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Funestes présages

Funestes présages

Titel: Funestes présages Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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plus propre ni le plus beau des hommes, Chanson était toujours, pour eux comme pour les autres enfants du château, une source de délicieuse curiosité.
    — Oui, soupira Corbett, nous étions censés rentrer.
    Il ferma à demi les yeux. Il avait rejoint le souverain à Norwich après l’affaire du Suffolk. Édouard lui avait promis de le libérer de son service, mais c’est alors que le messager était arrivé de St Martin, couvert de poussière et de boue. Le roi avait demandé à son clerc de se charger de cette affaire et que pouvait-il donc faire ?
    — C’est un meurtre, n’est-ce pas ? questionna Ranulf en prenant un siège.
    — Oui, et fort rusé, acquiesça le clerc. Mais il sera difficile de le prouver et d’en découvrir l’auteur. Nous devrons fouiller avec un long bâton pointu. L’abbé Stephen était un homme étrange sous maints aspects. Oh, il était très pieux et érudit, mais aussi réservé et mystérieux. C’était un chevalier banneret qui avait décidé de devenir prêtre. Un soldat qui s’était mis en tête de chasser les démons.
    — Les démons ! s’exclama Ranulf.
    Corbett eut un mince sourire.
    — Oui, Ranulf, feu notre abbé était un exorciste officiellement appointé. On l’allait quérir pour prêter assistance à ceux qui se prétendaient possédés et aux maisons réputées hantées.
    — Des lutins et des gobelins ! se gaussa Ranulf. Une légion de diables vagabondent à Whitefriars et à Southwark, mais ils sont tous de chair et d’os. Leurs méfaits rendraient honteux tout démon qui se respecte. Vous ne croyez pas à ces absurdités, je pense ?
    Corbett fit la moue. Son écuyer lui jeta un regard incrédule. Chanson, ravi, était pétrifié. Rien ne lui plaisait davantage, avait-il souvent confié à Ranulf, que les sombres contes de sorcières, magiciens et ensorceleurs.
    — Sir Hugh, ce sont sans nul doute de fieffées bêtises !
    — Oui et non, commenta Corbett, pensif. Ranulf, je suis un loyal fils de notre sainte mère l’Église, comme tu devrais l’être.
    — Mais vous êtes aussi un clerc d’Oxford expert en logique. Vous vous occupez de l’évidence, de ce qui peut être prouvé.
    — Et je peux te fournir une preuve, le taquina Corbett en retour. Ranulf, pense à quelque chose.
    Le clerc de la Cire verte ferma les yeux.
    — Alors, à quoi penses-tu ?
    — À la douce Amasia, répondit Ranulf, souriant d’une oreille à l’autre. Son père possède une taverne sur la route près de Leighton.
    — Et tu la vois ?
    — Oh, oui, Messire.
    — Mais moi je ne peux.
    Ranulf rouvrit les yeux.
    — Bien sûr, ce n’est qu’une image dans ma tête.
    — Elle m’est donc invisible.
    Corbett s’animait en développant son thème. Il aimait ce genre de débats. Cela lui rappelait le temps tumultueux où il étudiait à Oxford, les argumentations et les discussions, l’affrontement des intelligences et des esprits.
    — Ce que je veux souligner, Ranulf, c’est qu’il y a du mal dans notre propre expérience, à la fois visible et invisible. En fait, après le célèbre Platon, je soutiendrais que ce qui est visible ne le devient qu’à partir de ce qui ne l’est pas.
    Ranulf lança un coup d’oeil furieux à Chanson qui pouffait sans bruit.
    — Un arbre est visible, contra-t-il.
    — Mais il provient de ce qui l’est à peine et, pour développer l’argument, je dirais qu’un arbre est l’oeuvre de l’esprit divin. Il en va de même pour l’homme, conçu dans les entrailles d’une femme, mais né d’un amour, d’une idée, qui lui préexistent.
    — Ou du désir ? ajouta Ranulf.
    — Ou du désir, concéda Corbett. En réalité, mon hypothèse pourrait s’appliquer à n’importe quoi.
    Il désigna une tapisserie aux vives couleurs suspendue au mur. Elle représentait saint Antoine au désert prêchant aux oiseaux.
    — Avant qu’elle n’existe, il a bien fallu que quelqu’un la conçoive, en ait l’idée. Lui, ou elle, a réfléchi aux couleurs qui seraient employées, à la façon dont la scène serait dessinée.
    — Qu’est-ce que cela a à voir avec les démons ? intervint Chanson.
    — Tout, déclara son maître. Mon savant clerc de la Cire verte a contesté ma croyance dans l’invisible. En un mot, je crois qu’il y a deux mondes en même temps, le visible et l’invisible. Dans les deux se trouvent des êtres dotés d’intelligence et de volonté. Que cette intelligence et cette

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