Furia Azteca
t'aider à le transporter.
- Non ", m'écriai-je, dans le dernier souffle qui me testait. Ainsi, personne ne pourrait revendiquer une part de mon exploit.
Et c'est ainsi que, portant le maussade Chevalier-Jaguar, suivi par Cozcatl qui jubilait et escorté par vXococ et Gourmand de Sang qui m'encadraient fièrement, j'arrivai enfin au point de rassemblement des deux
.armées, à l'endroit o˘ la bataille s'était conclue. En haut d'un grand m‚t, flottait l'étendard de la reddition hissé
" par les Texcalteca : un grand carré de mailles d'or qui faisait penser à un filet de pêche doré.
L'humeur n'était pas aux réjouissances, ni même à une paisible satisfaction. La plupart des combattants des ,-^teux camps, qui n'étaient pas blessés ou qui n'avaient de légères contusions, étaient couchés par terre, dans état de total épuisement. D'autres, aussi bien chez les *
Acolhua que chez les Texcalteca, se pliaient et se tor-daient en poussant des cris et des gémissements qui fai-297
saient un chour lamentable, tandis que des médecins circulaient parmi eux avec leurs remèdes et leurs pommades et les prêtres, avec leurs litanies.
quelques hommes valides aidaient les médecins dans leur t‚che, tandis que d'autres récupéraient les armes éparpillées, les cadavres et les membres dispersés : mains, bras, jambes et même des têtes. Dans cet affreux carnage, un observateur étranger aurait eu bien du mal à dire qui étaient les vainqueurs et qui les vaincus. Ils baignaient tous dans la même odeur de sang, de sueur, de saleté, d'urine et d'excréments.
Vacillant sous ma charge, je cherchai du regard quelqu'un à qui remettre mon prisonnier. Mais la nouvelle m'avait précédé et je fus soudain abordé
par le chef des chefs, Nezahualpilli, en personne. Il était habillé en costume de Uey tlatoani - une immense coiffure de plumes en éventail et un long manteau, également en plumes - mais dessous, il portait la cuirasse matelassée et emplu-mée des Chevaliers-Aigle et elle était parsemée de taches de sang. Il ne s'était pas contenté de diriger la bataille de loin, il avait pris part au combat, personnellement. Xococ et Gourmand de Sang se tenaient respectueusement à quelques pas derrière moi, quand Nezahualpilli m'adressa un salut de la main.
Je déposai mon captif sur le sol et, le lui présentant d'un air fatigué, je lui dis, à bout de souffle : " Seigneur, voici... voici... mon... fils bien-aimé.
- Et voici, dit ironiquement le chevalier en me désignant, voici mon père vénéré, Seigneur tlatoani.
- Bien joué, jeune Mixtli, répondit Nezahualpilli. Ximopanolti, Chevalier-Jaguar Tlaui-Colotl.
- Je vous salue, mon vieil ennemi. C'est la première fois que nous nous rencontrons en dehors de la furie de la bataille, dit mon prisonnier à mon chef.
- Et la dernière, sans doute, ajouta le Uey tlatoani, en s'agenouillant amicalement à ses côtés. C'est dommage. Tu vas me manquer. Nous avons disputé tous les deux d'incroyables duels et j'en espérais un qui ne se termine pas avec l'intervention de nos subordonnés. Il est parfois aussi triste de perdre un ennemi valeureux qu'un ami cher ", soupira-t-il.
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Ce dialogue me remplit de stupéfaction. Je n'avais pas pris la peine d'examiner le motif de plumes qui ornait le bouclier de mon prisonnier : Tlaui-Colotl. Ce nom, Scorpion en Armes, ne me disait rien, mais de toute évidence, il était célèbre dans le monde des soldats de métier. Tlaui-Colotl était un de cet combattants dont la renommée était si grande qu'elle rejaillissait sur l'homme qui avait eu raison de lui.
" Tu pourras te battre contre d'autres chevaliers, avant de mourir, lui dit l'Orateur Vénéré pour le consoler. Je
^ vais m'en occuper. Maintenant, il faut qu'on soigne tes
' blessures. " II se retourna pour appeler un médecin qui
^soignait un blessé, non loin de nous.
" J'ai abattu quatre de vos chevaliers, pour me tirer ..de cette damnée embuscade, déclara Scorpion en Armes >à Nezahualpilli. Deux Aigles, un Jaguar et une Flèche. JpSi j'avais su ce que me réservait mon tonalli - il me f-jeta un regard de dédain amusé - je me serais, laissé Pprendre par l'un d'entre eux.
- Un instant, Seigneur ", répondit le médecin qui
*s-fêtait penché sur un guerrier acolhua au nez arraché que Tic chirurgien était en train de lui recoudre, en se servant 'id'une épine de maguey en guise d'aiguille et de l'un de Ôs longs cheveux en guise de fil.
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