Furia Azteca
connaître le tonalamatl était réservé aux descendants de tonalpouhqui et non à des gamins inconnus et présomptueux. C'était peut-être vrai, mais je parierais qu'il se rappelait que j'avais prétendu être aussi capable que lui de me trouver un nom, ou plutôt, que le vieux filou était terrorisé à l'idée que je puisse découvrir qu'il n'était pas plus qualifié que moi pour lire le tonalamatl.
Puis, un soir, je fis la rencontre d'un étranger. Je m'étais amusé tout l'après-midi avec Chimali, Tlatli et d'autres enfants, aussi Tzitzitlini n'était pas avec moi. Sur une rive éloignée du village, nous avions fait la découverte de la carcasse pourrie et défoncée d'un acali et nous étions tellement absorbés à jouer aux bateliers que nous f˚mes pris de cours quand Tonatiuh nous avertit, par le flamboiement du ciel, qu'il se préparait à
aller se coucher. Le chemin du retour était long et Tonatiuh se h‚tait vers sa couche plus rapidement que nous ne pouvions marcher, aussi les autres se mirent à courir. Le jour, j'aurais pu les suivre, mais la pénombre et ma mauvaise vue m'obligeaient à avancer doucement et à faire attention au chemin. Les autres ne firent sans doute pas attention à moi et ils eurent vite fait de me distancer.
J'arrivai à un carrefour o˘ il y avait un banc de pierre. Je n'étais pas passé par là depuis longtemps, mais je me souvins tout à coup que ce banc était gravé de plusieurs signes symboliques et j'oubliai tout. J'oubliai qu'il allait faire trop sombre pour que je puisse les voir, sans parler de les déchiffrer. J'oubliai la raison pour laquelle ce banc se trouvait là.
J'oubliai toutes les créatures tapies qui pourraient bondir sur moi quand la nuit serait venue.
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J'entendis même le ululement d'une chouette dans les parages et ne prêtai pas attention à ce funeste présage. Il y avait là quelque chose à lire ou à
tenter de lire et je ne pouvais pas passer devant sans m'arrêter.
Le banc était assez long pour qu'une personne puisse s'y allonger s'il avait été possible de s'installer confortablement sur les stries de la pierre gravée. Je me penchai sur les signes en les examinant soigneusement l'un après l'autre et en les suivant autant des doigts que des yeux. Je faillis alors buter sur un homme qui était assis là. Je me jetai de côté
comme si on m'avait br˚lé et je bafouillai une excuse.
" M-mixpantzinco. En votre auguste présence... "
D'un ton poli, mais un peu las, il me fit la réponse coutumière, "
Xlmopanolti. A votre service... "
Nous nous observ‚mes mutuellement pendant un instant. Il ne dut voir en moi qu'un garçon d'une douzaine d'années myope et un peu crasseux. Je distinguai mal ses traits parce que la nuit était complètement tombée et parce que je m'étais écarté très loin de lui. J'étais, néanmoins, capable de me rendre compte qu'il était étranger à l'île, du moins à ma connaissance, que son manteau était taillé dans une étoffe de bonne qualité, mais salie par le voyage, que ses sandales étaient usées par une longue marche et que sa peau cuivrée était recouverte par la poussière du chemin.
" quel est ton nom, mon garçon ? me demanda-t-il enfin.
- On m'appelle la Taupe... commençai-je.
- Sans doute, mais ce n'est pas ton vrai nom. " Avant que j'aie pu placer un mot, il me posa une autre question.
" que faisais-tu là ?
- J'étais en train de lire, Yanquicatzin. " II y avait quelque chose en lui qui fit que je lui donnai le titre de Seigneur …tranger. " Je lisais ce qui est écrit sur le banc.
- Vraiment ? dit-il, sur un ton de lassitude incrédule. Je ne t'aurais pas pris pour un jeune noble instruit. Et que dit cette inscription ?
- Elle dit : De la part du peuple de Xaltocan, un havre de repos pour le Seigneur Vent de la Nuit.
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- C'est quelqu'un qui te l'a dit.
- Non, Seigneur …tranger, pas du tout, regardez. Je m'approchai suffisamment pour montrer avec le doigt. Cette chose avec un bec de canard signifie le vent.
- Ce n'est pas un bec de canard, répliqua-t-il sèchement. C'est la trompette dans laquelle souffle le vent.
- Oh, merci de me le dire, Seigneur. En tout cas, c'est bien Ehecatl. Et ce signe-là - toutes ces paupières baissées - ça veut dire Yohualli. Yohualli Ehecatl, le Vent de la Nuit.
- Tu sais donc vraiment lire ?
- Pas beaucoup, Seigneur, pas beaucoup.
- qui t'a appris ?
- Personne, Seigneur …tranger, il n'y a personne à Xaltocan qui enseigne
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