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Frontenac_T1

Frontenac_T1

Titel: Frontenac_T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Micheline Bail
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été bon pour justifier ses lamentables échecs. La première fois, souvenez-vous, il a quitté ces rivages équipé jusqu’aux dents pour aller déloger définitivement les Anglais de Fort Bourbon, et qu’en est-il résulté? Une traite fructueuse, il est vrai, la prise de trois bâtiments anglais et la destruction de Fort Severn, il est vrai aussi, mais l’ennemi se maintient toujours aussi solidement à Fort Bourbon. Et l’année suivante, il a fait pire encore... en arrivant ici trop tard pour entreprendre une quelconque expédition vers le nord.
    â€” Équipé jusqu’aux dents, vous y allez un peu fort, ce me semble, mon cher comte, lui rétorqua aussitôt Champigny, agacé de voir encore Frontenac égratigner son protégé. N’êtes-vous pas un peu injuste à son égard? Vous savez comme moi que s’il n’a pas réussi à prendre Fort Bourbon la première fois, c’est justement parce qu’il n’était pas assez bien équipé. Iberville l’a mis en lumière dans le mémoire adressé au roi. L’ennemi les attendait et bloquait l’entrée de la rivière Sainte-Thérèse avec trois gros navires, dont l’un de quarante canons, et un brûlot * , alors que notre homme n’avait à leur opposer que deux petits voiliers armés de dix-huit et douze canons. Cela aurait été une pure folie de s’attaquer à aussi forte partie, aussi a-t-il eu l’intelligence de cingler plutôt vers Fort Severn, qu’il a complètement incendié. Et l’année dernière, si ma mémoire est bonne, monsieur d’Iberville n’est pas arrivé trop tard. Le sieur du Tast, qui devait se joindre à lui et mettre son navire sous son commandement, est arrivé à Québec le 13 juillet et a prétendu qu’il était trop tard pour repartir. Il trouvait son bateau trop mal équipé pour entreprendre une telle expédition, alors que les navigateurs consultés sur le sujet ont estimé que la saison n’interdisait en rien l’entreprise.
    Louis se souvenait très bien de ce du Tast, qui l’avait poussé à bout.
    Ce petit personnage prétentieux et hautain était arrivé ici avec des exigences démesurées. Monsieur le commandant des vaisseaux du roi prétendait à rien de moins que de se faire attribuer la part du lion dans les profits de la Compagnie du Nord et refusait de se placer sous le commandement de Pierre d’Iberville, qu’il méprisait d’ailleurs ouvertement pour n’être ni officier de la Marine ni issu d’une noblesse de souche. Et parce qu’il n’avait pas obtenu gain de cause, l’intrigant avait osé invoquer le prétexte de la saison trop avancée pour faire échouer l’expédition. Louis était alors entré dans une colère si vive qu’il lui avait ordonné d’une voix blanche de se placer illico sous l’autorité de Pierre d’Iberville, pour aller croiser dans les parages de l’Acadie. Comme l’autre prenait de grands airs offensés et répugnait à s’exécuter, Louis l’avait carrément menacé de le mettre aux fers, ce qui l’avait calmé net. Pour une fois, Champigny avait totalement approuvé.
    â€” Mais cette année, continua Louis, Iberville n’a-t-il pas traîné trop longtemps à La Rochelle pour pouvoir remplir sa mission? Il devait partir au plus tard le 10 avril, il a pris la mer le 14 mai, pour ne mouiller devant Québec que le 19 d’août. Imaginez! Vous me direz, bien sûr, que les complications, les retards de dernière minute, les vents contraires, les tempêtes, les corsaires... et que sais-je encore... ont dû ralentir sa course?
    â€” Mais certes, certes, je vous dirai tout cela et bien davantage...
    Champigny ne lâchait pas prise lui non plus, irrité par cette propension qu’avait Frontenac à toujours blâmer le moindre geste de l’explorateur, par une espèce de hargne malsaine difficile à expliquer chez un homme au faîte de sa carrière et que le succès d’Iberville ne menaçait pourtant d’aucune façon.
    â€” ... oui, bien davantage, et notamment que s’il devait partir le 10 avril, le 24 du même mois il était toujours immobilisé à La Rochelle avec seulement

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