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Funestes présages

Funestes présages

Titel: Funestes présages Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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êtes-vous arrivé à St Martin-des-Marais ?
    — Je suis allé dans maintes abbayes. Puis, comme les ports de l’Est m’étaient familiers, et que l’abbé Stephen et St Martin avaient grande réputation, je suis venu ici. Je ne voulais point rejoindre une maison sans discipline, sans règles strictes, où régnait la paresse.
    Il sourit.
    — Je suis aussi venu parce que je pensais avoir la vocation. J’ai vu le monde, Sir Hugh, du moins la partie où j’ai vécu. À quoi sert-il à un homme de gagner le monde entier s’il perd son âme ? Je voulais devenir prêtre, moine. L’abbé Stephen a décrété que je devais attendre et rester quelque temps ici comme frère lai.
    — Et qu’allez-vous faire à présent ?
    — Je ne sais.
    — Avez-vous jamais rencontré Lady Margaret Harcourt ? questionna le clerc.
    Perditus fit non de la tête.
    — Bien que l’abbé Stephen fût un homme charitable, il ne voulait avoir nul commerce avec elle. Il nous a demandé de garder nos distances. C’était le prieur Cuthbert qui traitait avec elle.
    Perditus vida son gobelet et se leva.
    — Autre chose, Sir Hugh ? Il se fait tard et la cloche sonnera bien assez tôt matines et prime. Je serai dans ma chambre quand vous sortirez.
    Corbett le remercia. Perditus quitta la pièce et ferma la porte. Le magistrat poussa les verrous et tourna la clé dans la serrure. Il s’approcha du feu et, tirant un tabouret, se réchauffa les mains en regardant les flammes transformer le bois sec en cendres chauffées à blanc. Il ferma les yeux et pensa à Lady Maeve et à leurs deux enfants, Aliénor et Édouard. Ils devaient tous être au lit à présent : les petits dans leurs couchettes et Lady Maeve dans son grand lit à quatre montants. Elle était sans doute étendue contre les oreillers, avec son beau visage serein reposé dans le sommeil, ses longs cheveux blonds formant un halo autour de sa tête et ces lèvres rouges que Corbett aimait baiser à la fois par jeu et par passion quand il s’allongeait près d’elle. Il eut un brusque accès de nostalgie. Il était las et plutôt triste après sa conversation avec Ranulf. Lui et son compagnon avaient suivi la même route pendant bien des années. Arrivaient-ils maintenant à un carrefour ? Ses paupières se firent plus lourdes. Il sommeilla un moment, plongeant dans le sommeil et en émergeant tour à tour. Une bûche éclata dans une gerbe d’étincelles. Corbett se secoua. Il embrassa la pièce du regard. « Jamais, pensa-t-il, je n’ai rencontré un homme comme l’abbé Stephen. » Tout, dans cette chambre, était à sa place, livres et documents, comptes de la maison, registres, mais rien ne trahissait l’âme du propriétaire, ses goûts et ses dégoûts, ses vertus et ses fautes. Qu’en était-il de son passé ?
    Corbett soupira et se leva. Il fouilla les coffres en quête d’un tiroir secret, d’un compartiment caché, mais ce fut en vain. Il prit les bréviaires, les psautiers et le livre d’heures, tous fort écornés. Il y avait peu de notes dans les pages intérieures, hormis des prières et des annotations pour un sermon. Rien ne sortait de l’ordinaire si ce n’est les citations de Sénèque et de Saint Paul et la référence aux feux follets griffonnée sur un morceau de parchemin.
    Il ouvrit un recueil et se mit à l’étudier. C’était un compte rendu des différentes ambassades que l’abbé avait conduites pour le roi, dans les marches écossaises, parfois en France, parfois en Hainaut, dans les Flandres ou en Germanie. Le magistrat sourit. Il aurait aimé bavarder avec l’abbé Stephen au sujet du roi et des plans qu’il dressait contre Philippe de France. Peut-être l’abbé avait-il rencontré Amaury de Craon, le vieil ennemi de Corbett ? L’écriture de l’abbé était nette et précise. Il décrivait toujours les choses à la troisième personne comme s’il avait été un observateur, un spectateur. Le clerc referma l’ouvrage et le mit de côté. Il prit un morceau de vélin, une boîte de plumes, une corne à encre et commença à rédiger une série de questions :
    Pourquoi l’abbé Stephen est-il mort ?
A cause de Bloody Meadow ?
Comment l’a-t-on tué ?
Qui l’a occis ?
Était-ce un membre du concilium ?
Pourquoi a-t-on assassiné Gildas ?
A-t-on jeté son corps sur le tertre de Bloody Meadow en guise d’avertissement ?
Et qu’en est-il de la marque au fer rouge ?
Quel rapport y a-t-il entre ce qu’on

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