Frontenac_T1
suite pensé que lâhomme qui posséderait votre cÅur serait le plus heureux du monde.
â Il ne tient quâà vous dâêtre cet homme.
La Hontan posa un baiser fiévreux sur les lèvres de Geneviève, qui y répondit avec fougue. Ils sâabandonnèrent un long moment à la fureur du désir. Puis le jeune homme sâécarta promptement. Il fallait mettre fin à un emportement qui risquait de les entraîner trop loin.
â Reprenons nos sens, sinon je ne réponds plus de moi. Le... fort penchant que jâai pour vous est trop pur et trop respectueux pour que je mâoublie ainsi. Geneviève, je jure sur mon âme de prendre rendez-vous avec vos parents dès ce soir. Si vous êtes dâaccord, nous allons commencer de vraies fréquentations pour vérifier si cette attirance que nous éprouvons lâun pour lâautre a quelque chance de mener à un... engagement.
La jeune fille en eut le souffle coupé. De fines larmes de joie inondèrent ses joues. Elle lui susurra à lâoreille :
â Monsieur, câest là mon désir le plus cher.
La Hontan lâenlaça dans ses bras.
â Il faut retourner au bal avant quâon ne sâinquiète. Nous avons déjà trop tardé. Vos parents vont vous chercher et les mauvaises langues vont se faire un plaisir de nous écharper vifs. Venez, mon amour.
Il lui prit la main et lâentraîna vers le château en ouvrant le sentier pour éviter de déchirer sa robe dans les arbustes et les ronces qui le bordaient. Cette fois, il était bel et bien compromis.
«Le vin étant tiré, il faudra le boire », se dit-il avec philosophie, tout en regrettant déjà sa précipitation. Mais pourquoi diable avait-il fait la bêtise de sâisoler avec Geneviève? Câétait sâobliger à se commettre enfin auprès des parents. Mais le regard lumineux quâelle lui jeta lui fit oublier ses peurs et le replongea dans les affres de lâamour naissant.
* * *
â Que vous disais-je, madame? Les voilà qui reviennent.
Louis déambulait sur la terrasse bras dessus, bras dessous avec les Damour, lorsquâil vit paraître les jeunes gens au détour dâun sentier. Il se porta à leur rencontre en poussant un soupir de satisfaction. Puis il les ramena comme deux enfants pris en faute vers les parents de Geneviève.
â Nous nous faisions du mauvais sang. Mais les voilà , nos tourtereaux. Nâont-ils pas un petit air complice qui réchauffe le cÅur?
Le comte prononça ces paroles dâun ton badin, pour détendre lâatmosphère. Câest quâil était temps! Frontenac avait occupé les père et mère pendant de longues minutes et ne savait plus quelle histoire inventer pour les détourner de leurs appréhensions. Geneviève baissa les yeux, mal à lâaise. Elle ne voulait rien laisser voir de lâétat dâexaltation dans lequel elle baignait encore.
â Mais où étiez-vous donc? fit madame Damour dâune voix où pointait la colère. Nous étions morts dâinquiétude, votre père et moi. Encore un peu et nous partions à votre recherche. Vous avez quitté le bal sans avertir. Cela nâest pas dans vos habitudes, ma fille. Et vous, monsieur, depuis quand distrait-on une jeune fille de bonne famille de ses devoirs?
La mère de Geneviève avait pris un air sévère. Elle fronçait les sourcils et serrait ses jolies lèvres rondes, ce qui faisait ressortir de fines ridules à leurs commissures. François Damour nâen pensait pas moins, mais il trouvait plus facile de laisser sa femme régler ce genre dâaffaire. Il se contenta de montrer un visage indigné, que la chaleur et lâabus de nourriture avaient passablement empourpré.
Le jeune homme voulut répondre, mais Geneviève posa une main impérieuse sur la sienne.
â Nous avions à parler, monsieur de La Hontan et moi, répondit-elle avec aplomb tout en défiant ses parents du regard. Il nây est pour rien. Câest moi qui lâai entraîné contre son gré. Et je puis vous assurer quâil sâest conduit en tous points comme le parfait gentilhomme quâil est!
Le baron eut un regard admiratif pour la jeune fille. Elle faisait montre de courage et de détermination, ce qui nâétait
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