Furia Azteca
débarrasser notre île et toute la région des lacs de cette engeance.
Sans doute les dieux avaient-ils décidé de favoriser pour un temps le tonalli de la cité car ce plan réussit avec néanmoins quelques complications imprévues.
Lorsqu'on sut que Cortés et sa puissante armée approchaient de la ville, tout le monde se comporta comme si rien'ne s'était passé, même les parents des innocentes victimes. Les ponts qui enjambaient les passages des trois chaussées étaient en parfait état. Les pirogues et les péniches sillonnaient les canaux en transportant d'innocentes cargaisons, et les milliers de guerriers tecpaneca et acolhua qui étaient entrés au nez et à
la barbe des alliés de Cortés restés sur la terre ferme restaient bien cachés. J'en avais huit chez moi qui commençaient à s'ennuyer et qui étaient impatients d'entrer en action. Les rues de Tenochtitl‚n étaient aussi grouillantes et le marché de Tlatelolco aussi animé, coloré et bruyant qu'à l'accoutumée. Seul, le Cour du Monde Unique était pratiquement désert. Son sol de marbre, toujours taché de sang, n'était foulé que par quelques prêtres qui y accomplissaient les offices quotidiens.
Cortés était sur ses gardes. Il avait eu connaissance de la tuerie et il ne voulait pas s'exposer à une embuscade. Après avoir contourné Texcoco à
distance respectueuse, il longea la rive sud du lac, mais il n'emprunta pas la chaussée méridionale pour entrer dans la ville ; ses hommes auraient pu être attaqués par des guerriers en canots, pendant qu'ils étaient à
découvert sur la plus longue des trois digues. Il continua à faire le tour du lac jusqu'à la rive occidentale, en postant à intervalles réguliers des guerriers de Fleur Noire et des canons pointés vers la ville. Ensuite, il alla jusqu'à Tlacopan parce que cette
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chaussée est la plus courte des trois. Avec une centaine de cavaliers, il la franchit au galop, comme s'il s'attendait à ce qu'elle s'effondre sous lui et les fantassins se ruèrent à sa suite.
Une fois dans l'île, Cortés dut pousser un soupir de soulagement. La population ne l'acclama pas, mais elle ne le conspua pas non plus. De plus, la compagnie de mille cinq cents de ses compatriotes, sans parler de ses alliés qui bivouaquaient sur la terre ferme, devait lui donner un sentiment de puissance. Peut-être même, pensa-t-il que les Mexica s'étaient enfin résignés à reconnaître sa supériorité car ses troupes traversèrent la ville en véritables conquérants.
Le gros de son armée s'installa sur la grande place. Les Texcalteca évacuèrent le palais d'Axayacatl, à l'exception des principaux chevaliers et allèrent camper eux aussi sur la place. Motecuzoma et un groupe de courtisans restés fidèles qui sortaient pour la première fois depuis la fameuse nuit, vinrent à la rencontre de Cortés, mais celui-ci les ignora dédaigneusement et pénétra dans le palais avec Alvarado et Narvaez.
J'imagine que leur premier souci fut de réclamer à boire et à manger et j'aurais voulu voir la tête de Cortés quand les soldats d'Alvarado lui apportèrent de vieux haricots racornis et de la bouillie d'atolli. J'aurais aussi bien aimé entendre l'officier blond lui raconter comment il avait héroÔquement maté un soulèvement de femmes et d'enfants sans avoir éliminé
plus d'une poignée de guerriers Mexica. Cortés était arrivé pendant l'après-midi et il resta en conférence avec Narvaez et Alvarado jusqu'à la tombée de la nuit. Personne ne sait ce qu'ils se sont dits mais je sais cependant que Cortés envoya un détachement de soldats dans le palais de Motecuzoma et qu'avec des lances, des poutres et des leviers, ils enfoncèrent les murs derrière lesquels étaient les chambres des trésors.
Comme des fourmis faisant la navette entre leur fourmilière et un pot de miel, les soldats transportèrent tout le stock d'or et de pierreries dans la salle à manger de Cortés. Il leur fallut presque toute la nuit pour effectuer le déménagement car le butin était de taille et les pièces pas toujours faciles à transporter.
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Toute la nuit, la ville resta calme et personne ne prêta attention à ces allées et venues. Cortés monta se coucher un peu avant l'aube avec Malintzin, après avoir fait dire de la façon la plus méprisante à
Motecuzoma que lui-même et ses conseillers devraient se tenir prêts à venir le voir dès son réveil. Avec une pathétique soumission, Motecuzoma
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