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Francesca la Trahison des Borgia

Francesca la Trahison des Borgia

Titel: Francesca la Trahison des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sara Poole
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certains ce sont des démons étrangers qui déclenchent ce vent incessant, et c’est pour cela qu’il rend fou – mais je reste sceptique.
    Nous étions à cette heure où le dernier ivrogne a regagné son lit et le premier marchand n’est pas encore sorti du sien, et par conséquent il n’y avait aucun mouvement dans les rues, hormis les éternels rats qui détalaient devant nous. J’imaginais ces créatures comme autant de témoins de la grandeur et de la décadence d’une civilisation, depuis l’illustre époque des empereurs Auguste et Constantin ; ils la voyaient à présent renaître de ses cendres – jusqu’à ce que Dieu Tout-Puissant frappe à nouveau. Oh vraiment, déesse Fortuna, tu finis toujours par nous trahir.
    Minuit était passé depuis longtemps lorsque nous montâmes les marches menant au palais du Vatican. Un garde était en train de somnoler appuyé contre la porte d’entrée, sa hallebarde sur le point de lui glisser des mains. Il se redressa brutalement lorsque César lui donna un coup de pied dans les jambes.
    Son indignation (justifiée, selon moi) se changea en horreur quand il reconnut le fils du pape. Ayant toute son attention à présent, nous l’entendîmes marmonner :
    — Toutes mes excuses, Signore, vraiment. Je n’avais pas vu que c’était vous.
    Me prenant par le coude, César passa sans ménagement devant le pauvre homme et monta l’immense escalier de marbre qui menait aux bureaux du pape. À cette heure tardive quelques malheureux secrétaires à moitié endormis sur leurs tabourets traînaient encore là, prêts à bondir au moindre signe d’Il Papa qui, lorsque ses insomnies le prenaient, n’hésitait pas à les faire mander en pleine nuit.
    César en réveilla un avec un autre coup de pied bien placé.
    — Où est mon père ?
    Il n’était pas, comme nous le pensions, avec La Bella. Au contraire, il se trouvait encore dans son bureau – et il n’était pas seul.
    Dès que je vis la chevelure brune dépasser du siège en face de lui, mon instinct me dit de partir. Je n’avais rencontré le fils cadet de Borgia que très peu de fois, et n’avais pas d’opinion à proprement parler sur lui, si ce n’est qu’il ne possédait pas l’esprit brillant de son frère. Mais César et lui dans une même pièce, ce n’était pas une bonne idée, surtout au vu de la situation déjà tendue.
    César n’était pas du même avis, visiblement. Il entra dans le bureau à grandes enjambées et avec le sourire, s’exclama :
    — Quelle bonne surprise ! Mon frère, tu te portes bien, j’espère ?
    Le légendaire charme des Borgia était de sortie, mais les apparences étaient trompeuses. Alors que son père était un homme ouvert, pétulant et plein d’entrain, César était par nature secret et taciturne. Il était enclin à la méfiance et à la rancune, même s’il faisait de son mieux pour le dissimuler. Au fil du temps il était passé maître dans l’art de renvoyer à son père l’image qu’il attendait de lui, à savoir une version plus jeune de lui-même – le seul moyen qu’avait trouvé Borgia pour tromper la mort et accéder à l’immortalité.
    Mais le prix à payer pour un tel simulacre était élevé. J’étais l’une des rares personnes à savoir que César était sujet à des périodes de léthargie et de désespoir durant lesquelles il n’avait même plus la force de sortir du lit.
    Juan, devenu très récemment duc de Gandie, se leva. Lorsqu’il parla, son ton, pour cordial qu’il fût en apparence, était froid. La volonté (la sagesse ?) de dissimuler son inimitié envers César lui faisait visiblement défaut. Cela se voyait à son regard, et encore davantage quand il regarda dans ma direction, avant d’aussitôt se dérober.
    — Plutôt bien, mon frère. Nous étions justement en train de parler de toi.
    Je reculai d’un pas, fascinée malgré moi à l’idée d’observer les fils de Borgia ensemble. Ils étaient grands comme leur père, bien que César soit mieux fait de sa personne – et je dis cela malgré le faible que j’avais pour lui. Le hasard avait voulu qu’ils héritent tous deux de la beauté de leur mère, dont on disait qu’elle avait badiné avec le jeune Giulio della Rovere juste avant qu’il ne devienne prince de l’Église. Leur liaison avait apparemment pris fin lorsque Vannozza s’était fait remarquer de Borgia, mais d’aucuns disent encore aujourd’hui que la rivalité entre les deux

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