Game Over - L’histoire d’Éric Gagné
notre releveur numéro un de la saison précédente, Jeff Shaw, avait connu une année exceptionnelle et quâil avait sauvegardé 43 parties. Par ailleurs, le record du plus grand nombre de sauvetages dans lâhistoire des Dodgers sâélevait à 45. Dans un sens, je comprenais que mon objectif puisse lui sembler totalement déconnecté de la réalité.
â Tu dis tout le temps que câest facile dâêtre closer ! Les choses nâiront pas tout le temps comme tu le voudras! a-t-elle pris soin de me rappeler.
Le lendemain de cette rencontre, nous avons mis le cap sur San Francisco, où nous devions affronter les Giants les 9, 10 et 11 avril.
Lors du premier match, alors que nous détenions une avance de 3 à 0, Tracy mâa encore une fois mandaté pour fermer les livres en neuvième.
Jeff Kent sâest compromis sur le premier lancer, ce qui lui a valu un faible ballon au deuxième. Reggie Sanders a toutefois enchaîné avec un simple dans la gauche. Puis il a profité dâun manque de vigilance de notre part pour voler le deuxième coussin.
J.T. Snow et Benito Santiago ont toutefois été incapables de poursuivre ce que Sanders avait amorcé. Snow a cogné un coup en flèche dans les mains de notre arrêt-court Cesar Izturis, et Santiago a été retiré sur des prises.
Deuxième sauvetage.
Le lendemain, les Giants nous ont vaincus par la marque de 2 à 1. Lâissue de la série sâest donc jouée dans ce que les férus de baseball appellent the rubber game , le 11 avril.
Dans ce troisième duel contre les Giants, nous détenions une avance de 4 à 3 en neuvième quand Tracy mâa confié la balle.
La commande était de taille. En plus du pointage serré, câétait le haut de lâalignement des Giants (Tsuyoshi Shinjo, David Bell et Barry Bonds) qui se présentait au bâton. Il y avait plus de 40 000 spectateurs dans les gradins et, en raison de lâintense rivalité opposant les deux équipes, la foule était carrément hostile.
Il nây avait pour ainsi dire aucune marge de manÅuvre, parce que permettre à lâun de ces trois premiers frappeurs dâatteindre les sentiers équivalait à se créer une montagne de problèmes: Bonds, à mes yeux le meilleur frappeur de tous les temps, était suivi de Jeff Kent (proclamé joueur par excellence de la Ligue nationale en 2000) et de Reggie Sanders, un vétéran coriace qui livrait souvent de longues batailles aux lanceurs adverses et qui affichait toujours une bonne moyenne de présence sur les sentiers.
Câest ce soir-là , et dans ces circonstances très particulières, que mon destin sâest joué.
Shinjo a été retiré sur un roulant au troisième but. Mais David Bell a tout de suite ajouté du piquant à la situation en répliquant avec un simple dans la gauche.
Le gérant des Giants, Dusty Baker, a alors décidé de remplacer Bell par un coureur suppléant (Calvin Murray) afin dâaméliorer ses chances de créer lâégalité.
Barry Bonds sâest donc présenté à la plaque. Et comme le malheur nâarrive jamais seul, mes deux premiers lancers ont échappé à la vigilance de notre receveur Paul Lo Duca, ce qui a permis à Murray de se rendre jusquâau troisième coussin.
Avec Bonds au bâton, un seul retrait et un compte de 1-1, Jim Tracy a décidé de lui accorder une passe gratuite. Il est très rare quâon accorde un but sur balles intentionnel à un frappeur susceptible de marquer le point gagnant dâun match. Cela va à lâencontre du fameux livre du baseball.
Mais Bonds constituait un cas à part. Il pouvait mettre fin à une rencontre dâun seul élan. Ou encore, il y avait de fortes chances de le voir facilement soulever la balle au champ extérieur pour obtenir un ballon sacrifice et créer lâégalité. Il valait donc mieux lui servir un but sur balles intentionnel, une décision qui nous donnait aussi la possibilité de sceller le match avec un double-jeu.
Dès que Bonds a touché au premier coussin, jâai vu Tracy poser un pied à lâextérieur de lâabri et demander un temps dâarrêt. Il sâest ensuite mis à marcher en direction du monticule. Quand le gérant quitte lâabri, il
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