on soupçonnerait immédiatement d’empoisonnement tout personnage important qui viendrait à se plaindre d’un ou de plusieurs de ces troubles. L’aconit produit une substance intéressante qui, dosée de façon appropriée, arrête le cœur ; il en va de même pour la digitale pourprée, une si jolie fleur, mais de nouveau son utilisation éveillerait tout de suite les soupçons. La ciguë, qui a tué Socrate, est extrêmement efficace mais manque totalement de discrétion, engendrant une paralysie et des douleurs atroces avant de provoquer la mort. La belladone, dont certaines écervelées se servent pour illuminer leur regard, entraîne accélération du rythme cardiaque, désorientation et autres régals de ce genre avant d’achever.
    Vous voyez le problème ? Si le but est simplement de tuer, les possibilités sont innombrables. Mais tuer sans éveiller du tout de soupçons, c’est une autre affaire. Je pourrais vous en dire plus, mais je crains déjà d’en avoir trop révélé. Dieu m’est témoin que mon intention n’est pas de vous donner matière à pécher.
    En tout état de cause, si la mort du pape faisait naître le moindre doute, la réputation de Borgia était telle qu’on le considérerait immédiatement comme suspect. À cause de son âge, c’était sa dernière chance d’accéder à la papauté, et d’autres que lui (tout aussi puissants) tenteraient de lui ravir la place. Quelle que soit la compensation financière qu’il serait en mesure de leur promettre pour acheter leur soutien, il existait une certaine limite qu’ils se refuseraient à franchir. Et tuer le pape se situait tout près de celle-ci, dans les recoins les plus sombres de l’âme humaine.
    Mon imagination refusait de s’aventurer par là. J’avais beau essayer, je n’arrivais même pas à entrevoir ce que mon père avait tenté de faire, en le supposant effectivement responsable de la récente maladie d’Innocent. Car il était impossible d’écarter totalement la possibilité que tout cela ne soit qu’une coïncidence.
    Mais cela ne saurait m’exonérer des exigences du Cardinal. Elles vinrent peu de temps après la none – encore ces prêtres, ne

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