Game Over - L’histoire d’Éric Gagné
mon rythmeâ¦
La plupart du temps, il souriait et disait:
â Câest bon, câest bon...
Michel avait du respect pour ce que jâavais accompli dans le baseball et il me laissait de la latitude. Toutefois, il mâest parfois arrivé dâaller trop loin et de mâobstiner avec plus dâinsistance pour rester impliqué dans certains matchs. Pierre-Luc Laforest, notre receveur, venait alors à sa rescousse.
â Non, non! Crisse, Ãric, câest assez! Tâas suffisamment lancé aujourdâhui. Il faut que tu penses à ton prochain départ.
Lorsquâils sây mettaient à deux pour réfréner mes ardeurs, jâavais moins dâarguments.
Laplante et moi avons disputé ensemble un nombre incalculable de parties de golf cet été-là . Nous nous connaissions déjà depuis plusieurs années quand jâétais arrivé avec lâéquipe, mais pas vraiment intimement. Nous avons fini par développer une excellente relation. Une belle amitié, même.
Michel et moi avions toutes ces discussions par rapport à mon utilisation parce quâil se préoccupait de mon bien-être et quâil voulait que je réussisse mon retour dans les majeures. Je lâavais compris dès le premier jour: il aimait et défendait ses joueurs. Nous avons donc fini par trouver un modus operandi qui satisfaisait tout le monde et qui lui permettait de mener lâéquipe à sa façon.
Peu de temps après cette première conférence de presse, donc, nous avons établi que jâallais effectuer mon premier départ le samedi 13 juin, à Québec.
Le vieux stade municipal contenait 4 000 places et les Capitales ont vendu près de 5 500 billets à la suite de cette annonce. Une situation comme celle-là nâétait jamais survenue auparavant.
Le soir du match, les plus vieux amateurs de baseball de la ville disaient nâavoir jamais ressenti une telle fébrilité dans cette enceinte, pourtant inaugurée en 1938. Depuis sa construction, le stade municipal avait été le domicile de grandes équipes. Dans les années 1970, il avait même abrité le club-école AA des Expos et les gens de Québec sây étaient entassés pour voir jouer de futures vedettes des majeures comme Gary Carter, Andre Dawson, Larry Parrish, Steve Rogers et Ellis Valentine.
Cette foule inhabituelle qui franchissait les tourniquets pour mon premier match posait des problèmes logistiques assez considérables et tout le personnel administratif des Capitales avait été mobilisé pour tenter de les solutionner.
Pendant ce temps, Michel Laplante, lui, était engagé à fond dans lâopération «Protégeons Ãric Gagné».
Michel mâavait observé quand jâavais lancé sur les lignes de côté au cours des jours précédents et ce quâil avait vu ne lâavait pas renversé. Mes séances dans le bullpen avaient été correctes, sans plus. Mes lancers nâavaient pas vraiment de vélocité ni de mordant.
Il savait que je revenais de loin, que jâétais en train de me rétablir dâune blessure sérieuse et que le processus allait être long. Mais en même temps, il était conscient que tous les gens qui franchissaient les tourniquets avaient payé pour voir lancer un récipiendaire du trophée Cy Young. Il était donc extrêmement nerveux pour moi et il se demandait si jâallais pouvoir y aller plus à fond dans le cadre dâune vraie compétition.
Pour ma part, jâavais perdu lâhabitude dâentreprendre des matchs. Et avant ce fameux premier rendez-vous à Québec, je suis allé mâéchaufÂÂfer beaucoup trop tôt. Après quelques minutes, me rendant bien compte que jâallais finir par me vider de toute mon énergie avant le premier lancer de la rencontre, jâai décidé de faire une pause et dâaller mâasseoir au champ extérieur avec Pierre-Luc Laforest. Notre gérant est venu nous y rejoindre.
â Les gars, jâai rarement été nerveux comme ça avant un match, ai-je annoncé en brandissant une main droite tremblotante.
Pierre-Luc et Michel ont semblé très surpris par ma confession. Ils se demandaient comment un type habitué de lancer tous les soirs devant des foules de 56 000 personnes au
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