Furia Azteca
accompagnés de la volute qui signifie le chant.
Le bruit de la bataille arriva d'abord par-devant, sur la droite de l'endroit o˘ les armées s'étaient rencontrées, & la rivière, puis il continua à se rapprocher, toujours sur itia droite, tandis que les Acolhua fuyaient et que les Texcalteca leur donnaient la chasse. Ensuite, les tambours de Nezahualpilli battirent, tout à coup, le signal de refermer le passage et le tintamarre se multiplia et s'amplifia. On entendit le claquement sec des armes les unes contre les autres, leur son mat contre les corps mêlé à d'effrayants cris de guerre : hurlement du coyote, grognement du jaguar, cri de l'aigle et ululement de la chouette. Je me représentais les Acolhua essayant d'amortir leurs coups, tandis que les Texcalteca devaient combattre désespérément, avec toute leur puissance et toute leur adresse, sans se retenir de tuer.
J'aurais aimé y assister, car j'y aurais certainement vu une démonstration intéressante des capacités guerrières des Acolhua. De par la nature du combat, cela devait être du grand art. Mais entre le lieu de la bataille et moi, il y avait un espace de terrain accidenté, des buissons, des bouquets d'arbres, le terne rideau de pluie et surtout,
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ma vue basse. Je me serais peut-être approché davantage, quand une tape timide sur mon épaule m'arrêta.
Sans sortir de mon abri, je fis volte-face en levant ma lance et je faillis embrocher Cozcatl avant de l'avoir reconnu. Le garçon se tenait, lui aussi, replié sur lui-même et il avait un doigt sur la bouche en signe d'avertissement. Dans un seul souffle, je lui chuchotai : " Cozcatl, maudit sois-tu ! que fais-tu là ?
- Je vous suivais, maître, murmura-t-il. Je suis resté à côté de vous pendant toute la nuit. J'ai pensé que vous pourriez avoir besoin d'une bonne paire d'yeux.
- Petit insolent ! Je n'ai pas encore...
- Non, maître, pas encore, mais il s'en est fallu de peu. Il y a un ennemi qui s'approche et c'est lui qui vous aurait vu le premier.
- quoi ? Un ennemi ? " Je me tassai sur moi-même.
" Oui, maître. Un Chevalier-Jaguar, tout couvert d'insignes. Il a trouvé
moyen d'échapper à l'embuscade. " Cozcatl se risqua à jeter un rapide coup d'oil. " Je crois qu'il va avancer en cercle en espérant surprendre des hommes à nous venant d'une autre direction.
- Regarde bien, le pressai-je. Dis-moi exactement quelle est sa position et la direction qu'il prend. "
Le petit esclave se releva et se baissa plusieurs fois, puis il m'annonça :
" II est environ à quarante enjambées devant vous, sur la gauche, maître.
Il avance lentement, tout courbé, bien qu'il ne semble pas être blessé.
C'est par prudence sans doute. S'il continue ainsi, il va passer entre deux arbres qui sont à cent longs pas, juste en face de vous. "
Avec de telles indications, même un aveugle aurait pu tenter de l'intercepter.
" Je vais aller vers ces arbres, dis-je. Reste ici et surveille-le discrètement. S'il remarque ma manouvre, tu t'en apercevras et tu pousseras un cri. Ensuite tu te replieras vers l'arrière. "
J'abandonnai ma lance et ma capote, ne gardant avec moi que mon macquauitl.
Rampant aussi près du sol qu'un serpent, j'avançai jusqu'au moment o˘ je vis les arbres se profiler dans la pluie. Les deux arbres étaient plantés dans un sous-bois de hautes herbes et de petits
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buissons dans lequel on apercevait la trace, presque imperceptible, du passage d'un cerf. Je supposai que le Texcalteca en fuite suivait cette trace. Je n'entendis aucun avertissement de Cozcatl, aussi je me mis en position, toujours inaperçu. Je m'accroupis au pied d'un arbre, de façon à
ce qu'il se trouve entre l'homme qui approchait et moi. Tenant mon macquauitl à deux mains,
. je le rejetai derrière mon épaule, parallèlement au sol et le gardai ainsi en équilibre.
Dans le bruissement de la pluie, je n'entendis qu'un léger froissement d'herbes et de branches. Puis, un pied boueux chaussé d'une sandale boueuse terminée par des griffes de jaguar apparut sur le sol, juste en face de l'endroit o˘ j'étais caché. Une seconde plus tard, le second pied vint le rejoindre. L'homme, protégé par les arbres, avait d˚ se redresser pour regarder autour de lui iet t‚cher de se repérer.
Je balançai mon épée comme le jour o˘ j'avais décapité le cactus nopalli et le chevalier parut suspendu un instant dans les airs, avant d'aller s'écraser de tout son long sur le sol. Ses pieds
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