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Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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brèche à se rendre au cœur même de sa force militaire, où il était ensuite facile de les éliminer un par un. La cour d’honneur était le guet-apens idéal pour les ennemis malchanceux.
    Une fois le mess des officiers passé, Morozzi accéléra l’allure. Il devait avoir tout autant hâte que moi d’arriver et je lui emboîtai le pas, ainsi que David. Mais je ne pus m’empêcher de demander :
    — Est-ce encore loin ?
    Je vis ses joues s’empourprer et ses yeux se durcir. Il secoua la tête.
    — Nous y sommes presque.
    J’acquiesçai en silence, tentant de me concentrer sur ce qui allait suivre. Sous peu, il me faudrait avouer au prêtre la vérité : que je devais trouver les garçons que l’on saignait et, plus précisément, localiser leur sang afin de pouvoir substituer celui que j’avais apporté au leur. Si un médecin ou toute autre personne était présent sur les lieux, il faudrait s’en charger. Cette pensée ne me réjouissait guère mais je savais que nous n’avions pas le choix, car si quelqu’un sonnait l’alarme, la garnison entière nous tomberait dessus.
    Nous traversâmes une pièce, puis une autre. Avant d’entrer dans la troisième, Morozzi s’arrêta et leva la main. Prudemment, il avança de quelques pas et regarda à l’intérieur. Ce qu’il vit dut le satisfaire car il nous fit signe de le rejoindre.
    David passa en premier ; je le suivis. Au moment où je passais devant Morozzi, il tendit la main et m’arracha le médaillon du cou. Au même instant, il me poussa violemment à l’intérieur.
    — Qu’est-ce que… ? m’écriai-je d’une voix entrecoupée.
    Mais d’une certaine façon, je savais déjà. Notre expédition avait été trop aisée, notre parcours étonnamment sans embûches. Ce que j’avais voulu voir comme le signe que Dieu approuvait notre projet, ou simplement comme de la bonne fortune, était en fait une trahison.
    Morozzi s’empara d’un levier dissimulé dans le mur et l’abaissa d’un coup sec. Instantanément, une herse de fer descendit, nous piégeant à l’intérieur.
    — Deus vult  ! hurla alors le prêtre, son si beau visage transformé par la ferveur religieuse.
    Dieu le veut ! Le cri de ralliement des croisés. L’incantation des inquisiteurs. L’excuse dont on se servait pour commettre toutes sortes d’atrocités au nom du Rédempteur.
    David fonça tête baissée pour tenter de se glisser sous la herse avant qu’il ne soit trop tard. Il faillit y parvenir et pendant le plus bref des instants, Morozzi eut l’air terrifié. Mais la lourde grille en métal tomba finalement en place dans un bruit sourd et David alla s’effondrer au sol, aux pieds du prêtre quasiment.
    Voyant cela, Morozzi exulta.
    — D’abord Giordano, et maintenant sa sorcière de fille et un juif, par-dessus le marché ! Je vais faire tomber votre maître, l’anéantir, et dans le même temps je vais déclencher la fureur de toute la chrétienté contre les traîtres à notre Seigneur ! Vous…
    J’agrippai alors les barreaux de la herse et défiai du regard le prêtre fou, tout s’évanouissant autour de moi si ce n’était l’évidence que j’entendais hurler dans mon esprit, et l’écœurement qui l’accompagnait. Depuis le moment où j’avais entendu la confession arrachée sous la torture de l’homme à la médaille, j’avais nourri des doutes. Mais j’étais loin d’imaginer la vérité.
    — Que voulez-vous dire, d’abord Giordano ? Est-ce Innocent qui a ordonné la mort de mon père… Ou vous ?
    — Innocent ? (Morozzi cracha presque son nom.) Ce vieux dégoûtant ne sait plus rien faire que pleurer sur ses péchés et m’implorer de lui dire comment échapper à une damnation qu’il mérite pourtant amplement.
    Un frisson me parcourut de la tête aux pieds. Même déformé par la haine, le visage du prêtre restait celui d’un ange – mais un ange aux noirs desseins, comprenais-je à présent.
    — Que lui avez-vous dit ? insistai-je. Qu’il pouvait être sauvé en condamnant le peuple juif à une mort certaine ?
    — La volonté de Dieu s’est révélée en moi ! s’écria Morozzi. Je suis Son messager. Les assassins du Christ doivent mourir pour ce qu’ils ont fait à notre Seigneur !
    David en avait entendu assez. Il se rua sur le prêtre qui recula d’un bond, juste à temps pour éviter d’être agrippé à travers la herse.
    — Dieu me protège ! cria Morozzi. J’accomplis Sa mission divine !

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